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Le jour d'après à Tigzirt
Après le naufrage de onze harragas de la région
Publié dans Le Soir d'Algérie le 08 - 12 - 2018


Reportage de Saïd Aït Mébarek
Au lendemain de sa survenue, dans la nuit du lundi 3 au mardi 4 décembre 2018, le drame des onze harragas naufragés au large de la bande côtière située entre Tigzirt et Azeffoun hante toujours les esprits et les discussions.
A l'émoi et la consternation s'ajoutent des interrogations sur fond de désarroi, tant ce genre d'épisodes tragiques se suivent et se ressemblent. Quand et qui arrêtera la litanie sordide des corps repêchés en pleine mer ? Ceux de ces jeunes, d'Issoukane d'El-Kalaâ ou de Dellys, morts ou disparus et qui ne tarderont, malheureusement, pas à tomber, comme toutes les autres victimes du phénomène de la harga dans la banalisation statistique des catastrophes.
Le pire que fait craindre cette banalisation des chiffres du malheur de l'émigration clandestine à l'algérienne, nous l'avons perçu dans le regard et les mots des habitants d'El-Kalaâ.
Baigné par la lumière éclatante de cette journée ensoleillée du mercredi 4 décembre, El-Kalaâ, village perché sur une ligne de crête surplombant la ville balnéaire de Tigzirt, semble triste, affligé qu'il est par la perte de l'un des siens, Mohamed M. que tous, ici, désignent, affectueusement, par le diminutif de Moumouh.
La tragique nouvelle du décès de ce jeune de 29 ans qui a tenté l'aventure de l'improbable voyage en mer sur une felouque, pour rejoindre les côtes européennes, a ému tous les villageois qui se sont préparés, dès la matinée, aux obsèques de la victime dont la dépouille ne sera rapatriée que vers dix-neuf heures de la morgue de l'hôpital d'Azeffoun, pour être enterrée vers vingt heures
La quête de l'illusoire bonheur
Beaucoup se demandent pourquoi et comment, le jeune Moumouh a fait partie de l'aventure de l'émigration clandestine qui a tourné au drame. Membre d'une fratrie de trois garçons et une fille, la victime est issue d'une famille plutôt à l'aise, sur le plan matériel. Il gère même un petit commerce en ville, à Tigzirt.
Témoignages. Mohamed, la trentaine, ingénieur en maintenance industrielle au chômage, et Mohand-Arezki, un cinquantenaire et membre du comité du village, décrivent le défunt comme un garçon bien sous tout rapport. «Souriant, avenant et, plutôt, discret», nous disent d'une seule voix nos interlocuteurs. Quid donc des raisons qui ont poussé ce jeune, apparemment bien dans sa peau, à tenter l'aventure de la harga ? Au village, on a peine à comprendre comment et pourquoi le jeune Mohamed a cédé à la tentation de l'impossible voyage. Peut-être l'illusion de vivre mieux au-delà des mers.
Fuir l'univers carcéral que représente ce pays, pour beaucoup de jeunes. Des jeunes qui voient le temps s'écouler inutilement et qui voudraient avoir une situation sociale stable, c'est-à-dire se lever chaque matin et aller au travail comme tout le monde, fonder une famille, avoir une maison, comme nous le dira, dépité, le jeune ingénieur qui ne compte pas le nombre de CV déposés et d'entretiens d'embauche subis, sans pour autant arriver à décrocher un emploi. «Je n'irai pas jusqu'à cautionner le drame, mais les raisons qui poussent ces jeunes à braver les dangers de la mer pour donner une autre trajectoire à leur vie sont, des fois, justifiées», ajoute, un tantinet fataliste, le membre du comité de village Mohand-Arezki. «Il semble que l'expérience de la harga réussie d'un groupe de jeunes de la région de Tigzirt qui ont appareillé au mois de septembre dernier et qui ont pu rejoindre les côtés italiennes a suscité des vocations du départ chez de nombreux jeunes, à l'exemple de Moumouh et ses compagnons», tente d'expliquer ce membre du comité du village pour qui la tragédie vécue en plein mer, mardi dernier, ne peut arrêter la saignée et servir d'effet dissuasif pour les prochains candidats au départ. En tout cas, pour le défunt Mohamed d'El-Kalaâ et tous ses autres compagnons d'infortune, l'aventure a viré au cauchemar. Le bilan de l'horrible tragédie est lourd : six blessés (rescapés) qui ont fini par quitter l'hôpital et rejoindre leurs domiciles, deux morts et trois disparus non encore retrouvés.
Une improbable équipée
Tout a commencé au petit matin du mardi 3 décembre 2018. Onze jeunes gens, à peine la trentaine dont deux sont originaires de Dellys et le reste du groupe issus de deux villages d'Iflissène, ont appareillé à bord d'une barque de pêcheur depuis une crique située entre Tigzirt et Azeffoun. A bord de l'embarcation d'à peine cinq mètres, avons-nous appris, 530 litres d'essence et un moteur de secours et quelques menus effets que les onze candidats à l'émigration ont emportés avec eux. D'où sont-ils partis ? Quelles sont les raisons du naufrage ? Difficile de percer le mystère. En attendant le témoignage des rescapés, des versions fusent.
Des discussions engagées avec Mohamed et Mohand-Arezki du village El-Kalaâ, lors des obsèques du jeune Mohamed M., nous apprîmes un peu plus sur les conditions d'embarquement et les raisons du chavirement de la barque. Le départ aurait eu lieu à partir de Tamda Ouguemoun, une crique située à quelques encablures, à l'est de Tigzirt, célèbre pour ses «paillottes», ses restaurants «sauvages» et informels érigés sur les lieux. Sûr de lui, Hamid, gérant du restaurant le Petit Paradis, réfute la thèse de l'embarquement à partir de Tamda Ouguemoun. «Aucun mouvement suspect n'a été remarqué dans la nuit de lundi à mardi. Il est impossible qu'une embarcation étrangère aux lieux ne soit pas remarquée par les pêcheurs qui ont l'habitude de partir d'ici pour leur travail. De plus, il y a une vigilance accrue des propriétaires des restaurants qui tiennent à la sécurité de l'endroit», signale Hamid, formel et sûr de lui. «Les jeunes ont embarqué à partir de la plage Azaghar, près du village Mlatha, à deux kilomètres d'Azeffoun», tranche le restaurateur. Quid des conditions et des causes du naufrage ? Là aussi, on se perd en conjectures. Un fait est sûr, c'est au large de la côte d'Azeffoun que l'embarcation chavire à cause d'une avarie causée par le moteur dans la coque de l'embarcation qui provoqua des infiltrations d'eau dans l'habitacle. C'est la panique à bord et la barque se retourna sur elle-même, alourdie qu'elle était par le poids des onze passagers, la cargaison d'essence (plus de 500 litres) et d'un moteur de secours. D'aucuns avancent la thèse d'une altercation entre les membres du groupe dont certains auraient exigé de rebrousser chemin. La suite est connue. Tous se retrouvent la proie des flots. C'est le sauve-qui-peut… à la nage. Un exercice qui n'a pas réussi à tout le monde.
Sur les onze jeunes embarqués sur la felouque, deux trouveront la mort, trois sont toujours portés disparus et six auront la vie sauve grâce à l'intervention miraculeuse d'un pêcheur amateur, un certain S. Abdenour qui était à bord de son embarcation, avec deux de ses amis. Avant d'alerter les gardes-côtes de la marine nationale, S. Abdenour, qui s'est confié à des journalistes, a commencé par secourir les naufragés. Il sera aidé par le propriétaire d'un bateau de pêche qu'il avait pris le soin d'appeler sur son portable.
Isoukane ou les guetteurs de l'espoir
A Isoukane, c'est la mobilisation des villageois pour retrouver les deux naufragés encore portés disparus, dont Cherif Medjiba, 24 ans, originaire de ce village. A la certitude de le retrouver encore en vie qui se rétrécit de jour en jour, les villageois, qui compatissent à la douleur de la famille de la victime, s'accrochent à l'espoir de voir la mer refluer le corps du jeune Cherif pour permettre à sa famille de faire son deuil.
Tôt dans la matinée de mercredi dernier, où ils ont répondu à un appel à la mobilisation, les villageois se relayaient pour faire le guet sur tout le long de la bande côtière située entre Tigzirt et Azeffoun, caressant le vœu de repérer un signe de la présence du corps du jeune Cherif.
Depuis mercredi, des pêcheurs de la région de Tigzirt, à bord de leurs embarcations, se sont joints aux éléments de la Marine nationale qui ont entrepris des recherches en pleine mer.
Des recherches qui ne se sont pas arrêtées. Elles se sont poursuivies jeudi et vendredi, malgré une météo quelque peu défavorable.
S. A. M.


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