Un nouveau changement a été opéré à la tête de la Direction de la pharmacie au niveau du ministère de la Santé et de la Population, avec le remplacement du Pr Mohamed Nibouche par le Pr Hakim Boudiss qui occupait le poste de responsable du contrôle et des agréments des usines pharmaceutiques. Si certains y voient un limogeage s'inscrivant dans le cadre de l'installation d'une nouvelle équipe avec des critères définis, d'autres l'interprètent comme étant un signal fort pour rendre les liens d'intérêt avec les laboratoires pharmaceutiques plus visibles et mettre les professionnels face à leurs responsabilités. Dans cette conjoncture sanitaire particulière, aucun faux pas n'est toléré. Toutes les décisions et tous les gestes des responsables au niveau de la Direction de la pharmacie sont sous les feux de la rampe et la réactivité face à des situations de dernière minute, ou qui s'inscrivent dans l'urgence doit primer sur le cours de la procédure habituelle. C'est le cas d'un opérateur en produits pharmaceutiques qui a tenté d'importer de Chine une quantité non négligeable de bavettes au moment où il y a une véritable tension sur ce produit sur le marché mondial et malgré cela, il a pu réaliser une commande mais pour pouvoir l'importer, il lui fallait une dérogation du directeur de la pharmacie du ministère de la Santé puisque seule la PCH est habilitée à importer, chose que ce dernier n'a pas voulu faire. D'autres sources invoquent des résultats d'une enquête non concluante des services de sécurité pour confirmer ce responsable dans son poste, lui qui était depuis sa nomination intérimaire et ce, en raison de ses liens avec des boîtes pharmaceutiques. Une situation qui renseigne une fois de plus sur le conflit d'intérêt qui régit, malheureusement, certaines relations des responsables au niveau du ministère de la Santé, des commissions d'homologation ou d'enregistrement de produits pharmaceutiques avec certains laboratoires pharmaceutiques. Ces derniers ont tissé une dense toile de liens au sein de la profession médicale qui n'a pas été sans influence sur plusieurs décisions des sphères à la commande du secteur pharmaceutique. En contrepartie, des privilèges sont accordés et qui permettent à quelques-uns des « responsables » du secteur de la santé (industrie pharmaceutique, commission, remboursement…) d'être invités en VIP pour passer des séjours avec leurs familles à Paris ou à Dubaï, par exemple, à l'occasion de congrès scientifiques. En Algérie, les conventions qui représentent des avantages accordés avec des personnes influentes ne sont jamais révélées. Sur ce plan, c'est le désert juridique, ce qui représente une aubaine pour plusieurs firmes pharmaceutiques internationales et même nationales pour avoir toute latitude d'agir en activant dans l'opacité totale. Quand on sait que le marché du médicament et autres produits consommables connaîtra une forte augmentation dans les prochaines années et que la facture des médicaments issus de la biotechnologie atteindra un milliard de dollars en 2020 selon les prévisions, nous avons une vision claire sur le poids de ce marché juteux. Selon les statistiques de la Direction générale des Douanes algériennes (DGD), les importations des médicaments pour la vente en détail (classés dans le groupe des biens de consommation non alimentaires) ont enregistré une hausse cette année de 42,16%, en s'établissant à 156,80 millions usd, contre 110,30 millions usd à la même période de 2019. Heureusement que « l'Algérie est fermement décidée à développer une industrie pharmaceutique forte pour diminuer au plus près sa facture d'importation de produits de soins et d'économiser, dans une première phase, quelque 400 000 dollars », selon les dernières déclarations du ministre délégué à l'Industrie pharmaceutique, Lotfi Benbahmed, qui avait critiqué les décrets existants jusque-là pour organiser la filière des médicaments, en signalant que ces derniers étaient « clairement orientés » vers un but d'affaiblissement de la production nationale de médicaments. Ilhem Tir