Le rejet de la demande d'agrément du Syndicat autonome de l'enseignement secondaire et technique, le Cnapest, est révélateur d'une conception totalitaire de la vie publique : ne sont tolérés que ceux qui se soumettent au code de la secte. Et le CLA et le Cnapest, en initiant, de manière affranchie, un mouvement de revendication résolu, ne donnent pas de gage d'une disponibilité pour ce syndicalisme de l'arrangement qui caractérisait spécialement le secteur de l'enseignement public. Dans la culture du syndicat unique, l'organisation sociale est conçue comme un appareil de maîtrise des catégories laborieuses toujours portées à revendiquer la valorisation de leur travail. L'UGTA, en tant qu'organisation de masse, avait cette mission de donner l'illusion aux travailleurs que leurs intérêts sont défendus. Bien sûr, quelques théâtrales entreprises sont, à l'occasion, programmées et menées dans le seul but de justifier le monopole de représentation de la peine du monde du travail. Cette fonction de soupape est utilisée pour anticiper et enrayer les demandes des employés qui risquent parfois de se muer en mouvements de contestation. C'est à ce prix que la caste du syndicalisme officiel se donne le droit de souscrire à la rente nationale que se partagent les membres du système et leurs associés. La direction de l'UGTA manque de crédit quand elle jette le soupçon sur le Cnapest de jouir d'une base islamiste. Elle devrait alors répondre à la question de sa passivité devant une islamisation soutenue du personnel enseignant, des programmes et méthodes surtout, qu'elle couvre allègrement depuis des décennies. L'argument politique cache mal le dessein politique de défendre sa prépondérance sur la vie sociale à l'effet de perpétuer le système de répartition actuelle de la rente entre pouvoir politique et contremaîtres politiques. Cette démarche correspond tout à fait à la vision que le régime se fait encore, comme au temps du parti unique, de l'ordre social : la société civile ne doit être représentée que par des courtiers, intermédiaires fantoches cooptés qui maîtrisent la logique du système et qui s'y soumettent. La vie publique elle-même n'en est plus que comédie de comparses. C'est cette logique : le ministère de l'Education tient autant à la FNTE-UGTA que la FNTE tient au ministère. Le partenariat social y est conçu comme un négoce. La Fonction publique est devenue un enjeu pour les syndicalistes professionnels parce que c'est, avec le démantèlement bientôt achevé de l'appareil économique de l'Etat, la dernière réserve de prédation. Ce qui explique qu'un syndicat prenne en charge l'offensive contre d'autres syndicats, que sur la question des libertés syndicales, UGTA et gouvernement se retrouvent sur le même front. C'est un fait de système, que les attitudes circonstancielles et affectées ne peuvent pas dissimuler, que Ouyahia et Sidi Saïd ont le même combat. M. H.