Les choses étaient peut-être prévisibles pour certains observateurs de la vie politique algérienne. Jusqu'à il y a quelques semaines encore, personne à un haut niveau n'aurait cru les algériens capables de tenir tête à un système qui a, depuis toujours, tout verrouillé autour de lui, pour n'avoir, jamais, aucun compte à rendre à ses administrés. Nous voilà d'ailleurs, encore aujourd'hui, confrontés à une direction dont tout dans le comportement indique qu'elle n'est pas prête à lâcher prise et qui continue, comme dans un dernier souffle, à vouloir s'imposer comme une force inusable. Parce que lorsque l'on jouit d'autant de privilèges, on ne lâche pas la proie pour l'ombre sur un claquement de doigts. Même si toutes les marches et toutes les manifestations sont loin d'illustrer un simple claquement de doigts. Les questions que je ne cesserai de me poser et je suis loin d'être la seule sont : tant que le système, dont tout un pays exige le départ, accumule les promesses sur lesquelles il a construit toutes ses campagnes électorales, pourquoi ce que l'on n'a pas jugé utile de faire pendant 20 ans deviendrait un contrat réalisable en quelques mois ? Pourquoi ceux que l'on a refusé d'écouter durant 20 ans seraient disposés à nous accorder du crédit aujourd'hui ? Et, surtout, pourquoi des promesses réitérées à chaque rendez-vous électoral, qui s'envolent aussitôt passée la fièvre des urnes, auraient-elles la moindre chance d'être tenues cette fois-ci et en un laps de temps aussi court ? Les choses se seront, depuis, compliquées. Maintenant que la rue qui leur était interdite a été reprise des mains de leurs geôliers, de l'autorité qui la leur avait confisquée, les algériens ont élevé le degré de leurs aspirations. Pendant des années, ils ont surfé sur les attentes citoyennes et ils voudraient encore garder la mainmise sur la conduite des affaires. Comment ceux qui ont travaillé à la casse pourraient-ils faire autrement que continuer ? Un système qui malmène, à l'excès, son personnel et dont ce dernier ne conteste jamais la sévérité, ne renoncera pas aisément aux énormes privilèges qui restent à consommer. M. B.
