Inoubliable parce que le coup d'Etat dont il a été l'objet en 1965 reste jusqu'à présent une énigme pour les générations post-indépendance qui ne comprennent les vraies causes du renversement du premier président de l'Algérie indépendante par le colonel Houari Boumediène et ses compagnons et savent peu de son parcours révolutionnaire, la faute, en partie, aux manuels scolaires qui avaient gommé sa trace jusque dans les années 2000. La véritable histoire de ce pionnier de la guerre d'indépendance de l'Algérie reste à écrire. Il avait accédé au pouvoir en 1963 alors que l'Algérie a retrouvé sa liberté, sa dignité, sa souveraineté, le 5 juillet 1962. Ahmed Ben Bella élu par le suffrage universel en tant que premier président de l'Algérie indépendante jouissait de tous les prérogatives et attributs d'un Président légitime. Les profondes aspirations du peuple algérien auront sous la houlette du Président Ben Bella, franchi un pas décisif dans son programme, voie qu'il n'a cessé de suivre et de défendre. Cela signifiait pour le héros de Novembre 54 qu' " il faut l'unité, mais pour atteindre l'unité, il faut lutter. Quelles que soient les différences existantes. Il nous faut être un tout, un ensemble pour atteindre un objectif donné ". L'Unité de l'Algérie doit être comprise dans un sens dynamique, dans un mouvement populaire. "L'unité c'est priver l'ennemi de la possibilité d'exploiter les contradictions qu'il peut y avoir entre nous afin d'affaiblir la force que nous devons opposer à la sienne… ", disait Ahmed Ben Bella. Que représentait Ahmed Ben Bella dans l'Algérie d'aujourd'hui ? La réponse a été donnée par l'historien Benjamin Stora. Il est d'abord le premier président de la République algérienne indépendante. Il a, à ce titre, une valeur mythique très forte. Il a aussi été le personnage algérien le plus médiatisé pendant la guerre d'Algérie par la presse française et internationale. Le troisième point c'est que la présidence de Ben Bella entre 1962 et 1965 est plutôt synonyme d'effervescence politique, de liberté dans l'imaginaire algérien A travers ses propos Ben Bella sentait que quelque chose se tramait dans son entourage et certains de ses compagnons tiennent à l'utiliser comme un pion sur l'échiquier de leurs rivalités. Deux ans à peine après son élection à la présidence de la République, il est renversé, le 19 juin 1965, par son ancien " camarade " devenu rival, le ministre de la Défense nationale, Houari Boumédiène. Jeté en prison, Ben Bella y restera plus de douze ans sans jamais être jugé, puis placé en résidence surveillée à M'sila, une période pendant laquelle il épousa Zohra Smaili. Ce n'est qu'après l'arrivée du Président Chadli Bendjedid qu'il a été gracié au mois d'octobre 1981. Il s'exila alors en Suisse et ne reviendra en Algérie que dix ans plus tard. Rentré à Alger en septembre 1990, il se retire de la vie politique et se consacre à des dossiers internationaux et rejoint les " altermondialistes " dans leur lutte contre " la mondialisation capitaliste ". Le premier Président de l'Algérie indépendante, fidèle à son principe d'unité nationale prône la "réconciliation nationale " initiée par le Président Abdelaziz Bouteflika. Il se réconcilie avec celui-ci en s'affichant à plusieurs reprises à ses côtés. C'est un soutien symbolique disait-on à Bouteflika. Un soutien nationaliste. C'était une marque par rapport à ce que représentait Ben Bella pour l'Algérie. Il représentait le passage de l'Algérie à l'indépendance et au socialisme. En 2007, Ben Bella est nommé président du groupe des sages de l'Union africaine.
… Ahmed Ben Bella : " je devais disparaître, parce que je gênais… Plus de six années après la disparation du premier président de l'Algérie indépendante, Ahmed Ben Bella, certaines voix commencent à dire la vérité sur le personnage, ce qu'il représentait pour l'Algérie et pour l'Afrique. Les vérités de Ben Bella sont reprises par l'écriture de l'histoire à savoir : l'illégitimité de la domination d'un peuple sur un autre que ce soit en Algérie où ailleurs, la réalité mondiale, et non pas arabe, de la colonisation et des luttes de libération nationale, l'ingérence occidentale pour renverser les gouvernements nationalistes et révolutionnaires du Sud et maintenir les séquelles de la colonisation. Pour le Président Ben Bella, c'est le fondamentalisme évangélique qui exporte la violence. Ahmed Ben Bella est une des hautes figures du nationalisme arabe..Il fut l'un des neufs membres du Comité révolutionnaires algérien (CRA) qui donna naissance au FLN. Arrêté de nouveau en 1956, avec cinq autres compagnons, il est détenu à la prison de la Santé jusqu'en 1962. Après la signature des accords d'Evian, il devient le premier président élu de l'Algérie indépendante. Sur le plan intérieur, il mène une politique socialiste caractérisée par un vaste programme de réforme agraire. Sur le plan international, il fait entrer l'Algérie à l'ONU et l'engage dans le mouvement des non-alignés. Son influence grandissante dans la lutte contre l'impérialisme conduit de grandes puissances à favoriser son renversement par un coup d'Etat militaire. Il est placé en résidence surveillée de 1965 à 1981. Depuis lors, il s'est tenu à l'écart des affaires intérieures, mais continue à jouer un rôle international, notamment en tant que président de la Campagne internationale contre l'agression en Irak. Le Président Ben Bella a payé cher le prix de son insoumission. Il l'a dit de son vivant. " Oui j'ai payé très cher mon combat pour la justice et la liberté des peuples. Mais voilà, j'ai fait ce que j'ai ressenti comme un devoir une obligation. Donc, pour moi le choix n'a pas été difficile. Quand je me suis engagé dans la lutte pour mon pays, j'étais très jeune. Mes horizons se sont ouverts. Je me suis très vite rendu compte que les problèmes allaient au-delà de l'Algérie, que la colonisation touchait quantité de peuples, que les trois quart des pays de la planète étaient colonisés d'une façon ou d'une autre. L'Algérie était alors, pour les Français, un département d'outre-mer, c'était la France de l'autre côté de la méditerranée. La colonisation par la France en Algérie a duré longtemps : 132 ans. J'ai participé à cette lutte-là en Algérie. Tout de suite après l'indépendance, je me suis associé à tous ceux qui, dans le monde, se battaient eux aussi pour libérer leur pays. Il y a donc eu cette phase de lutte de libération nationale à laquelle j'ai participé de façon totale. En Tunisie, au Maroc, au Vietnam, l'Algérie était devenue un peu la mère des luttes de libération nationale e ; les soutenir était donc pour nous une tâche sacrée ". Evoquant le coup d'Etat de 1965, le "Zaïm ", s'est dit ne ressentir aucun mépris, " je ne ressens pas de haine. Je pense qu'ils ont participé à quelque chose qui n'était pas très propre et qui a été très dommageable, non seulement pour le peuple algérien, mais également pour les autres peuples qui comptaient alors sur notre soutien. Mon combat pour apporter de meilleures conditions de vie aux Algériens, alors plongés dans une grande misère, et mon combat pour aider les autres peuples encore colonisés à recouvrer leur liberté, dérangeait fort certains pouvoirs. De leur point de vue j'allais trop loin. Je devais disparaître, parce que je devenais trop gênant. J'abritais pratiquement tous les mouvements de libération, y compris ceux venus d'Amérique latine.