Cette réaction du parquet général vient après la saisine du Commandement de l'ANP, à l'origine de ces investigations. C'est officiel, le parquet général près la cour d'Alger, a annoncé, hier, l'interdiction de sortie du territoire national, à plusieurs personnes soupçonnées de corruption et de transferts illicites de capitaux vers l'étranger «conformément à l'article 11 alinéa 3 du Code des procédures pénales, le parquet général près la cour d'Alger, porte à la connaissance de l'opinion publique, que des enquêtes préliminaires sont mises en oeuvre pour des faits de corruption et de transferts illicites de capitaux vers l'étranger. Dans ce cadre et pour les nécessités des enquêtes, le procureur de la République près le tribunal de Sidi M'hamed a procédé à l'application des dispositions de l'article 36 bis 1 du Code des procédures pénales et a pris des mesures conservatoires en ordonnant l'interdiction de sortie du territoire national à l'encontre de certaines personnes», précise le communiqué L'annonce est tombée comme un couperet, et représente une réaction aux exigences et dénonciations du mouvement populaire, contre une oligarchie qui, selon lui, a mené la pays à la faillite. C'est l'ANP qui a ordonné ces investigations, soucieuse d'éviter que certains «maffieux» profitent de la confusion ambiante pour s'échapper et transférer illégalement des capitaux à l'étranger. La télévision Ennahar qui rapporte cette information, précise que la présidence de la République n'a pas été tenue informée des procédures judiciaires engagées contre certains hommes d'affaires proches d'El Mouradia. Il faut dire, en effet, que depuis l'appel du chef d'état-major de l'ANP à l'application de l'article 102 de la Constitution, devant l'émergence d'un nouveau gouvernement, et surtout devant la prise de position des magistrats et d' avocats, dans le sens de la contestation populaire, l'appareil judiciaire tente de faire montre d'une certaine indépendance, qu'il compte bien faire valoir sur le terrain. Dans ce sens, on parle déjà d'une liste d'hommes d'affaires et de personnes connus par le grand public qui seraient dans le collimateur de la justice. Il s'agit, selon les informations relayées par les réseaux sociaux et les médias privés, d'une liste comportant 10 grosses fortunes du pays, activant dans le secteur de l'automobile, de l'import-export et d'autres. Cela étant, ce n'est plus une rumeur, le président du FCE, Ali Haddad, a fait l'objet d'une arrestation au poste frontalier d'Oum Teboul, alors qu'il tentait de rejoindre la Tunisie dans la nuit du 30 mars. Par ailleurs, il va sans dire, que cette réaction du parquet général ne peut s'apparenter à une chasse aux sorcières, où tous les hommes d'affaires seraient pointés du doigt. Notamment dans une conjoncture politique délicate, où l'amalgame entre l'éveil de la justice et l'application de représailles, pourrait rapidement prêter à confusion. A cet effet, il est clair que les personnes soupçonnées et mises en examen, demeureront innocentes jusqu'à preuve du contraire. C'est la présomption d'innocence qui doit prévaloir durant ces enquêtes, afin d'éviter que l'euphorie d'une justice reconquise, ne déborde pour se transformer en règlements de comptes. Autrement dit, les dossiers et les enquêtes qui vont être ouverts contre ces personnes, doivent impérativement comporter des éléments d'accusation appuyés par des preuves tangibles, ne laissant aucun doute sur l'implication des accusés dans des dossiers de corruption ou de transferts illicites de capitaux vers l'étranger. De la même façon, les verdicts qui en découleront doivent être respectés par tous. Car, les personnes qui seront mises en examen, ont le droit de se défendre et de prouver leur innocence.Néanmoins, sur le plan de la concrétisation des revendications du mouvement populaire, il est incontestable que la détermination de l'Etat à lutter contre la corruption est passée d'effet d'annonce à une action concrète sur le terrain, en l'espace de quelques semaines.