Nus avons été l'écouter avec son groupe à l'Institut du Monde arabe où il a donné un merveilleux concert devant un public conquis. L'occasion de présenter son album Paradoxal Project, disponible dans toutes les Fnac à Paris. Et même si l'opus en question n'est pour l'heure pas encore vendu chez nous en Algérie, il vous suffit de taper www.anisbenhallak.com et vous aurez accès à quelques-uns de ses plus beaux titres. Un album intelligent qui allie les bleus notes jazzys aux tendres sonorités maghrébines qui s'y diluent et s'accordent comme un poisson dans l'eau, en parfaite symbiose et légèreté. Le premier morceau qui ouvre l'album, est S'ayda biia, interprété par la voix chaude et légendaire de l'Orchestre national de Barbès, Mehdi Askeur. Très belle version jazzy. Suivra le morceau Clarence le bienheureux. Bluette instrumentale et sentimentale, tout en douceur et en harmonie rehaussée du son du karkabou qui lui insuffle d'un coup un autre ton, saharien, en plus qu'il était déjà, aérien. Les suaires de zenobie se présente quant à lui, comme une intro ou amuse-gueule de ce qui va suivre, car il ne fait qu'une minute 19 sur l'album. Une sorte de voile avant la tempête. Vient après en effet, le morceau qui a donné le nom de l'album, Paradoxical Project. Ce dernier s'anime sur un ton maghrebin, entraînant dans la veine jazz funk avec des touches à la sixun. Puis des envolées kabyles viennent vous prendre par la main et vous donner la pêche. Un jazz frais et bien punchy. Il est de même dans Rue Myrah. Le ton s'adoucit dans Ashbah El qods. Tout l'âme de l'album s' en ressent ici et s'y reflète tant le mariage de l'Orient et de l'Occident est habilement et savamment dosé, avec subtilité et grâce. Entre rage, élévation, mélancolie et fragilité. Il est question en effet d'un morceau chanté par une voix féminine forte qui se laisse caresser, salet doumoui men jadid entonne Sarah Layssac, chanteuse interprète et comédienne. Notons la participation remarquée sur cet album de Karim Ziad en batterie et percussions. Une belle aura que celle de ce monsieur qui enveloppe en effet tout l'album avec élégance et subtilité. Dans Nadjia, le def poursuit sa traversée lyrique sur les envolées du saxo et de la caisse de la batterie. La cour des miracles enflamme la piste avec la voix de Mehdi Askeur qui chante en arabe Ay sidi moulay. Un morceau qui rappelle un peu les humeurs caustiques d'un cheikh Sidi Bémol mais aussi les inclinaisons bien évidemment expressives du groupe ONB, dont l'artiste fait partie. Un morceau dans lequel on distingue aussi en background vocal Sarah Layssac avec une mention spéciale pour le Damien Hennicker, soprano et tenor saxophoniste qui nous a vraiment bluffés lors de ce concert. Un groove à la Maghreb and friends cher à Karim Ziad, mais pas que... De belles promesses en tout cas musicales qui prouvent que la relève est bel et bien assurée. C'est véritablement le cas sur le morceau S'miles. Au niveau du sound track, on notera également les noms de ces autres excellents musiciens du groupe à l'image de Adel Khababa à la percussion, Emrah Kaptain à la basse, Martin Milcent au piano, Romain Vignaud au drums, Jean Luc Arramy à l'acoustic bas et synthétiseur, Rim Laredj au background vocals, sans oublier les autres guests Fanny Menegoz à la flûte, Lydie Vignaud au violon et Diane Gauthier au violoncelle. Côté bio, Anis Benhallak est guitariste et compositeur. Sur scène, il a bien fait éclater son talent, en donnant le meilleur de lui-même. Cet enfant de l'est de l'Algérie (il est né dans un petit village appelé Chelghoum-Laïd) a appris la musique très jeune. Bercé par Aïssa El Djarmouni; il débutera son apprentissage par le répertoire classique algérien chaâbi et andalou, en passant par le hawzi et le malouf, et se découvre ainsi une passion prononcée pour la composition et l'improvisation, en mélangeant les genres. Cela s'en ressent dans son album. En parallèle, à cela il développe son répertoire en découvrant avec enthousiasme Miles Davis, Pat Metheny, Cannonball Adderley, Jeff Beck, Weather Report, James Brown, Jimmy Hendrix, Vivaldi, Brahms et tant d'autres... Son arrivée en France lui permit, dit-on, d'approfondir ses connaissances en jazz et fut un tournant majeur dans sa vie de musicien. Après avoir joué dans différentes formations à travers le monde, c'est à Paris qu'il décidera de s'installer et de créer son propre groupe: Paradoxical Project qui est un savant mélange entre le jazz, le rock, la funk, l'afrobeat, le classique et la musique traditionnelle algérienne. Sa musique nous emporte loin dans ses racines, tout en gardant la subtile élégance du jazz et l'énergie du rock. On a pu voir son talent se balader au rythme de ses mélodies profondes et enjouées, dans diverses scènes mondiales... Ce compositeur atypique a su créer un univers où se mêlent tradition, modernité et innovation dans une parfaite harmonie. C'est ce qu'on peut lire sur sa biographie. Une présentation qui s'est confirmée sur scène, puisque son jazz fusion a su enchanter le fort public présent à cette soirée-là, qui, bien satisfait, en redemanda encore et fut servi, allégrement!