Dassault Aviation a plus que doublé ses prises de commandes en 2015 grâce aux contrats à l'exportation du Rafale et espère ainsi, à travers sa dualité civil/défense, mieux résister aux vents adverses qui affectent ses jets d'affaires Falcon. Les prises de commandes 2015 ont bondi de 113% à 9,88 milliards d'euros, contre 4,65 milliards en 2014, a annoncé le groupe qui célèbre le centenaire de ses avions cette année. Son ratio de prise de commandes sur le chiffre d'affaires, le "book to bill", s'affiche à 2,4 sur l'année 2015, "du fait, en particulier, des contrats Rafale Export dont le chiffre d'affaires s'étale sur plusieurs années". L'avionneur a remporté ses deux premiers contrats à l'export de son avion de combat au profit de l'Egypte et du Qatar pour 24 appareils chacun, propulsant ses prises de commandes défense à 8,28 milliards d'euros (contre 693 millions d'euros en 2014). Et Dassault pourrait ne pas s'arrêter là alors que les concurrents du Rafale marquent le pas: "nous avons une chance inouïe de pouvoir vendre demain plus de Rafale que nous n'en avons jamais rêvé", a estimé devant la presse Eric Trappier, le P-DG de Dassault Aviation. Tout d'abord en finalisant le contrat avec l'Inde, qui a annoncé en avril dernier son intention d'acquérir 36 Rafale prêts à voler. Le contrat n'est pas bouclé, mais "nous en sommes à la finalisation du prix", a indiqué Eric Trappier. Dassault espère aller plus loin, et discute déjà en anticipation avec ses partenaires indiens pour d'éventuelles commandes supplémentaires. L'avionneur vise également d'autres marchés, notamment la Malaisie ou les Emirats Arabes Unis. En attendant, il se prépare à augmenter la cadence de production de l'appareil, qui sera multipliée par trois en cas de nouveau contrat export.
Efforts de compétitivité Pour l'heure, il prévoit de livrer 9 appareils cette année contre 8 en 2015 (5 à la France et 3 à l'Egypte), puis seulement 4 en 2017 en raison des impératifs liés à la montée en cadence, avant une remontée "très forte" l'année suivante. "Nous préparons la montée en puissance qui commencera réellement en 2018. Nous avons une décroissance du chiffre d'affaires dans un premier temps, c'est assez paradoxal, mais nous montons la cadence pour pouvoir livrer principalement à partir de 2018", a expliqué Eric Trappier. La dualité civil/militaire du groupe lui a permis de mieux affronter les difficultés de sa branche jets d'affaires due à un fort ralentissement économique dans les pays émergents, Chine, Brésil et Russie principalement. Les prises de commandes de Falcon ont chuté de moitié en 2015, avec 45 appareils commandés contre 90 en 2014. Pire, il a subi une annulation de commande de 20 Falcon par l'américain NetJet, portant son bilan net 2015 à 25 commandes. "C'est un chiffre décevant. L'année a été difficile", a reconnu Eric Trappier. "Les grands émergents ont freiné leur développement. Par conséquent, les sociétés de ces pays ont freiné aussi leurs investissements". Dassault a aussi été affecté par les retards de développement du moteur SilverCrest de Safran destiné au Falcon 5X, qui ont repoussé les premières livraisons de l'appareil au premier semestre 2020, contre 2017 jusqu'ici. Avec plus de deux ans de retard, "la réalité dépasse le pire de nos cauchemars", a soupiré Eric Trappier. L'avionneur recevra des compensations de la part de Safran, calculées sur "la globalité du nouveau calendrier" en cours d'évaluation. Pour 2016, année de son centenaire, Dassault Aviation table sur un chiffre d'affaires "inférieur à celui de 2015", favorablement marqué par la livraison de Mirage 2000 modernisés à l'Inde. Il devra aussi faire des efforts de compétitivité face à une concurrence sur les jets d'affaires plus vive que jamais. "Nous sommes sous la pression de la baisse des prix de nos concurrents", a indiqué M. Trappier. "Nous allons faire un exercice de gains de compétitivité et de baisse des prix pour répondre favorablement à cette agressivité de nos concurrents."