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La culture, l'altérité et l'aliénation
ELLE SE CONJUGUE AU PONCTUEL ET A L'ALEATOIRE
Publié dans L'Expression le 10 - 05 - 2007

Il est à signaler que des bibliothèques étrangères disposent de livres algériens alors que nos bibliothèques communales et universitaires en manquent.
Décidément, la culture en Algérie se conjugue depuis quelques années au ponctuel et à l'aléatoire. Après le fameux «Mois théâtral», «l'Année de l'Algérie en France», «Alger, capitale de la culture arabe 2007» n'arrive pas à décoller, avec, en sus, un budget conséquent souvent considéré comme une obole céleste permettant ces retours en arrière mettant en exergue un regard sur la réalité culturelle réduite à un assemblage de chiffres. Cette manifestation a déjà, dès ses débuts, eu raison de deux «coordinateurs», Lamine Béchichi et Kamel Bouchama, en conflit avec la ministre de la Culture.
On n'arrête pas d'exhiber les mille livres à éditer, les 45 pièces à monter, les films et autres produits, sans préalablement définir les contours d'une manifestation, consommatrice d'argent, ni expliciter la démarche pour faire de cet événement le «point de départ» d'une «révolution culturelle» pour reprendre les termes des organisateurs. Mais les choses semblent stagner, réussissant même la gageure de mettre en sourdine, certaines manifestations organisées, traditionnellement, par la Bibliothèque nationale et l'Epic «Arts et Culture» de la wilaya d'Alger, qui auraient programmé des manifestations, étrangement, gelées.
Le langage employé fait partie du champ lexical dominant les décennies 70 et 80 et semble marqué par un certain archaïsme. Ce n'est pas la tentative de récupérer le festival du cinéma amazigh ou la célébration de Yennayer, survenue essentiellement, après la marche des étudiants de l'université de Béjaïa et la réaction des «arouch» qui risquerait de déplacer la définition donnée à la «culture» arabe assimilée à l'outil linguistique. Il est donc question, sous la pression du contexte politique ambiant, de glissement lexical, on passe de «culture arabe» à «culture arabo-amazighe».
Un recul extraordinaire
Cette méconnaissance de l'espace culturel arabe travaillé par de nombreuses interventions étrangères et la présence obsédante d'arts, de formes culturelles et politiques empruntés à l'Europe, ne permet pas une définition univoque de cet ensemble, ni une approche strictement linguistique. Ce qui dénaturerait la notion de culture expurgée de deux éléments-clés: l'altérité et l'aliénation vues, non pas sous un angle péjoratif, mais plutôt comme des lieux constitutifs d'une démarche culturelle.
Le défilé préliminaire inaugurait déjà un protocole de lecture d'une manifestation ponctuelle reproduisant les mêmes failles que les différentes manifestations déjà organisées en Algérie. On se souvient des recommandations du dernier Festival national du théâtre professionnel (25 mai-2 juin 2006) insistant sur la formation, le recyclage et l'ouverture de structures culturelles. Mais aucune de ces demandes n'a été, pour le moment, prise en charge par les pouvoirs publics, ni d'ailleurs ce sacro-saint appel à la protection du fonds documentaire artistique en ouvrant un centre de recherche et de documentation artistique et littéraire.
On aura, certes, pendant une année, de nombreuses productions mais le niveau restera inchangé. N'est-il pas temps de réactiver l'idée des «1000 bibliothèques» soufflée par Mohamed Seddik Benyahia à Boumediene qui en avait fait à l'époque, mais sans résultat conséquent, son cheval de bataille? Ce serait déjà un pas si le ministère de la Culture fournissait aux bibliothèques existantes, les livres édités en Algérie par les éditeurs publics et privés. Il est à signaler que des bibliothèques étrangères disposent de livres algériens alors que nos bibliothèques communales et universitaires en manquent. Les semaines culturelles des wilayas ou des pays arabes à Alger, une entreprise extrêmement discutable, trop archaïques, sont organisées dans la précipitation. Jusqu'à présent, les directions de la culture reproduisent le même programme souvent improvisé, avec troupes folkloriques, costumes, quelques poètes et le tour est joué.
La situation de la culture en Algérie reste marquée par un extraordinaire recul et des situations anachroniques qu'aucun événement ponctuel n'a pu régler, à commencer par le Festival panafricain de 1969. Jusqu'à présent, la définition de l'espace culturel reste extrêmement traversée par d'extraordinaires ambiguïtés qui neutralisent toute possibilité de développement national. Un regard porté sur les différents textes depuis l'indépendance (programme de Tripoli, Chartes d'Alger et nationale double version, résolutions du parti unique) nous renseignerait sur l'indigence de cette représentation qui ne connut qu'une certaine lueur, lors des premières années de l'indépendance avec la manifestation de certains débats et de quelques rencontres culturelles accompagnant l'enthousiasme de l'indépendance, d'ailleurs vite émoussé par le coup d'Etat de 1965 qui allait mettre un terme à un certain bouillonnement marquant la vie nationale. Le TNA, héritant de la troupe du FLN, des jeunes formés par Cordereau, tentaient d'inédites expériences, grâce à des hommes comme Mustapha Kateb et Mohamed Boudia, notamment. D'ailleurs, le texte fondamental -et le plus cohérent- a été mis en forme durant cette période. Il s'agit du fameux décret portant nationalisation des théâtres de janvier 1963. Le cinéma commençait à faire ses premiers pas et à mettre en oeuvre ses premières structures, comme d'ailleurs les autres disciplines artistiques. L'Algérie était alors un véritable chantier où tout le monde y croyait avant qu'un vent, trop envahissant, fît ralentir beaucoup de choses. C'est ainsi que les bonnes choses meurent. Le savoir et l'intelligence étaient mis aux vestiaires, malgré quelques idées lumineuses qui n'ont pas tenues la route par ce que les gouvernements successifs accordaient fort peu d'intérêt à la chose culturelle.
Certes, dans les années soixante-dix, juste après le Fespac (Festival panafricain de la culture), quelques petites tentatives furent menées par les troupes du théâtre d'amateurs et l'Oncic qui faisait à l'époque son travail, c'est-à-dire, produire des films alors qu'au même moment, on construisait des Maisons de la culture, copie conforme des lieux culturels mis en oeuvre par Malraux en France. Cette manière de faire fut totalement improductive, dans la mesure où ces «Maisons» ne s'adaptaient pas à l'environnement ambiant. La période Chadli qui favorisa, en quelque sorte, l'organisation de festivals et de rencontres orchestrées par de chétives «organisations de masse» qui faisaient souvent dans la propagande. Mais dans les structures d'Etat, se faisaient, grâce à des hommes, souvent seuls et isolés par les décideurs, de bonnes choses. Ainsi, Alloula, Mustapha Kateb, Kateb Yacine, Hadj Omar et bien d'autres animaient la vie théâtrale. C'était aussi la période où le cinéma s'imposait grâce à Hamina, Allouache, Beloufa et Bouamari. Seuls des lieux, quelque peu protégés sont restés imprenables comme l'édition où trop peu d'oeuvres sérieuses ont vu le jour. Mais malgré cela, des textes aussi beaux que ceux de Mimouni, Ouettar, Khellas, Djaout, Bagtache et Benhaddouga ont été publiés. C'étaient, certes, quelques petits papillons, mais c'était déjà important dans un pays qui crevait dans un immobilisme et dans un conformisme paralysant. Il y avait de belles fleurs un peu partout, même si des structures, auparavant incontournables, devenaient le lieu de la médiocrité comme l'Union des écrivains algériens qui fut à ses origines un espace de savoir et d'intelligence avant de devenir un espace-satellite d'un parti. Les écrivains sont ailleurs. Ouettar crée son association «El Djahidiya» qui arrive tant bien que mal à activer dans un climat morose. Des jeunes mettent en forme «El Ikhtilef», un espace s'occupant de l'écriture. D'autres donnent naissance à de petites maisons d'édition comme «Barzakh».
Depuis les années quatre-vingts, les choses ont marqué une sérieuse pause. Les théâtres ne réussissaient même pas à produire, occupés par une nouvelle gymnastique: la masse salariale. Les comédiens, devenus fonctionnaires, abandonnaient souvent, malgré eux, leur art, pour se lancer dans d'autres aventures. La plupart des écrivains se mettaient à éditer leurs oeuvres à l'étranger. Les grands romans ou essais historiques et sociologiques étaient publiés en France ou parfois au Liban. Mimouni, Djaout, Wassini, Yasmina Khadra, même Ouettar allaient être pris en charge par des éditeurs de ces pays. Des galeries d'art, grâce à la volonté de quelques peintres, ont été ouvertes, mais vite fermées. Le cinéma battait de l'aile. Riadh El Feth sonnait comme la véritable rupture avec la société réelle, profonde. On parle, ces derniers temps, de l'organisation d'un Festival du cinéma arabe.
Après 1986, l'Algérie n'importait plus de livres. Certes, dans un passé récent, on avait organisé quelques sessions de la Foire du livre. La médiocrité battait le pavé. Les «artistes» étaient de simples fonctionnaires qui percevaient leurs mensualités. L'Algérie sombrait dans une indicible crise de pouvoir qui allait influer sur le cours des choses culturel.
Il n'est nullement possible, dans ce contexte trop peu propice à l'épanouissement culturel de l'individu, d'assister à une embellie intellectuelle et à des débats de haut niveau, d'ailleurs exclus du paysage national par des dirigeants peu soucieux de la présence de voix plurielles dans un univers ankylosé et sujet à de dangereuses violences. Les rares vrais débats que l'Algérie indépendante a organisés ont été tout simplement sabordés. On se souvient des discussions organisées en 1963-1964 par l'organe central du FLN, dirigé, à l'époque, par Mohamed Harbi, Révolution Africaine, à partir de la reprise d'un entretien accordé par Mostefa Lacheraf au mensuel de Jean Paul Sartre, Les Temps Modernes, et du débat enclenché par une interview du sociologue Abdelkader Djeghloul dans Algérie-Actualité en 1982.
Ville et campagne
Mais faut-il s'attendre à une embellie culturelle dans un contexte rurbain marqué par une autosatisfaction et un discours trop conformiste. Même les arts sont investis par cette parole double, duale. Une lecture attentive de romans d'avant et d'après l'indépendance et certains films réalisés après 1962, donnent à voir cette propension vers une célébration exagérée d'un monde rural idéalisé à l'extrême. Ce discours conservateur et peu novateur parcourt également les films réalisés en kabyle (La Montagne de Baya, Machaho et La Colline oubliée) et qui, dans un élan d'enthousiasme, peut-être sincère, font apparaître la culture populaire comme un espace d'ouverture alors qu'elle porte souvent en elle, les prémices d'une société bloquée et de mentalités parfois arriérées. Ce retour au monde rural n'est pas gratuit, il reflète l'échec d'une expérience sociale et économique. Ce thème se retrouve, indistinctement, dans les textes d'expression arabe ou française. La ville est souvent très peu décrite comme un espace libre, positif. Seul, peut-être, Merzak Bagtache s'inscrit dans cette optique d'une cité urbaine, certes, tentaculaire, mais néanmoins ouverte et généreuse; il se démarque ainsi de ce regard suicidaire porté sur une ville comme Constantine dans Ezilzel de Tahar Ouettar ou du Fils du pauvre de Mouloud Féraoun qui reproduit les clichés et les stéréotypes d'une campagne généreuse et pure, opposée à une ville sauvage et inhumaine. Feraoun, Mammeri, Doudou, Ouettar, Benhaddouga et bien d'autres écrivains, dramaturges et cinéastes mettent ainsi en situation, cette illusoire opposition entre la ville et la campagne. Le département ministériel connut de perpétuels changements sans une quelconque efficacité pratique depuis sa “libération” du ministère de l'Education nationale.
Perversion de l'Histoire, la représentation culturelle s'efface devant le discours politique, paradoxalement négateur du savoir et de la pratique culturelle. Les simulacres démocratiques restreignent mortellement le champ culturel. L'aphasie est le chemin emprunté par le politique.


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