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"Le gouvernement n'a aucune vision économique"
Omar Aktouf, professeur titulaire à HEC Montréal
Publié dans Liberté le 26 - 07 - 2015

Omar Aktouf, professeur titulaire à HEC Montréal, décortique les dernières décisions économiques du gouvernement, dont il remet en cause les choix libéraux qui, selon l'économiste, ne sont pas la solution.
Bien au contraire. Il s'explique.
Liberté : Le gouvernement s'apprête à adopter une loi de finances complémentaire (LFC 2015). Quelle lecture faites-vous de la généralisation de ce procédé censé être une exception ?
Omar Aktouf : La multiplication de ce genre de législations censées définir et stabiliser sur la durée, ce à quoi doivent s'attendre les opérateurs économiques en matière d'obligations, démarches, n'est qu'un signe supplémentaire de ce que nos gouvernants naviguent à vue, sans aucune cohérence de "doctrine économique", ni vision. C'est de l'improvisation permanente, du cosmétique, au lieu d'être du fondamental, du bricolage politique sans direction — sinon sans doute les intérêts de court terme des factions. Pour paraphraser un certain Charles de Gaulle, je dirais que nos décideurs font de la politique "qui flotte sur l'évènement, comme le bouchon flotte sur la vague". C'est là le résultat d'un vide total en matière de vision économique. Ce qui en tient lieu, c'est une religion, un dogme, assis sur les chimères du "Dieu Marché" néolibéral, qui impose la "non-vision" : "laisser faire" et compter sur la régulation magique de la main invisible. Laisser "le bouchon flotter" au hasard.
Dans cette LFC, le gouvernement a songé pour une fois à la suppression de certaines subventions, comme celle du carburant. Cette option peut-elle constituer une panacée pour réduire les dépenses publiques ?
Encore des mesures néolibérales aveugles et de facilité politique ! Il ne s'agit pas de réduire les dépenses de l'Etat, il s'agit d'en hausser les revenus en allant chercher l'argent là où on sait qu'il est. Mais cela implique de sortir de l'ornière néolibérale et oser autrement. Comme la Suède dont près de 60% du PNB provient de l'impôt, ou l'Islande qui, après 2008, a étatisé le système financier du pays. Ils s'en portent très bien. Ces actes "d'austérité" qu'adopte notre pays n'ont que trop montré les dégâts qu'ils peuvent causer, particulièrement en Europe, otage d'un fanatisme néolibéral qui ne profite qu'aux banques et aux multinationales. Notre pays se classe, pour les fortunes privées (connues), parmi ceux qui en possèdent les plus grosses d'Afrique et du monde. Cela donne une idée de l'ampleur des "pertes de revenus" pour l'Etat et de l'immensité des inégalités. Ce qui se passe en Grèce devrait nous éclairer et nous faire radicalement changer de cap.
Il y a encore des résistances au sein même du pouvoir sur l'obligation d'instaurer le chèque dans les transactions supérieures à 1 million de dinars. Cette clause, entrée en vigueur depuis le 1er juillet, a-t-elle quelque chance de réussir ?
Encore du colmatage cosmétique ! Et comment s'étonner qu'il y ait "division" au sein des clans dirigeants à ce sujet ? Combien parmi eux désirent voir sortir au grand jour ce qui se faisait en catimini ? Une telle mesure réduira, certes, quelque peu, les traficotages en argent sale et en "économie souterraine", mais a-t-on mesuré l'impact en "embouteillages" au niveau des banques, si vraiment toutes les transactions de ce niveau se faisaient soudainement par chèques, d'un côté, et de l'autre, l'effet inverse qu'elle provoquera : de nouvelles façons de cacher l'argent, le faire "laver" ?
La chute des prix des hydrocarbures a impacté les recettes publiques, du fait que l'économie algérienne dépend presque exclusivement de l'exportation du pétrole et du gaz. Pourquoi, à votre avis, l'Algérie a-t-elle de la peine à diversifier son économie ?
Les pouvoirs successifs n'ont jamais eu la volonté "ferme" de diversifier l'économie, trop contents de s'appuyer sur la manne des hydrocarbures : on pompe, on vend, on importe, on achète la paix sociale, on se gave et on continue. J'ai vu un embryon d'une telle volonté à une période de l'époque dite "Boumediene". Lorsque notre pays faisait ce que font les pays émergents : des politiques de développement autocentré. C'est-à-dire, compter sur ses propres ressources en les développant : formation d'ouvriers, techniciens, cadres tous azimuts ; installation de capacités de production ; supervision étatique des infrastructures et moyens d'équipement ; lancement de plans par priorités sectorielles ; contrôle des secteurs stratégiques ; élimination des dépendances extérieures. Mesures s'accompagnant de l'implication (Corée, Malaisie, Chine) d'un secteur privé poussé à être "patriotique" et intraverti. Boumediene et ses technocrates furent vite dépassés par les gangrènes qui commencèrent à ronger le pays : népotisme, clanisme, ascension des incompétents, corruption.
La politique d'austérité, même si le gouvernement se refuse à admettre cette réalité, peut-elle constituer une solution en dehors d'une politique de diversification de l'économie ?
Absolument pas ! Il suffit de regarder l'Europe et voir ce que près de huit ans de ce genre de "remède" a donné. Toute politique de diversification a déjà été handicapée, annihilée depuis longtemps par l'abandon des mesures "d'auto-centrage", puis par l'effet des diktats néolibéraux, le bradage de l'économie aux mains d'"élites" vendues au chant néolibéral-néocolonialiste et ses refrains : "libre marché", "déclin de l'Etat", "privatisations", "coupures". Diversification annihilée, également, par le recours à des experts dont la compétence est à l'aune de leur vassalité vis-à-vis du modèle américain. Armes de destruction massive en tête : MBA et autres DBA (Doctorate in Business Administration, invention académique US destinée à renforcer, par titre ronflant interposé, la fabrication de la doctrine du "comment plaire aux classes riches" que l'on dénomme "management"). On en voit les résultats aujourd'hui. Et les gros freins à la diversification : d'abord, il est trop tard pour lancer un développement autocentré, et ensuite, trop facile de continuer la stratégie de rente et de captage des retombées de la rente.
La règle 51/49 est contestée par les partenaires étrangers qui jugent le pays moins attractif pour les IDE (investissements directs étrangers).
Partagez-vous ce constat ?
Evidemment non. La moindre des choses est que l'on soit un minimalement maître chez soi. Descendre plus bas que ce 51/49 reviendrait à brader le pays aux mains de pilleurs que l'on dénomme IDE. Ce "jugement" des investisseurs étrangers n'est que chantage, et y céder, c'est tuer toute possibilité de développement autocentré.
Au-delà de ces aspects somme toute techniques, comment l'Algérie peut-elle surmonter les problèmes structurels de son économie ?
Ces problèmes sont autant techniques que politiques, écologiques, sociaux... Mais, c'est le propre de ces doctrines (surtout de type US) de laisser croire que tout doit être résolu par des "techniques". Et que tout ce qui est philosophie sociale, écologie, économie politique, projets de sociétés n'est qu'inutiles balivernes. C'est la mission des écoles de MBA et DBA qu'on multiplie comme des champignons : mathématiser, techniciser et tout réduire en service au money making. La nature devient "stocks", la société "marché d'employables", l'humain "ressource", etc. Surmonter les problèmes structurels de notre économie doit passer par une radicale rupture avec le néolibéralisme, comme la Malaisie de Mahathir qui se plaisait à répéter : "Look East !" ou "regarder vers l'Est" (modèles nippon, coréen...). Il nous faut comprendre que ce qui est à la base de la crise structurelle de l'Occident du capitalisme financier, c'est que nul ne songe à couper dans les indécents "salaires", "bonus", "parachutes", que s'octroient (via les cercles mafieux que l'on dénomme Conseils d'administration) les patrons et gros actionnaires. Alors que c'est là que les Etats iraient chercher "économies" et sources d'équilibres budgétaires. La raison en est simple : les vrais décideurs se trouvent dans les banques et dans les CA des CAC-40 (40 plus grosses firmes de France) de ce monde (soit dit en passant, ce CAC-40 ne paie en moyenne que 8% de ses revenus au fisc français, alors que n'importe quel ouvrier est taxé à 50% ou plus).
Une dernière question, si vous permettez M. Aktouf. Quelle analyse faites-vous du dernier rapport sur les perspectives économiques 2015 en Afrique du Nord de la Banque africaine de développement (BAD) qui lie la croissance en dents de scie des économies locales aux retombées du Printemps arabe qui "se font toujours sentir" ?
Il y aurait déjà tellement à dire sur ces fameux Printemps arabes... Mais, qu'est-ce que la BAD ? C'est une officine de plus où règne le néolibéralisme. Ensuite, je me demande si les cadres de cette officine lisent les rapports d'autres officines, non moins néolibérales, comme l'OCDE, l'ONU, la Cnuced, qui disent par exemple (organes de presse de débuts juillet 2015) : "Si la population mondiale avait le niveau de vie du Canada, il nous faudrait les ressources de trois planètes !" Cela, c'est ce que crient des Jacquard, des Amin, des Dumont, votre serviteur... depuis des décennies : aucune "théorie du rattrapage" ne saurait tenir la route. Pour que les pays non développés entrent en croissance soutenue (rapport du Club de Rome de 1972, déjà), il faut que les pays nantis entrent en décroissance tout aussi soutenue.
Ce genre d'analyses de la BAD reste fortement néolibéral et fait comme si l'Afrique, l'Inde, l'Amérique latine pouvaient "rattraper" l'Europe et les Etats-Unis en se partageant une petite fraction de ressources de base indispensables pour tout développement, comme le pétrole, l'acier, le cuivre, le fer, etc.
Prenons juste le pétrole : les Etats-Unis, à eux seuls, accaparent quotidiennement environ 30% de la production mondiale, et si nous y ajoutons la Chine et l'Europe, nous frôlerons les 70% ou plus. Avec quelles quantités restantes de (seulement) pétrole vont donc pouvoir construire leur développement ou "rattrapage" tous les autres pays de notre monde ?
Y. A.


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