Il y a un prix aujourd'hui qui fait chavirer. Celui des amandes vendues à 2 200 DA le kilo, les noix classiques et de cajou, les pistaches, de 3 500 à 4 800 DA. À quelques jours de la célébration de l'Aïd, les ménages oranais constatent que la saignée de leur porte-monnaie leur est imposée jusqu'au bout avec, comme ultime épreuve, l'incontournable tradition des gâteaux à offrir et à présenter lors des visites familiales. C'est une manière de faire bonne figure que de présenter des plateaux de gâteaux bien fournis et variés. En effet, tradition des rapports sociaux teintés de nostalgie oblige, il faut désormais rivaliser dans la présentation, l'originalité, surtout lorsqu'elle vient de destinations exotiques. Les habituels maqrout, griouech, tcharak ou encore ghribia côtoient des gâteaux qui se déclinent en tartelettes avec Nutella ou crème, des rochers aux fruits secs, à la noix de coco, d'autres à base de pistache, très prisés dans des pays comme la Jordanie, la Syrie, la Turquie. L'installation dans la ville d'Oran de communautés syrienne et turque apporte cette touche de nouveauté à découvrir quand on veut épater pour les gâteaux de l'Aïd. Mais quelle que soit la motivation, il y a un prix aujourd'hui qui fait chavirer avec des amandes vendues à 2200 DA/kg. Pour les noix classiques et de cajou ou les pistaches, il vous faut débourser de 3500 à 4800 DA pour un petit kilogramme. Restent les cacahuètes qui sont les plus abordables à 300 DA. "C'est devenu trop cher pour préparer les gâteaux, surtout ceux aux amandes, je me contente de petites quantités et encore ! Heureusement que j'avais acheté ce qu'il fallait avant le Ramadhan", explique Nora, une mère au foyer, dont le mari est un simple fonctionnaire. Economiquement pour elle, la tradition sera stricte avec des gâteaux où il y a peu de fruits secs. Une fois cette question de coût épuisée, car il y a tous les à-côtés et ingrédients à prendre en compte, un petit calcul est fait ces dernières années par les mères de famille. À la vente, les gâteaux de l'Aïd rivalisent de plus en plus dans la société, devenant un véritable business pour petite autoentreprise. Et la clientèle ne cesse de grandir d'année en année, les commandes se faisant avant même le début du Ramadhan. Et il ne faut pas s'imaginer que l'achat des gâteaux est du seul ressort des femmes actives, puisque les femmes au foyer sont aussi de plus en plus nombreuses à opter pour la commande. Naïma, qui s'est lancée en famille dans la confection de gâteaux à l'année avec une petite boutique de quartier, doit même recruter du personnel durant le mois sacré. "Aujourd'hui, faire des gâteaux demande du temps et c'est cher. Même si la femme est à la maison, elle fait son petit calcul !", avouant avoir des fidèles clientes qui font des commandes dépassant largement les 10 000 DA. Et pourtant notre interlocutrice jure que celles-ci s'en sortent bien avec ses prix affichés : griouech, maqrout à 300, 400 DA le kilo, des tartelettes avec divers ingrédients à 75 DA la pièce. Si vous allez dans la gamme gâteaux avec fruits secs et originalité, pour une pièce il en sera de 70 DA et jusqu'à 100 DA. Ce phénomène a aussi créé une économie et une activité lucrative, qu'il est quasi impossible à quantifier, mais qui a su s'adapter et surfer sur les évolutions de la société. En parlant de surfer, il faut voir et prendre la mesure de cet autre phénomène des réseaux sociaux qui contaminent de plus en plus de monde dans les maisons, y compris nos grands-mères. Les bonnes vieilles émissions culinaires de la télé algérienne sont ainsi battues par l'univers des pages et autres groupes ou, d'un seul clic, les fans de pâtisseries en tout genre peuvent trouver leur bonheur. Désormais, dans la cuisine, trônent sur la table les tablettes et les smartphones pour consulter ou suivre les posts dans certaines pages et groupes dédiés à la cuisine et aux gâteaux. Qui plus est, des femmes jeunes et moins jeunes s'immergent totalement dans le monde de la gastronomie en général et dans la présentation de recettes de gâteaux. Conseils, astuces avec vidéos et photos défilent sur les réseaux sociaux. Certaines n'hésitent pas à annoncer que pour celles et ceux qui sont intéressés, il est possible de passer commande en "msg privé". D'autres voient leur réputation sur les réseaux sociaux dépasser les frontières, devenant des vedettes de la gastronomie avec des centaines de membres abonnés. D. LOUKIL