Après plusieurs rounds de discussions, des commissions et une loi inopérante, l'Algérie et la France vont s'échanger à nouveau des propositions pour examiner ce dossier toujours en suspens. Plus de 50 ans après les essais nucléaires français en Algérie, les victimes attendent toujours d'être indemnisées. En effet, la question des indemnisations constitue un des dossiers en suspens entre l'Algérie et la France, depuis de longues années déjà. Après plusieurs rounds de discussions, des commissions et une loi inopérante, l'Algérie et la France ont convenu, à la faveur de la 2e session du Comité intergouvernemental de haut niveau (Cihn), tenue en 2014, de mettre en place un groupe de travail mixte, pour échanger sur les conditions de présentation des dossiers d'indemnisation des victimes algériennes des essais nucléaires français au Sahara ou de leurs ayants droit. Hier, le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni a fait état de nouvelles propositions devant être soumises par l'Algérie à la partie française sur ce dossier. En marge d'une conférence organisée par le Musée national du moudjahid à l'occasion de la commémoration du 61ème anniversaire de la grève des Huit Jours, Tayeb Zitouni, cité par l'APS, a affirmé qu' «une réunion de la commission mixte algéro-française chargée du dossier de essais nucléaires français en Algérie est en cours de préparation, durant laquelle de propositions seront présentées à la partie française». Ces propositions concernent «l'indemnisation de collectivités et personnes victimes de ces essais ayant transmis des dossiers à la partie française, outre les indemnisations relatives à l'environnement», a-t-il indiqué, affirmant que la superficie de terres contaminées «dépasse les 100 km2». La partie algérienne «attend des propositions de la partie française avant la réunion mixte sur ce dossier», a encore précisé Tayeb Zitouni, ajoutant que la partie française «a proposé l'application de la loi Morin sur l'indemnisation de victimes de essais nucléaires, mais celle-ci n'a jamais profité aux victimes algériennes». Il y a lieu de préciser à ce propos que la loi Morin du 5 janvier 2010, relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, ne répond aucunement aux revendications algériennes quant aux droits des populations sahariennes. La loi exige des victimes d'apporter une attestation de leur résidence ou de leur séjour dans les centres militaires de Reggane et de Tan Affella, près d'In Ekker ou dans les zones qui leur sont périphériques. Mieux encore, la loi fixe même des périodes de présence limitées entre le début et la fin des expérimentations. Comme si les émanations radioactives pouvaient s'arrêter subitement à une date fixée et ne pouvaient atteindre les mêmes personnes, ayant résidé ou séjourné dans son rayon d'action, au lendemain de cette date butoir. en plus de conditionner l'indemnisation au fait d'avoir été présent lors d'un essai, la loi Morin exige que le demandeur d'une indemnisation souffre d'une maladie qu'on présume causée par l'essai. La loi dispose d'une «présomption de causalité» mais dans le même temps, elle considère que si le risque attribuable aux essais nucléaires est «négligeable», l'intéressé échappe à l'indemnisation. A préciser en dernier que la loi Morin n'évoque pas l'épineuse question des atteintes à l'environnement. Il y a lieu de noter qu'avec autant de conditions, les habitants du Sahara et les travailleurs algériens de l'époque, ainsi que leurs ayants droit n'ont pas réussi à faire accepter leurs dossiers d'indemnisation. Reste à savoir maintenant, si la commission mixte algéro-française chargée du dossier des essais nucléaires français va réussir à «arracher» les droits des victimes algériennes qui ont vécu un désastre écologique et humain, dont les effets dévastateurs vont continuer pendant plusieurs décennies encore. Faut-il rappeler que plus de 42.000 Algériens ont trouvé la mort et des milliers d'autres ont été irradiés dans 17 essais nucléaires effectués par la France entre 1960 et 1966. Il est donc à espérer que cette question va enfin trouver son épilogue. Par ailleurs et sur les les déclarations du président du Muséum français d'histoire naturelle qui a exprimé la disposition de la France à accompagner l'opération de restitution de 41 crânes de martyrs de la résistance algérienne, le ministre des Moudjahidine a assuré que la commission interministérielle qui compte des représentants de ministères des Moudjahidine et des Affaires étrangères «examine ce dossier avec la partie française». Concernant les dossiers des Archives nationales et des disparus algériens durant la Révolution nationale, le ministre a annoncé une rencontre en cours de préparation entre les parties algérienne et française, pour l'examen de dossiers en suspens. Enfin, le ministre ne va pas clôturer son intervention sans affirmer que «les messages de l'Algérie concernant les questions de la mémoire sont parvenus aux Français qui s'attellent actuellement à l'élaboration de lois à cet effet», ajoutant que «les choses vont lentement, en raison du caractère sensible de ces questions qui exigent du temps, de la patience et de la persévérance pour leur examen, mais pour la première fois dans l'histoire de l'Algérie, ces dossiers sont examinés avec transparence, clarté et audace de la part de la partie algérienne».