Le peuple a entamé hier vendredi, son troisième mois de contestation, avec une mobilisation des grands jours. Des dizaines de milliers de personnes ont bravé en effet la chaleur suffocante, et pour la grande majorité l'épreuve du jeûne, afin de battre pacifiquement le pavé pour le quatorzième vendredi consécutif, et exprimer leur réprobation du système. Les premiers carrés en place, les militants d'extrême gauche, reconnaissables à leurs banderoles rouges, ont entonné le premier slogan qui ne laisse pas douter quant à la volonté du peuple d'en finir avec le régime. «La révolution est populaire- oui pour la justice sociale», scandaient les jeunes militants de gauche. Au fur à mesure que les rangs grossissaient, les slogans deviennent plus virulents à l'égard du vice-ministre de la Défense nationale, pris pour cible encore une fois par les manifestants, qui hurlaient de toutes leurs forces : «Gaid Salah, chef de la mafia.» Et Karim Tabou, qui a fait son apparition dans la marche, a galvanisé la foule qui hurlait : «Gaid Salah dégage !». Tout le long de la marche, l'armée et son chef ont été désapprouvés par les manifestants. «On exige un Etat civil, pas un Etat militaire!», «Bensalah et Gaid Salah dégagez !», ou encore «l'Algérie n'est pas une caserne !», a été scandé par la foule pendant presque une heure. Arrivés à hauteur de la cité CNS, les manifestants marquent une pause en chantant, en attendant que le tifo soit déployé du haut des dix étages de l'imposante cité populaire, sous les cris de milliers de citoyens. Chants, feux d'artifices accompagnent la divulgation du tifo, sur lequel on distingue des têtes de clowns et un joker. La procession continue sa marche pour marquer une seconde fois un arrêt, au niveau de la place de la Liberté Saïd Mekbel pour écouter l'hymne national, diffusé à partir d'un véhicule. Les manifestants lèvent le bras au ciel en signe de victoire, et écoutent dans un silence religieux «qassaman !». Aussitôt, la foule reprend la marche. Aux «Gaid Salah dégage !» se succèdent les «pas de vote !», et la célèbre citation «nos rêves ne rentrent pas dans vos urnes !». Des slogans qui expriment de manière franche le rejet par le peuple de l'élection présidentielle du 04 juillet prochain.