C'est le pourrissement qui gagne le secteur de l'éducation dans la wilaya de Béjaïa, à l'instar d'autres wilayas, Tizi Ouzou et Blida, notamment touchées aussi par des mouvements de grève. Aujourd'hui, ce sont les parents d'élèves qui vont protester contre la prise en otage de leurs enfants par les incessants mouvements de grève et de protestation des enseignants. Inquiets de la tournure qu'a prise la grève illimitée du Cnapeste qui s'est déclenchée depuis le mardi dernier, en plus de la grève de 17 jours déclenchée le 23 novembre 2017, les parents interpellent les autorités locales et nationales afin de mettre fin à ce conflit qui fait des ravages sur la scolarité de leurs enfants. Cette grève du Cnapeste motivée par les ponctions opérées sur leurs salaires suite à leur mouvement de grève de 17 jours (retenue sur salaire de 11 jours seulement) conformément aux lois en vigueur et qui sont appliquées partout dans le monde, remet en cause tout ce qui est relatif au droit de grève. La grève, ce moyen de lutte arraché par de rudes épreuves sur le terrain à travers plusieurs étapes et stations de l'histoire du mouvement syndical, se banalise d'année en année et se discrédite davantage aux yeux de l'opinion publique et de la classe politique des plus engagées. La grève! Est-elle devenue une arme de destruction massive? Quelle destruction? la destruction de L'école publique, un autre grand acquis pour la population, notamment les franges les plus démunies, à travers la démocratisation de l'enseignement. La démocratisation de l'enseignement qui avait pour but de réduire les inégalités entre les élèves des différentes catégories sociales, est remise sérieusement en cause par lesdits syndicats dont l'essence même est de lutter contre les inégalités sociales afin de promouvoir la justice sociale. Qui a intérêt à détruire l'école publique aujourd'hui? L'école publique est-elle réellement un fardeau pour les pouvoirs publics au point de croire qu'ils sont les instigateurs de tous ces mouvements de déstabilisation et les concepteurs de cette machine broyeuse de notre école? Avec la grève qui gagne du terrain et devient de plus en plus généralisée et qui touche uniquement les établissements publics, les élèves de l'enseignement public commencent déjà à réclamer leur droit aux cours et crient à la hogra. Ils dénoncent le fait que les écoles dites «privées» ne sont pas touchées par ce mouvement de grève. Ces écoles privées qui, à leur avènement, ne recevaient que les élèves d'une certaine catégorie sociale ont été élargies ces dernières années aux élèves de la classe moyenne. En effet, par peur d'échec de leurs progénitures suite aux perturbations qui touchent les établissements publics, une bonne partie des parents d'élèves fait des économies «serre la ceinture» pour permettre à leurs enfants de poursuivre leur scolarité dans les écoles privées. D'autres catégories gardent leurs enfants dans l'école publique, mais optent pour des cours clandestins appelés «cours de soutien». Pourtant, les enseignants qui assurent les cours aussi bien dans le privé que dans les «cours clandestins» sont des enseignants ayant gagné une grande expérience dans le public et sont en général des grévistes. Une catégorie appelée par le pédagogue Ahmed Tessa «enseignants/commerçants». La sonnette d'alarme est tirée pour alerter contre la menace qui guette l'école publique. L'élève est la raison d'être du système éducatif. Il doit être au centre des préoccupations de la politique éducative. La mise en place d'une Charte d'éthique et de déontologie spécifique au secteur de l'Education nationale signée le 29 novembre 2015, une première dans les annales de l'école algérienne, une résolution des deux conférences nationales d'évaluation de la réforme de l'école de juillet 2014 et juillet 2015 ne semble pas influer sur le comportement de certains syndicats qui n'ont pas encore adhéré ni signé cette charte à l'instar du Cnapeste justement. Entre le droit constitutionnel des élèves à la scolarité et le droit à la grève des travailleurs, le compromis est la seule voie du salut pour sauver notre école, sérieusement menacée.