Quand ça ne va plus, ça ne va plus. On aurait pu imaginer une plus grave détérioration des relations troublantes entre Washington et Kaboul surtout après que l'ancien numéro 2 de l'Onu en Afghanistan ait sérieusement douté de la stabilité mentale du président Karzaï. A tel point que les médias occidentaux se demandent si le maître contesté de Kaboul n'est pas accroc à la drogue. Opiomane ou non, Hamid Karzaï a démenti avoir proféré une quelconque menace de rejoindre l'insurrection afghane. S'il y a aujourd'hui une rébellion qui fait polémique, c'est certainement celle qui continue de sévir en Irak. Les saddamistes auraient-ils l'intention de trahir leur promesse quant à venger l'effondrement du pouvoir sunnite au profit de leurs «frères» chiites ? Ou les djihadistes, affiliés à Al Qaïda, auraient-ils renoncé à fonder leur Etat islamique irakien ? Alors que les ténors du camp chiite continuent de négocier les portefeuilles au sein du prochain gouvernement de Ayad Allaoui, une partie de cette même insurrection est invitée à se rendre en Turquie afin de participer à une conférence, la deuxième du genre depuis la chute de Saddam. L'exécutif de Nouri El-Maliki n'en revient pas, le gouvernement d'Ankara serait en train de lui replanter un couteau dans le dos. A Baghdad, on voudrait bien répertorier cette mouche qui a piqué Reccep Tayyip Erdogan pour qu'il décide de prendre une telle initiative. Mais pas la peine de la chercher sous les tropiques, la vision des Turcs est claire comme l'eau de roche. Parce que l'occupation de l'Irak se poursuit que l'insurrection doit continuer de jouir du statut de «résistance» à l'occupation étrangère et non pas du profil amalgamant de terroriste. C'est dire qu'à Ankara, le traité sécuritaire passé entre Washington et Baghdad est nul et non avenu. Et tous ces cadavres d'innocents qui s'amoncèlent dans les morgues ? Que Dieu puisse les accueillir dans son Vaste Paradis, les sunnites irakiens armés méritent le plein soutien de la part de la Turquie. Ses autorités craignent-elles que l'influence chiite en Irak ne vienne confirmer le statut de puissance régionale dont pourraient se targuer demain les mollahs d'Iran ? L'alliance turco-iranienne serait-elle que cette alliance objective qui servirait plus à contrôler les ambitions hégémonistes du régime de Téhéran ? Le gouvernement d'Ankara n'en dira pas plus sur son assistance politique aux insurgés irakiens. Tout comme celui de Damas que l'administration irakienne, à dominance écrasante chiite, accuse d'abriter les commanditaires des spectaculaires attentats, perpétrés dans un passé récent sur le sol irakien. Avec des centrifugeuses qui tourneraient six fois plus vite et des dirigeants irakiens chiites qui se rendraient pour des consultations postélectorales, la République islamique d'Iran réagira-t-elle à l'initiative de la Turquie qui se propose d'abriter une conférence au bénéfice de la «résistance» irakienne ? La réaction pourrait émaner du Département d'Etat US qui n'hésiterait pas à accuser les Iraniens de tirer les ficelles du désordre politico-sécuritaire qu'impose la rébellion irakienne. Un fichier à joindre au lourd dossier des charges retenues contre Téhéran, en prévision du vote du projet de sanctions devant le Conseil de sécurité.