Recueillement n La danse à laquelle les derviches se livraient est plus qu'un accomplissement répétitif d'un mouvement circulaire, il s'agit d'une prière. Dans le cadre de la semaine culturelle turque qu'abrite la manifestation «Tlemcen, capitale de la culture islamique 2011», un spectacle de danse mystique présenté par les derviches tourneurs a été donné, hier, à la salle Atlas. Le spectacle a été initié par l'Office national de la culture et de l'information (Onci). C'était dans une ambiance toute de silence et de quiétude que le public a pu faire immersion dans l'univers à la fois mystérieux et mystique des derviches tourneurs. C'est aussi un univers troublant et captivant. Les danseurs entrent en scène l'un derrière l'autre, formant une file, puis, un par un, ils enchaînent le mouvement, accomplissent le rituel, se laissent aller, transporter par le corps qui tourne autour de lui. Ils font le vide autour d'eux, décrochant avec la réalité présente, avec toute existence palpable ou visible. En tournant, ils entrent en contact avec l'autre monde, ils entament leur communion avec l'intemporel, l'immatériel. Vêtus d'une longue tunique et portant une toque, la tête penchée de côté, les bras ouverts (la main droite levée vers le ciel pour recueillir, selon la croyance de la confrérie, la grâce divine transmise, par la suite, à la terre par la main gauche tournée vers le sol), ils tournent, tournent et tournent encore (ils pivotent sur le pied gauche en traçant un cercle autour de la scène) jusqu'à parvenir à l'extase. Ils s'exaltent. Ils entrent dans une sorte de transe méditative, comme s'ils communiaient avec Dieu. Ils dansent comme s'il s'agissait d'une prière, et leur danse est accompagnée de musique et de chant qui, les deux, favorisent l'accomplissement de soi dans ce rapport de l'être avec Dieu. La danse, à laquelle les derviches se livraient, est plus qu'un accomplissement répétitif d'un mouvement circulaire, il s'agit de quelque chose de profond, de plus intense, de plus sensible ou de spirituel, c'est une prière, un recueillement. Les derviches tourneurs semblent appeler Dieu dans Sa Miséricorde, Le solliciter, Le supplier pour qu'Il leur permette de L'approcher, Le rapprocher afin qu'Il leur accorde Sa grâce et Son pardon. Leur danse est comme une litanie. C'est si profond que les derviches tourneurs nous donnent l'impression de se détacher du sol pour accéder à la félicité, s'élever vers le Ciel. C'est aussi une manière de s'aérer, de se purifier de toutes pensées corruptrices. C'est également quelque chose de sensationnel, de magique. En les regardant, on se veut de rester calme, dans une sérénité régénératrice, et de les accompagner dans leur périple spirituel. Car c'en est un. En tournant, ils nous guident, ils nous ouvrent la voie de l'invisible et nous invitent à pénétrer dans leur monde sacré fait de pureté de l'âme et de sagesse de l'esprit. En tournant, l'on a l'impression de tourner avec eux ; on les suit tout en suivant leur mouvement. On s'affranchit de toute pesanteur. On s'arrache de tout artifice. On est pris dans une euphorie intérieure. Les derviches tourneurs, l'instant d'une méditation, expriment une certaine austérité dans la manière dont l'homme doit vivre.