«Je pense qu'on a donné un cadeau magnifique aux Qataris et maintenant il faut qu'ils s'adaptent un petit peu aux choses. Ils sont très, très exposés.» Michel Platini président de l'UEFA. La télévision qatarie Al Jazeera qui dénonce tous les jours les atteintes aux droits de l'homme dans le Monde arabe et ailleurs, a démontré hier son indifférence dans la gestion des droits de l'homme au Qatar. En effet, le média arabe le plus regardé dans le monde a totalement zappé la condamnation d'un poète à 15 ans de prison pour un poème jugé critique envers le régime des Al Thani. La justice du Qatar, un pays qui a largement soutenu les soulèvements du Printemps arabe, a totalement ignoré cette information de taille, annoncée pourtant par la Cour de cassation de Doha qui a confirmé la peine de 15 ans de prison prononcée en appel contre Mohamed al-Ajmi, alias Ibn al-Dhib, (Le fils du loup) pour «un poème du jasmin» saluant le Printemps arabe et exprimant l'espoir qu'il s'étende aux monarchies du Golfe. Condamné le 29 novembre 2012 à la prison à perpétuité pour «atteinte aux symboles de l'Etat et incitation à renverser le pouvoir», le poète, arrêté en novembre 2011, avait vu sa peine réduite à 15 ans de prison en appel, en février dernier. «C'est un jugement politique et non judiciaire», a déclaré lundi dernier Me Naïmi, ancien ministre de la Justice du Qatar, déplorant que ses appels à rouvrir l'enquête pour rejuger son client n'aient pas eu de suite. Le poème posté sur YouTube avait rendu un hommage à la révolution tunisienne qui a conduit à l'effondrement du système de Zine El Abidine Ben Ali, et souhaite que le changement à d'autres pays arabes, avec des notes intenses dans le poème pouvant désigner les Etats du Golfe ou au Qatar. Le «poème du Jasmin» rend hommage à la révolution tunisienne, berceau du Printemps arabe, et félicite le chef du parti islamiste tunisien Ennahda, Rached Ghannouchi, vainqueur des élections qui ont suivi. Il exprime aussi l'espoir que le changement touchera d'autres pays arabes, dans une allusion aux monarchies du Golfe, affirmant: «Nous sommes tous la Tunisie face à une élite répressive.» Dans une référence au Qatar, qui abrite une importante base aérienne américaine, il ajoute: «J'espère que ce sera bientôt le tour des pays dont le dirigeant s'appuie sur les forces américaines.» L'avocat du poète espérait «une grâce de l'émir», cheikh Tamim ben Hamad al Thani, car son client croupit en prison depuis deux ans à l'isolement. Pendant le procès, l'avocat avait fait valoir qu'il n'y avait «aucune preuve que le poète ait prononcé en public le poème pour lequel il était jugé» et assuré que le texte avait seulement été récité «dans son appartement au Caire». Amnesty International a condamné la décision de la Cour de cassation, y voyant une «violation flagrante de la liberté d'expression», et a appelé à la «libération immédiate et sans condition» du poète, qui n'a «jamais appelé à la violence». «Il est particulièrement inquiétant de voir une tel jugement au Qatar qui s'est présenté comme un pays qui aime les arts et prétend respecter les normes internationales en matière de droits de l'homme», a affirmé l'ONG. L'émir de l'époque, cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani, qui était visé par ce poème a depuis quitté le pouvoir, après avoir abdiqué en juin en faveur de son fils, cheikh Tamim. Cette affaire vient s'ajouter à plusieurs affaires qui éclaboussent ce petit Emirat du Golfe, notamment en ce qui concerne l'esclavagisme et les atteintes aux libertés pour les coopérants étrangers et qataris. [email protected]