Il s'est rendu aux musées Abane-Ramdane et Krim-Belkacem. Le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, qui s'est rendu, jeudi dernier, à Tizi Ouzou où il a visité les demeures, transformées en musées, des deux héros de la révolution algérienne, Abane Ramdane, à Azouza, et Krim Belkacem, à Iallalen, a dû assurément s'être inspiré du "génie" déployé par le ministre de la Culture dans l'affaire de la transformation du statut de la demeure de Matoub Lounès, cet autre symbole de la Kabylie, pour ainsi reproduire sa démarche qui consiste à faire main basse sur la mémoire d'un géant à moindre coût. En effet, lors de son déplacement dans la région, le ministre des Moudjahidine a annoncé, en présence des proches des deux héros de la révolution, l'annexion de leurs demeures au musée du Moudjahid, donc à son département, en contrepartie d'enveloppes financières destinées à prendre en charge quelques travaux nécessaires à leur réhabilitation et leur restauration. La véritable contrepartie, qui devrait commencer par le rétablissement de la vérité sur leur assassinat, a été, quant à elle, royalement occultée par le ministre, exactement à la manière du ministre de la Culture lorsqu'il s'agissait de transformer la demeure de Matoub Lounès en musée, donc en bien de l'Etat, sans sentir la moindre contrainte de devoir souffler mot sur son assassinat, resté à ce jour impuni. Tayeb Zitouni qui n'ignorait sans doute pas qu'il allait être confronté à des questions relatives à la vérité sur l'assassinat politique de ces deux chefs historiques de la révolution, dès lors qu'il a décidé de franchir le seuil de leurs anciennes demeures, n'a pas manqué, pour éviter les questions qui fâchent, de prendre ses précautions en méprisant la presse et en refusant de s'adresser à ses représentants, à l'exception bien sûr de la chaîne gouvernementale pour les besoins de l'opération de communication. Les quelques propos que le ministre a fini par consentir à lâcher devant quelques journalistes qui n'ont pas cessé de le harceler ont porté essentiellement sur les dossiers qui constituent le contentieux mémoriel avec l'Etat français, à savoir les archives de la révolution qui se trouvent en France, l'indemnisation des victimes des essais nucléaires, le dossier des disparus pendant et avant la révolution et encore celui des crânes des résistants algériens se trouvant dans un musée de l'ancien colonisateur. "Concernant le dossier des crânes, nous sommes actuellement à la deuxième étape qui consiste en l'installation d'une commission technique composée d'experts algériens qui se sont d'ailleurs déplacés à deux reprises pour identifier les crânes qui sont, selon la délégation, au nombre de 31. Une troisième étape sera franchie dans les prochains jours avec un travail de précision dans l'identification de ces crânes avant d'entamer la dernière étape qui consiste en leur récupération. Le dossier est très sensible pour les deux parties, et c'est pour cela que l'opération avance lentement mais sûrement", a-t-il expliqué, ajoutant, concernant les archives de la révolution, que "plusieurs rencontres ont eu lieu entre la partie algérienne et la partie française. Selon l'ancien ministre des Anciens combattants il y a 475 km d'archives de la révolution détenus en France". "Bientôt on recevra les premières copies originales. L'opération n'est pas facile, elle est très sensible et nécessite beaucoup de temps et d'experts, donc de la patience et de la persévérance", a-t-il encore ajouté. Concernant les moudjahidine non encore reconnus comme tels, le ministre a expliqué qu'après la dissolution de la commission en 2002, la reconnaissance ne relève pas du ministère des Moudjahidine mais de l'Organisation nationale des moudjahidine. Lors de son discours devant la famille révolutionnaire, Tayeb Zitouni s'est attelé à défendre le bilan de Bouteflika et plaider, dans la langue de bois, la continuité. Samir LESLOUS