À la veille de la marche devant avoir lieu à Alger, aujourd'hui samedi, la tension est extrême à Annaba où l'on redoute des débordements de rue et des scènes de violence à n'importe quel moment. Le ton était à l'insurrection en tout cas à Berrahal, notamment, une commune distante de 30 km de la ville chef-lieu, qui avait été épargnée jusqu'ici par la vague de manifestations, signalons-le, et où le pire a été évité de justesse, jeudi. Des centaines de jeunes s'étaient, en effet, regroupés dès les premières heures de la journée devant le siège de l'APC de cette localité et ont exigé d'être entendus par le P/APC sinon par le wali pour réclamer du travail et des logements en scandant des slogans hostiles au pouvoir. En l'absence du premier élu de la commune, les manifestants, des jeunes chômeurs surtout, ont entrepris d'investir les locaux administratifs de l'APC et de vérifier par eux-mêmes que les élus ne s'y cachaient pas. Après avoir chassé les employés de l'APC de leurs bureaux, les jeunes excités menaçaient de tout saccager s'il n'était pas donné suite à leurs revendications dans l'immédiat et il a fallu que des sages de la ville entrent en pourparlers avec eux pour les dissuader de passer à l'acte. D'autres habitants en colère venus en renfort ont escaladé les grilles de la bâtisse, assurant qu'ils allaient se suicider collectivement, en s'immolant par le feu. L'un d'entre eux a même incendié volontairement son véhicule personnel, une Mazda bâchée, en face du siège de l'APC en geste de désespoir. À hauteur de la RN44 qui traverse la ville, un père de famille en quête de logement a carrément bloqué la circulation automobile en s'allongeant en travers de la chaussée pendant plus d'une heure. Ce qui a donné lieu à un bouchon énorme et provoqué la colère des usagers contraints d'attendre patiemment que les services de sécurité interviennent pour libérer le trafic. La situation ne redeviendra normale que vers 14 heures dans cette partie de la ville alors qu'on signalait que des habitants des bidonvilles voisins avaient envahi la cité nouvelle des 48-Logements, située à la périphérie de Berrahal, et occupé par la force les appartements à peine achevés et non encore distribués. Les squatteurs menaçaient de faire sauter lesdits appartements au moyen de bonbonnes de gaz butane si les forces de sécurité essayaient de les en faire sortir. À Annaba, des tracts appelant les citoyens à participer à une marche programmée samedi prochain ont été interceptés par les services de sécurité de différents corps et ceux-ci ont ouvert une enquête afin de remonter jusqu'à la source des rédacteurs de ces tracts, qualifiés de “démoralisateurs” et menaçants pour la sécurité des biens et des personnes. Des sources proches de ce dossier révèlent que la mise en circulation et la distribution de ces tracts en question a débuté lundi dernier à l'université Badji-Mokhtar. Portant la mention Comité national pour le changement, initié par la Laddh et qu'a rallié le mouvement syndical autonome, ces prospectus ont été distribués dans une première phase en milieu estudiantin, plus précisément au niveau de tous les instituts et autres facultés relevant de l'université de Sidi-Amar, avant d'atterrir un peu partout à travers les cités périphériques d'Annaba. Nous apprenons qu'un autre tract a été mis en circulation mercredi. Cette fois-ci, il s'agit d'un dépliant à caractère politique, paraphé L'Espoir pour le changement. Ce document annonce pour l'occasion la naissance du “mouvement national pour l'édification et le changement”. Le conseil de sécurité de la wilaya d'Annaba a tenu, par ailleurs, une réunion afin de faire une évaluation de la situation sécuritaire.