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A fonds perdus
Une garde à vue «arbitraire»
Publié dans Le Soir d'Algérie le 19 - 05 - 2015


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Police et justice (de la cour d'appel de Paris à la cour de cassation) peuvent faillir à leur devoir librement accompli de dire le droit, y compris au pays des droits de l'Homme.
À un adolescent malien seul en France, porteur d'un acte de naissance et d'une carte d'identité établissant sa minorité, la cour d'appel de Paris rétorque que «son allure et son attitude ne corroborent pas sa minorité» (décision CA Paris du 26 mars 2015). Les implications d'une telle décision sont lourdes : en décidant ainsi, la cour laisse ce jeune à la rue puisqu'il ne pourra pas prétendre à sa prise en charge par l'Aide sociale à l'enfance.
Sur un tout autre terrain, celui de la garde à vue, dans l'arrêt François contre France de ce 23 avril 2015(*), la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) condamne vigoureusement la France.
L'affaire est grave. L'objet du litige porte sur les conditions de la garde à vue et l'humiliation d'un avocat.
Les faits. Dans la nuit du 31 décembre 2002 au 1er janvier 2003, un avocat au barreau de Paris, Daniel François, est appelé au commissariat d'Aulnay-sous-Bois pour assister un mineur placé en garde à vue. À l'issue de l'entretien avec son client, qui déclare avoir été victime de violences policières et qui présente des lésions sur le visage, l'avocat rédige des observations écrites sur son papier à en-tête et demande un examen médical de son client mineur.
Deux versions vont être présentées pour la suite des événements, chaque partie faisant valoir des dépassements.
En France, la version qui a prévalu est que, devant les insultes et menaces de représailles, l'officier de police judiciaire a arrêté l'avocat et l'a placé en garde à vue, le 1er janvier 2003 à 1 h 20 «pour rébellion et outrage à agent de la force publique». Il a été immédiatement conduit dans une cellule, défait de ses objets, y compris de sa sacoche professionnelle, de ses lacets et soumis à une fouille à corps par deux fonctionnaires. Enfin, il a été mis en demeure de se déshabiller intégralement, de se pencher une fois nu et de tousser. L'avocat a également subi un contrôle d'alcoolémie, ressorti négatif.
Chaque partie engage une procédure parallèle. L'officier de police judiciaire, comme partie civile, fait citer l'avocat à comparaître devant le tribunal correctionnel des chefs d'outrage et rébellion l'instruction en cours. De son côté, l'avocat dépose plainte avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d'instruction de Bobigny des chefs de faux et usage de faux en visant le contenu des procès-verbaux dressés dans le cadre de la procédure dont il avait fait l'objet.
Par la suite, les deux affaires se sont trouvées jointes, le juge d'instruction rend une ordonnance de non-lieu, confirmé par la chambre de l'instruction de la cour d'appel.
Pour la chambre de l'instruction, «les versions des policiers étaient circonstanciées, constantes et concordantes», alors que la thèse de l'avocat était peu vraisemblable. Il ne pèse alors aucun doute sur la version commune des faits avancée par les policiers. Cette version est validée par la cour de cassation. La Cour européenne des droits de l'Homme n'entend pas les choses de la même oreille.
Elle pointe d'abord du doigt le droit applicable aux fouilles à corps.
Le gouvernement français soutient que la mesure de garde à vue était «régulière, justifiée et proportionnée». Il concède toutefois l'existence d'un «conflit d'intérêts», la mesure de garde à vue ayant été décidée par le fonctionnaire de police qui s'estimait outragé. Il considère pour autant que cela ne saurait priver la mesure de privation de liberté de fondement légal.
Il prétend en outre que la mesure de garde à vue est obligatoire dès lors qu'un officier de police use de contrainte. Il ajoute que la mesure a été validée par le magistrat du parquet qui en a été informé. Enfin, il indique que la mesure a été réalisée conformément au code de procédure pénale (CPP) et que sa durée n'était pas disproportionnée, compte tenu notamment de l'arrivée tardive du conseil du requérant. La Cour européenne des droits de l'Homme rappelle que la question qui lui est posée est celle de savoir si la privation de liberté du requérant a été effectuée «régulièrement et de manière non arbitraire, conformément aux exigences de l'article 5-1 de la Convention européenne des droits de l'Homme» et, plus spécialement au regard de l'article 5-1 c), si elle était justifiée en vue de la conduite du requérant devant une autorité judiciaire compétente, compte tenu du fait qu'il était soupçonné d'avoir commis des infractions. Il lui appartient donc d'apprécier à ce titre si le placement en garde à vue était, dans les circonstances de l'affaire, «nécessaire et proportionné».
La CEDH résume minutieusement le droit interne en vigueur en distinguant les «fouilles à corps» (dites aussi fouilles intégrales ou d'enquête) des «investigations corporelles», dites de sécurité.
Les premières sont traditionnellement assimilées à des perquisitions et relèvent pour l'essentiel des règles applicables à ces actes d'enquête : il doit y avoir des indices de commission ou de participation à la commission d'une infraction en lien avec la mesure d'enquête ; de même, en dehors du cas de flagrant délit ou de l'exécution d'une commission rogatoire, l'enquêteur ne peut imposer une telle fouille et doit solliciter l'autorisation de l'intéressé.
Contrairement à une fouille à corps réalisée sur une personne incarcérée, la «fouille à corps de sécurité» réalisée en garde à vue ne faisait l'objet d'aucune réglementation spéciale au moment des faits. En l'espèce, les fouilles à corps de sécurité semblent avoir dépassé de simples «palpations» de sécurité pour être considérées comme des «fouilles d'enquête».
La cour constate à ce titre qu'il n'existait pas à l'époque des faits de réglementation autorisant une telle fouille allant au-delà de simples «palpations de sécurité».
Ainsi, de l'avis de la cour, «dans les circonstances particulières de l'espèce, le fait de placer le requérant en garde à vue et de le soumettre à de telles mesures excédait les impératifs de sécurité» et établissait au contraire «une intention étrangère à la finalité d'une garde à vue».
Le placement en garde à vue de l'avocat n'était «ni justifié ni proportionné» et la privation de liberté subie n'était pas conforme aux buts de l'article 5-1, et plus spécialement de l'article 5-1 c).
Second point d'intérêt majeur dans l'affaire : la protection de la liberté. L'article 5 de la convention consacre un droit fondamental, la protection de l'individu contre les atteintes arbitraires de l'Etat à sa liberté. En proclamant le «droit à la liberté», l'article 5-1 ne concerne pas les simples restrictions à la liberté de circuler, mais vise la liberté physique de la personne ; il a pour but d'assurer que nul n'en soit dépouillé de manière arbitraire.
Lorsqu'elle est requise, une privation «régulière» des libertés suppose qu'elle soit effectuée selon les «voies légales».
Toutefois, la «régularité» de la détention au regard du droit interne est un élément essentiel mais non décisif : «Le respect du droit national n'est pas suffisant : l'article 5-1 exige de surcroît la conformité de toute privation de liberté au but consistant à protéger l'individu contre l'arbitraire. Il existe un principe fondamental selon lequel nulle détention arbitraire ne peut être compatible avec l'article 5-1, et la notion d'"arbitraire" que contient l'article 5-1 va au-delà du défaut de conformité avec le droit national, de sorte qu'une privation de liberté peut être régulière selon la législation interne tout en étant arbitraire et donc contraire à la convention.»
Par ces motifs, la cour, à l'unanimité, condamne l'Etat défendeur, la France, à «verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l'arrêt sera devenu définitif conformément à l'article 44-2 de la convention, la somme de 15 000 euros (quinze mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt, pour dommage moral».
Et si on appréciait notre situation nationale à l'aune de cette jurisprudence ?
A. B.
(*) Cour européenne des droits de l'Homme, cinquième section, affaire François contre France, requête n°26690/11, fait en français, puis communiqué par écrit à Strasbourg, le 23 avril 2015.


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