Rebaïne a été obligé d'annuler son meeting à Souk-Ahras, faute de public... Il accuse l'administration d'avoir fait pression sur les citoyens pour les empêcher de venir l'écouter. Tous les lièvres subissent le syndrome de la salle vide. Rassurons-les : il n'y a pas que les lièvres qui sont boudés par la population. À Sétif, Amar Saâdani a prononcé un discours de neuf minutes, faute d'auditeurs ; à Constantine, Belkhadem a fait rabattre les supporters du CSC venus là pour soutenir leur club contre une équipe ivoirienne, avant de se faire chahuter par des adolescents entonnant les chants "clubistes" pendant son discours. Pour qui s'est essayé à l'activité politique, il est connu qu'un candidat ou ses représentants ne s'aventurent qu'en terrain où ils se sont assuré un minimum d'auditoire. L'on ne devrait donc pas assister à ces flops quotidiens qui font de la campagne électorale une affaire intime du microcosme politique et médiatique. C'est là, Monsieur Rebaïne, la seule bonne nouvelle de cette campagne : malgré les vingt-quatre milliards de dinars du budget de l'Etat dédiés à la campagne électorale et en dépit des contributions de sponsoring politique des membres du FCE, la campagne pour le quatrième mandat se transforme en monologue. En six monologues, le sixième étant un orateur collectif. Puisque le choix du pouvoir a été d'assumer le ridicule d'un processus électoral au bénéfice d'un candidat qui ne peut même pas s'adresser à ses électeurs, il faut comprendre que les Algériens ne s'intéressent plus aux cérémonials qui entourent l'opération de renouvellement de mandat. Sinon au côté cocasse de l'entreprise. Il suffit de visionner la vidéo de cette équipée de harragas abordant les côtes espagnoles, en pleine campagne électorale, pour se rendre compte du gap entre les préoccupations de la jeunesse et les soucis de pouvoir de ses dirigeants. "Gardez votre quatrième mandat !" s'écrient-ils, dans un rire qui en dit long sur la crédibilité qu'ils accordent à la comédie des politiques. Il est vrai que les "concurrents" du candidat du pouvoir sont là pour donner de la vraisemblance à une parade dont l'issue est programmée et connue de tous. Et, il est normal qu'ils s'offusquent du fait que les conditions ne soient pas réunies à leur endroit pour assurer quelque réalisme à leur rôle. Mais, peut-on douter, à ce point, de la capacité de discernement des citoyens pour s'étonner que, dans un tel contexte, ceux-ci désertent les meetings de campagne ? Au contraire, il faudrait peut-être se féliciter que le peuple manifeste des signes de lucidité ! D'autant plus que cette conscience s'exprime non pas dans un langage brutal, mais sous une forme souvent facétieuse, comme en témoigne la vie virtuelle désopilante qui, à travers les réseaux sociaux, accompagne cette croisière solitaire des candidats. C'est, probablement, parce qu'il a anticipé la difficulté de mobiliser des figurants pour une campagne sans objet — le résultat étant préétabli — que le pouvoir a choisi des lièvres de carrière pour figurer la concurrence de son candidat. Il est tout de même significatif que tous ces "concurrents" convergent sur un thème de prédilection : l'utilité de voter. C'est à peine s'ils distillent, pour faire vrai, et, par bribes, quelques éléments de programme. Courage ! Plus que deux semaines à tirer ! M. H. [email protected] Nom Adresse email