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Le rêve éveillé
L'algérie autrement vue
Publié dans Liberté le 19 - 10 - 2010

Dans cette contribution, le Pr Toualbi regarde avec les yeux d'un rêveur l'Algérie qu'il voit comme un pays apaisé, travailleur à l'ombre d'une démocratie majeure.
“Il y a deux vérités qu'il ne faut jamais séparer en ce monde :
1. que la souveraineté réside dans le peuple ;
2. que le peuple ne doit jamais l'exercer.” Antoine de Rivarol
Tous les psychanalystes vous diront que le degré de l'activité onirique s'organise en proportion inverse du déficit émotionnel qui caractérise le quotidien vécu. L'onirisme (le rêve, pour faire simple) fonctionnerait donc comme une activité compensatoire des angoisses et frustrations de la vie quotidienne à telle enseigne que Freud lui-même définit le rêve comme la satisfaction d'un désir refoulé.
Et dans la mesure où je suis moi-même — comme tout le monde d'ailleurs — dans la permanence du refoulement, il est donc compréhensible que mon activité onirique se signale, de temps à autre, par des rêves à répétition qui ont pour fonction inavouée la satisfaction d'une variété de désirs rendus inaccessibles dans le réel. Rien d'anormal jusque-là.
Sauf que, depuis peu et, plus exactement, depuis la dernière leçon de maturité démocratique que vient de nous asséner le président sortant du Brésil (le sympathique et non moins adulé Lula), je rêve beaucoup plus et même différemment. Ne voilà-t-il pas que le politique dont habituellement je me défie, forme à présent l'essentiel des activités de mon inconscient ? Au point que dans ces rêves d'un nouveau genre, il m'arrive même de m'identifier au téméraire Martin Luther King qui avait, lui aussi, la fâcheuse manie de rêver de politique mais à voix haute : “J'ai fait un rêve”, disait-il avant de s'imaginer transformant à son gré la réalité impitoyable du monde dans lequel il vivait.
En ces temps d'anomie et de dérèglement généralisé du monde, c'est donc principalement du politique que s'alimente mon nouvel onirisme, grâce à quoi je perçois régulièrement la miséricorde inondant cette splendide terre d'Algérie. Autant dire que dans ces rêves annonciateurs de temps heureux, il n'est point de Cassandre ni de “prophètes de nos temps de détresse” (comme disait le poète Hölderlin) qui s'ingénieraient à vouloir, comme par le passé, me faire peur en prédisant pour mon pays le jour prochain de l'apocalypse. À l'opposé de ces prophètes de malheur, je rêve, au contraire, de jours particulièrement radieux pour mon pays. Et je vais dire pourquoi :
- je rêve, par exemple, d'une Algérie définitivement débarrassée de toute forme de violence. Du terrorisme sans doute, y compris dans sa forme dite “résiduelle”, mais aussi de cette violence verbale qui nous guette à chaque carrefour, à chaque coin de rue. Je vois un pays où les gens sont conviviaux, heureux d'être ensemble et où le civisme est roi. Je rêve en somme d'une Algérie apaisée et où il fait bon vivre. En corollaire :
- je vois aussi des jeunes, beaucoup de jeunes dont la plupart sont dans des écoles et universités de haut niveau académique et aimant passionnément leur pays. Ces jeunes de tout âge qui, à l'évidence, semblent collectivement portés par une formidable espérance, ne comprennent d'ailleurs pas ce qui pousse d'autres jeunes à haïr le sol qui les a vu naître jusqu'à le fuir dans des embarcations de fortune pour rejoindre, au péril de leur vie, une hypothétique terre européenne de laquelle ils sont aussitôt refoulés comme des pestiférés. À moins que ce soit en raison d'une misère existentielle à variables multiples, économique, sociale et sexuelle ? Je crois même savoir que tous ces jeunes au sort peu glorieux répondent chez eux au triste sobriquet de “harraga”, c'est-à-dire de brûleurs de frontières ! Quel gâchis pour leur pays qui se serait ainsi montré incapable d'offrir à sa jeunesse le moindre motif d'espérance !
- Et je vois surtout de l'ordre partout : sur les routes impeccables régulièrement entretenues pour faciliter la circulation des véhicules, sur les artères de nos villes lumineuses bondées de vitrines reluisantes et surtout de nombreuses librairies ; quant aux espaces culturels, ils sont tellement nombreux qu'on se croirait baignant dans le siècle des lumières tant le désir d'apprendre est partout présent. Et, a contrario de ces villes hideuses qui représentent, en de lointaines contrées, un insolent défi aux règles les plus élémentaires de l'urbanisme et de l'hygiène, les villes algériennes semblent, au contraire, participer d'une esthétique architecturale savamment réfléchie : les formes et les niveaux des habitations sont strictement réglementés ; les magasins et autres fast-foods jouxtant les habitations et “bazardisant” outrageusement les villes des pays pauvres et en mal de gouvernance sont rigoureusement interdits. Et puis, et puis, il y a enfin cette verdure à perte de vue : dans les rues des villes, sur les balcons des immeubles et, par-dessus tout, des jardins publics si nombreux et si beaux qu'ils feraient rougir d'envie celui du Luxembourg ou même Hyde Park lui-même.
Une Algérie apaisée
En cet instant précis de ma fantasmagorie, il me revient à l'esprit le mot de Paul Valéry qui a pu injustement considérer que l'ordre comme le désordre représentaient ensemble les deux grandes catastrophes qui menaçaient le monde. Il aura beau dire le Valéry, je ne partagerai jamais l'idée de cette curieuse équivalence. Le fait est que l'ordre qui règne dans mon pays me rassure : je l'apprécie dans les administrations publiques où le citoyen est reçu avec déférence, sur les routes où les gens conduisent avec tellement de prudence qu'il n'y a, pour ainsi dire, jamais d'accident. Dans les stades aussi où nos jeunes sont à ce point fair-play qu'ils ne savent même pas ce que le mot hooligan veut dire. La raison en est que notre jeunesse qui est formée dans des écoles intelligentes et dont une bonne partie s'apprête d'ailleurs à rejoindre les nombreux centres d'excellence qui font la fierté du système universitaire national, construit l'avenir, elle ne le casse pas. N'est-elle pas, de surcroît, particulièrement respectueuse de l'autorité naturelle d'un système de gouvernance qui a su, au fil du temps, tisser avec le peuple des relations de confiance exemplaires ? Les émeutes à répétition qui précédent les grandes jacqueries et le désordre ? Vous n'y pensez pas ! N'ai-je pas déjà dit que l'unique “constante” qui comptait en cette terre d'Algérie avait pour nom patriotisme et amour du pays ?
- Je rêve aussi d'une société qui, au terme d'un demi-siècle de labeur, a réussi le pari de structurer son identité collective non point sur des mythes grandiloquents, mais sur les véritables catégories de la modernité intellectuelle et sociale qui portent le monde réel. Non que cette société ait, peu ou prou, renoncé aux éléments de la tradition culturelle qui forment son creuset identitaire, mais du fait qu'elle aura réussi une œuvre essentielle de répudiation de l'ensemble des facteurs d'immobilisme qui la caractérisaient dans l'ancien temps : plus de culte de l'origine régionale ou ethnique, plus d'Arabes donc ni de Kabyles, de Chaouis ou de Mozabites, etc., mais seulement des Algériens réunis par une même passion, celle de construire une nation forte et respectée ! En contrepartie de cette unité nationale enfin édifiée, les survivances sociologiques source d'involution sociale et de corruption – je veux dire le régionalisme, le népotisme et autres atavismes - ont, comme par enchantement, disparu de la Cité en faveur d'une saine compétition entre individus et groupes animés par la même valeur : le travail.
L'algérie au travail
- Le travail justement : depuis la récession de l'économie mondiale qui a vu chuter les prix du pétrole à un niveau jamais égalé faisant ainsi perdre au pays la quasi-totalité de ses ressources financières, tous les Algériens sont aussitôt sortis de leur torpeur légendaire pour se remettre, comme un seul homme, au travail. Et puis, ne dit-on pas qu'à quelque chose malheur est bon ? Voilà donc un peuple qui fut d'abord longtemps materné par un égalitarisme de façade (socialisme spécifique disait-on) avant qu'il ne s'assoupisse durablement au son enivrant d'incantations magiques qui lui faisaient croire que, quoi qu'il fasse, le Ciel comme l'Etat - providence d'ailleurs, pourvoiraient immanquablement à l'ensemble de ses besoins. Et si, au bout du compte, le réveil fut rude, il n'empêche que depuis cette catastrophe économique, les Algériens ont pris la courageuse résolution de jeter aux orties cette culture eschatologique qui les autorisait à imputer à la volonté du Tout-Puissant l'origine de leurs propres échecs. Il faut cependant bien comprendre que tout cela n'a été rendu possible que grâce à :
- l'avènement d'un système politique authentiquement démocratique. Car il n'est plus question ici de cette démocratie de principe propre aux pays sous-développés et aux républiques bananières. Il s'agit, plus précisément, d'un mode de gouvernance éprouvé par des règles consensuelles d'accès à l'exercice du pouvoir et porté par le sacro-saint principe de l'alternance. Du reste, ce sont ces principes fondateurs de la nouvelle République algérienne qui lui permettent aujourd'hui de se suffire d'elle-même pour ne plus se sentir obligée, dans son énoncé, de rappeler qu'elle est démocratique ni populaire a fortiori. En vérité, cette République se prévaut maintenant d'un tel niveau de maturité démocratique qu'il eût été inconvenant qu'elle puisse faire dans le truisme politique.
- Un mot pour terminer mon rêve sur les mécanismes de gouvernance et de la classe politique : les ministres qui composent l'exécutif en charge de cette gestion exemplaire de la cité y sont évidemment et comme on dit triés sur le volet. Ils représentent, pour ainsi dire, l'élite de l'élite. Loin est donc ce temps où de simples relations informelles ou une prétendue assabiya (solidarité) comme l'expliquait déjà Ibn Khaldoun suffisait à mobiliser un faisceau d'allégeances pour propulser un petit cousin, copain ou coquin, fut-il un bac moins cinq, au poste de super ministre de la République. Exit les promotions ex nihilo et la gouvernance au rabais. En réalité, les Algériens qui ont depuis longtemps anticipé sur le changement du monde ont parfaitement compris que le cours de celui-ci serait désormais porté par les seules catégories de la rationalité et de la performance technologique.
Particulièrement clairvoyants, ils s'y sont donc préparés avec d'autant plus de rigueur que leur élite politique avait déjà appris à domestiquer la prospective, cette science de la prédiction de l'évolution du temps historique. Aussi bien prétendre aujourd'hui à une fonction supérieure de l'Etat requiert un niveau de qualification académique tellement élevé, qu'il indisposerait même les majors de promotion des grandes écoles polytechniques du monde industrialisé. Ce n'est donc plus un hasard si nos universités et centres de formation sont aujourd'hui les mieux classés au monde et que l'état de notre gouvernance se singularise par son caractère dit “post-moderne” !
Et tandis que le sympathique Hakim Lalâam s'astreint rituellement à “fumer du thé pour rester éveillé” j'incline volontiers, pour ma part, à rester dans mon doux sommeil pour conserver intact ce fantasme de désir ou sinon cette belle litote. Dans l'attente, pour l'heure, désabusée, du jour inévitable où ce rêve deviendra enfin réalité !
N. T.-T.
*Ecrivain - psychanalyste
[email protected]


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