Et si le cireur de pompes, applaudissant � tout rompre � l�abrogation du cr�dit aux m�nages, �tait en brouille avec ses pairs du syndicat ? En tout cas, c�est ainsi que l�on peut comprendre le nouveau recadrage de la position de l�UGTA sur le sujet. Car � lire avec attention les r�centes assertions de certains membres de sa direction, l�on discerne une f�brilit� inqui�te, d�o� le d�sir de nuancer au plus vite la d�claration tonitruante de Sidi- Sa�d. C�est qu�en d�sespoir de cause, ils �taient oblig�s de corriger l�impopulaire impression qu�elle a laiss�e dans le milieux des salari�s. �Comment r�tablir le cr�dit � la consommation�, titrait � leur sujet notre confr�re Libert� (le 26 ao�t), r�sumant de la sorte la h�te que met le syndicat � gommer les propos d�un z�lateur en les transformant en th�me de r�flexion ! C�est que, plaide- t-on, l�UGTA serait d�j� dispos�e � �r�fl�chir sur les possibilit�s d�amorcer un retour vers le cr�dit � la consommation�, mais uniquement index� � la production nationale. Un argument d�une exquise hypocrisie qui sauve � la fois les apparences d�un secr�taire g�n�ral d�mesur�ment aux ordres, tout en se donnant l�opportunit� de disserter sur ce qui n�existe gu�re. Une pirouette de politicards pr�chant pour des offres inexistantes sur le march� national afin de faire valoir leur patriotisme �conomique dont c�est la mode de nos jours. Un remarquable rebond pour faire diversion et dans le m�me temps amorcer sa propre campagne en vue de la prochaine tripartite. Car pour l�UGTA, il faut aller � cette fausse table des n�gociations avec un air de partenaire. Du moins s�y associer au nom d�une l�gitimit� qui lui est pourtant contest�e sur le terrain syndical. C�est, d�ailleurs, ainsi que cette officine excelle, � la veille des �ch�ances, dans l�art de faire monter la mayonnaise afin d�appara�tre comme le repr�sentant indiscutable des travailleurs. Une vanit� de circonstance pour qui se souvient du nombre de fois o� elle mena � son terme quelques combats. R�citant les m�mes promesses qu�hier, elle affirme d�j� qu�elle interviendra sans concession aucune sur la question du salaire minimum l�gal sauf qu�elle demeure discr�te, voire muette, sur les propositions qu�elle fera. Voil� ce qui s�appelle �tre �gagnant� en d�pit de tout ! Mais l��tranget� de sa future pr�sence est encore aggrav�e par le fait que m�me le patronat, alli� par d�finition des pouvoirs publics, trouve cette fois-ci � redire sur ce rendezvous. Les mesures contenues dans la LFC ayant cr�� un schisme dans l�axe gouvernement- patronat, ce syndicat s�estime fond� de se rapprocher un peu plus du premier et solliciter ses bonnes gr�ces. Comme si les puissances d�argent n�avaient pas leur mot � dire sur la relance de l�emploi par exemple. Un d�rapage tactique qui renforce l�unilat�ralisme du politique au d�triment de la concertation qu�incarnait en th�orie la tripartite. A contre-temps et surtout en occultant d�lib�r�ment le contexte du moment, elle continue � d�fendre cette messe pourtant vid�e de toute efficacit�. Dans le bunker de la place du 1er-Mai, on insiste, sans d�mordre, sur la capacit� de cette �table ronde� � d�lib�rer sur les options majeures. Alors qu�elle sait ce qu�il en est advenu de tous les pactes du pass�, l�UGTA persiste, par instrumentation, � en faire l�apologie. A l�origine de cet aveuglement, il y a la lente d�liquescence de sa vocation de catalyseur des revendications. Ainsi, c�est au moment o� l�opacit� politique du pouvoir est la plus inqui�tante que se pr�pare un inutile round de n�gociations avec de suppos�s partenaires sociaux et �conomiques. Une programmation en totale contradiction avec la conception dirigiste d�un r�gime plut�t enclin � ordonner et diffuser des feuilles de route qu�� consulter et d�cider par consensus. La grande id�e d�un pacte social pour un �changement global et qualitatif�, comme le proph�tisait le chef de l�Etat lui-m�me en 1999, a d�j� v�cu. Dix ann�es se sont �coul�es, et ce qui reste de ce tripartisme avort�, c�est une opportunit� de faire de la �com� � bon compte. Plus personne ne se trompe sinon l�UGTA qui y gagne en sursis. En effet, face � un r�gime rattrap� par ses imprudences financi�res et improvisateur � l�exc�s, comment et quoi n�gocier qui ne va pas demeurer lettre morte ? Ballott� entre les forces sociales � cran et les lobbies d�int�r�t, l�Ex�cutif ne b�n�ficie que de la marge �troite pour agir sur les �v�nements. Celle qui le contraint � convoquer solennellement quelques acteurs et parapher � c�t� d�eux un proc�s- verbal de r�union. Une mani�re courante de faire dans la communication en s�exon�rant de ses �checs. Bien �videmment, un pareil rendez-vous se conclura par la satisfaction de quelques revendications. De la petite m�decine afin de faire patienter son petit monde. Ici de la quinine pour l�UGTA et l� du sirop pour les organisations patronales alors que le grand malade demeure un pays tout entier sans soins et s�enfon�ant chaque jour dans la d�prime. Mais comme l�UGTA ne sait voir �midi que devant sa porte�, elle pavoisera une fois de plus en se gaussant de ses bonnes n�gociations. Il est vrai que lorsqu�on est un syndicat sans syndiqu�s, l�on peut s�autoriser toutes les autoglorifications sans risque d��tre d�menti. Cas d�esp�ce illustrant la d�rive du syndicalisme, cette organisation constitue d�sormais le plus p�nible des archa�smes qui r�siste encore face au renouveau du combat des travailleurs. En l�absence d�une politique �clair�e et d�un dialogue ouvrant de v�ritables perspectives au pays, le pouvoir conserve en l��tat cet appareil qu�il destine aux basses besognes. Mais sait-il que les fausses messes, telle la tripartite, et qui lui servent de caisse de r�sonance, n�ont jamais requinqu� un corps social alit� ? Et cela m�me lorsqu�il lui d�l�gue l�UGTA comme garde-malade.