Les dividendes de l'adhésion de l'Algérie aux nouvelles "Routes de la soie" se limitent aux crédits pour le financement des grands projets d'infrastructures. Le Cercle d'action et de réflexion autour de l'entreprise (Care) a organisé, mercredi dernier à Alger, une rencontre sur le projet chinois "des Routes de la soie". L'objectif étant de vulgariser un thème d'une importance majeure, mais il ne semble pas susciter auprès de l'opinion publique l'attention qu'il mérite, à la mesure des enjeux qu'il représente. Que peut escompter l'Algérie comme dividendes de son adhésion à cette initiative chinoise ? Care relève que la croissance rapide des échanges commerciaux entre les deux pays s'est accompagnée d'un déficit commercial de l'Algérie de plus en plus élevé. La Chine, qui était le 12e fournisseur de l'Algérie en 2001, s'est hissée, à partir de 2013, à la 1re place. En revanche, elle n'occupe en 2017 que la 14e place en tant que client de l'Algérie. Alors que les importations algériennes de Chine enregistraient une croissance extrêmement rapide (environ 15% entre 2001 et 2016), les exportations algériennes n'arrivent pas à suivre le même mouvement. La baisse en valeur des exportations algériennes vers la Chine s'est accompagnée d'une chute régulière et sensible des quantités d'hydrocarbures exportées. La part de marché des hydrocarbures algériens sur le marché chinois, déjà marginale, va évoluer en sens inverse, passant ainsi de 0,49% à 0,18% entre 2001 et 2016. Pour Care, les réponses à apporter à ce déficit commercial de plus en plus lourd et de plus en plus insoutenable sont à considérer, très certainement, parmi les défis de la coopération économique bilatérale entre l'Algérie et la Chine, au cours des dix ou vingt prochaines années. En tout état de cause, estime le think tank, c'est dans ce contexte économique que l'attitude algérienne face au projet chinois des "Routes de la soie" va devoir être déterminée au cours des prochaines années. Jusque-là, l'Algérie et la Chine étaient liées par un accord de "partenariat stratégique global" signé en 2014 par les deux présidents et dont la mise en œuvre est organisée à travers un plan quinquennal couvrant la période 2014-2018, que les deux parties semblent vouloir renouveler pour la période 2019-2023. Le contenu du premier plan quinquennal 2014-2018, de même que le bilan de sa réalisation n'a donné lieu jusqu'ici qu'à une communication par trop parcimonieuse, en dehors du projet, formellement approuvé par un Conseil des ministres, de construction d'un port en eau profonde à Cherchell pour un montant de 3,3 milliards de dollars, avec à l'appui un financement conséquent de la partie chinoise. Les autorités algériennes ont également évoqué un autre projet structurant, estimé à 6 milliards de dollars, portant sur le développement et l'exploitation de gisements de phosphate dans la région de Tébessa et dont la négociation est en cours de finalisation entre les deux parties. En plus de ces deux gros projets, on peut citer, également, des partenariats conclus entre des entreprises chinoises et des entreprises publiques algériennes dans des filières telles que les véhicules utilitaires, les mines et carrières et l'électronique. Mais pour Care, l'adhésion officielle de l'Algérie au projet BRI (Belt & Road initiative) lui offre l'occasion de bénéficier des opportunités de financement d'infrastructures stratégiques, qui sont clairement ouvertes aujourd'hui par l'initiative chinoise. La disponibilité de crédits importants que la Chine entend mettre à disposition des projets retenus au titre du projet BRI offre une opportunité qu'il serait approprié de saisir. Mais, comme l'a souligné l'expert Mouloud Hedir, "si l'offre chinoise est attrayante et ouvre de réelles perspectives, elle est en revanche redoutable parce qu'elle questionne sur l'efficience du financement de ses investissements". Du coup, une réflexion urgente s'impose quant aux conditions à réunir et à la conduite à tenir pour gérer au mieux le pacte d'adhésion à ces "Routes de la soie". Meziane Rabhi