Hier, tous les internautes du monde ont découvert sur leurs écrans l'autoportrait du grand peintre M'hamed Issiakhem. Google, le moteur de recherches le plus utilisé par les internautes dans le monde a décidé, hier, de rendre hommage au grand peintre algérien en mettant son autoportrait en ouverture sur l'écran. C'est-à-dire que toutes les personnes ayant utilisé le moteur Google hier, se sont retrouvés face à ce peintre exceptionnel qui a marqué la peinture algérienne mais aussi mondiale puisque le site créé à la Silicon Valley en 1998 en Californie ( USA) le confirme. M'hamed Issiakhem qui nous a quittés il y a 33 ans, le 1e décembre 1985 est l'un des fondateurs de la peinture moderne algérienne. «Un pays sans peintres, sans poètes et sans culture est un pays mort», avait dit Issiakhem dont les œuvres se trouvent dans des musées algériens, mais aussi chez des privés en Algérie et à l'étranger. Cette citation de l'artiste prouve bien qu'il a raison puisqu'à travers cet hommage que lui rend google, c'est toute l'Algérie qui est honorée. Issiakhem, qui a passé une grande partie dans la souffrance notamment durant son enfance, était destiné à rester dans l'histoire. L'homme avait choisi le crayon et le pinceau pour dire ses souffrances. L'artiste ne parlait pas beaucoup, il préférait s'exprimer à travers ses tableaux, des tableaux qui resteront éternellement. Issiakhem, qui était né en kabylie et parti à l'âge de 3 ans à Relizane, a connu la misère et la souffrance du temps de la France. Alors qu'il n'avait pas dépassé les quinze ans, l'enfant M'hamed se fait amputer de son bras droit suite à l'explosion d'une grenade volée dans un camp militaire. Ses deux sœurs et son neveux qui jouaient avec lui y laisseront leur vie. Il gardera l'image de cette grenade française qui explose dans sa main et la mort de ses deux sœurs devant lui à vie. Mais l'artiste ne parle pas, ne se plaint pas, il dessine. Le pinceau comme béquille Sa seule béquille, son seul soutien, c'était son pinceau, son fusain ou son crayon avec lequel il étalait des couleurs souvent sombres comme cette France coloniale qui l'avait privé de l'usage de l'une de ses mains. Et que serait devenu Issiakhem s'il avait gardé ses deux membres ? Personne ne le sait. Ce qu'on sait est qu'Issiakhem a laissé des œuvres qui resteront comme témoins de ce qu'il aura vécu et de ce qu'il voulait dire à cette France qui l'a fait souffrir lui et tout le peuple algérien. Issiakhem, à travers ses œuvres, a également parlé à ces jaloux qui le critiquaient parce qu'ils ne lui arrivaient pas aux chevilles lui, qui fut parmi les plus brillants élèves de Omar Racim à la fin des années 1940 et professeur d'art graphique à l'école d'architecture et d'urbanisme d'Alger, au lendemain de l'indépendance. C'est en 1947 qu'Issiakhem se retrouve comme élève du miniaturiste Omar Racim au sein de la société des Beaux-Arts d'Alger qui continue à ce jour à former des dessinateurs, peintres et musiciens. Au début des années 1950, il ira parfaire ses connaissances à l'école des Beaux-arts de Paris durant cinq années. Il séjournera par la suite en RFA et en RDA. L'artiste retournera en Algérie en 1962 où il reprendra ses activités artistiques, notamment en tant que dessinateur au quotidien Alger Républicain et membre fondateur de l'Union Nationale des Arts Plastiques. Distinctions méritées Il rejoindra l'école nationale des Beaux-arts comme chef d'atelier de peinture avant d'être appelé en tant que directeur pédagogique de l'Ecole des Beaux-arts d' Oran. Issiakhem a réalisé les décors du film La voie, de Slim Riad et ceux du film «Poussières de juillet», un film sur le retour du corps de l'Emir Abdelkader, produit et réalisé en collaboration avec son ami Kateb Yacine, et dont on ne garderait, hélas, aucune copie. Issiakhem, qui avait dessiné le billet de 5 dinars, a été distingué de son vivant, notamment par plusieurs médailles en Algérie et à l'étranger. En 1980, il avait reçu le Premier Simba d'Or (Lion d'Or) de Rome, distinction de l'UNESCO pour l'art africain. Après sa disparition, on lui a rendu hommage en éditant son portrait sur un timbre postal, lui qui avait réalisé le timbre du 1er festival culturel panafricain de 1969. C'est dire que l'hommage rendu par Google à Issiakhem est bien mérité.