En effet, après avoir décroché haut la main la coupe d'Afrique (la Kahloucha), vient le temps du mouton de l'Aid El Adha (El Aloucha). Si la première a stimulé émotion et nationalisme, la seconde a nourri les appréhensions des ménages, quant au prix du mouton. En effet, à quelques jours de l'Aïd El Adha, les échos qui parviennent des régions limitrophes font état d'une flambée exceptionnelle des prix du mouton. Le cas se pose également pour Annaba, ville réputée pour sa plaine à caractère agricole et spécialisée dans l'élevage du cheptel. Cette mercuriale indique qu'il n'existe aucun mouton cédé à moins de 25 000 dinars. Au souk d'El Matar (aéroport), les pères de famille qui ont sondé le souk disent ne rien comprendre et sont rentrés chez eux bredouilles. Le mouton du Sacrifice, pour l'acheter, il faut se sacrifier disait un fonctionnaire hors de lui, apparemment désolé puisque l'argent économisé ne peut suffire pour acheter la Aloucha qui signifie l'Alouche (mouton). Le cas est moindre au Souk d'El Kantera où la bourse du mouton dénote d'une certaine accessibilité des prix. Vendredi et samedi derniers les prix des moutons avaient plongé devenant presque raisonnables, avant que la frénésie du week-end ne leur redonne des ailes… Le mouton a augmenté de plus de 5 000 dinars, pourtant, il avait baissé… On n'est pas devant une discussion entre «traders» à propos des cours de la Bourse ou des prix du pétrole, mais ce sont tout simplement deux acheteurs qui parlent de… mouton! En effet, la « kebchmania » est de retour! On ne parle que de lui et on le trouve partout, dans les rues, quartiers, places et placettes… Des paturages en ville Les marchés improvisés pour la vente de ce fameux mouton de l'Aïd poussent dans chaque coin et recoin de la wilaya de Annaba. Au niveau des cités populaires, sur les bords des routes, sur certaines places publiques et même dans des garages en plein centre-ville de Annaba. Les 12 communes de Annaba se transforment en pâturages grandeur nature, où des milliers de cheptels sont exposés dans des enclos improvisés, à la faveur des acheteurs. Bien que la vente en dehors des marchés formels, soit interdite, certains revendeurs spéculateurs dits kacharra sont en contradiction avec la réglementation en vigueur, qui oblige la possession de certificats du vétérinaire, mais la frénésie du mouton, est quelque peu, stoppée par des prix qui font froid dans le dos. Un petit agneau coûte 35.000 DA et pour avoir la peau d'un animal aux proportions honorables on a été appelé à débourser pas moins de 65 000 DA. Pour ceux avec l'« option» des cornes ce n'est pas moins de 85 000 DA et ce n'est surtout pas négociable… Ils dépassaient même dans certains cas la fatidique barre des 100 000 DA! Des prix qui donnent le tournis et qui vont certainement pousser certains ménages à boycotter cet achat, ou du moins à le reporter… Mais bon, il reste quand même 10 jours pour la fête du Sacrifice, les prix vont certainement baisser. «Ce ne sont pas des prix fixes. Ils sont négociables », nous dit un maquignon du souk de la cité Seybouse. «Les deux derniers jours c'est le bonus, les, vendeurs de cheptel, venus d'autres wilayas, Djelfa, notamment doivent liquider leurs moutons, pour rentrer», a expliqué notre interlocuteur. «Mis à part les premiers jours où l'on a fait de bonnes affaires, les ventes ont commencé à baisser, avant d'être quasiment nulles au cours de cette semaine», a fait savoir un maquignon installé à El Kantera. Confirmé par un autre maquignon, à la sortie de Sidi Salem. Selon ce vendeur de moutons «d'habitude, à ce moment de l'année j'en suis déjà aux bénéfices, mais là je n'ai même pas encore couvert mon investissement. On s'appauvrit Je risque de perdre un peu d'argent...». Mais sans trop s'alarmer, le maquignon estime que la situation est retenue à l'actif d'un pouvoir d'achat très en baisse des ménages. «Les gens en tendance à s'appauvrir, c'est pourquoi, il faut savoir faire des concessions, même si c'est au détriment d'un bénéfice.» Une logique selon notre interlocuteur, issu d'un sentiment purement paternel «je suis un père de famille, et je sais ce que c'est, de ne pouvoir satisfaire le besoin de ses enfants», a expliqué le maquignon avec émotion. En attendant que d'autres maquignons aient le même sentiment, les ménages restent sous l'emprise de mercantilistes parmi les maquignons et kacharra spéculateurs. Pour d'autres pères de familles, c'est le déplacement dans les régions réputées pour leur élevage ovin et trouver le mouton presque parfait, qui allie la fameuse formule qualité-prix. Entre les uns et les autres, il y a ceux qui dénichent les bonnes affaires et ceux qui reviennent bredouilles du fait que les éleveurs de ces régions s'alignent souvent sur les prix affichés dans le reste du pays. Mais, globalement, ils n'ont pas cédé à la tentation comme durant les dernières années où ils achetaient leur mouton à n'importe quel prix, la crise économique étant passée par là. D'ailleurs, c'est cette crise qui dessine les contours de la bourse du mouton. Une bourse à l'effet de yo-yo aussi bien pour le prix du mouton que sur la frénésie, qui accompagne l'achat. Celle-ci, de par sa relativité, fixe les prix du mouton. Ces prix qui ne sont pas raisonnables par endroits et le sont dans d'autres points de vente. Jusqu'à hier, les souks à bestiaux n'ont pas désempli.