"Si les pouvoirs publics veulent nous laisser mourir sans pouvoir nous soigner, qu'ils le disent clairement et qu'ils cessent de nous faire miroiter monts et merveilles", pestent les protestataires. Le mouvement associatif de la commune d'Ath Laqser, sise à 35 kilomètres à l'est de Bouira, a organisé, hier, une opération "ville morte", afin de protester contre le blocage du projet de réalisation d'une polytechnique au niveau de leur municipalité. En effet, la plupart des commerçants ont baissé rideau, les établissements scolaires ont été désertés par les élèves et les administrations tournaient au ralenti, a-t-on pu constater sur les lieux. Cette commune de plus de 18 000 habitants avait des allures de ville fantôme. Lors d'un rassemblement organisé devant le siège de l'APC, les initiateurs de ce mouvement de protestation, à leur tête Yahia Semmache, président dudit mouvement, a expliqué les raisons qui ont poussé la population à adopter une telle action. "Nous avons assez des fausse promesses des pouvoirs publics. On veut des explications quant au sort de ce projet qui traîne en longueur depuis neuf ans", a-t-il déclaré. Pour lui, cette grève générale est le seul et unique moyen de se faire entendre de la part des autorités, normalement la Direction de la santé publique (DSP). Selon le leader de ce mouvement de contestation, le projet en question remonte à 2010 lequel a été inscrit par les autorités de l'époque et une enveloppe budgétaire estimée à 130 millions de dinars avait été allouée pour sa réalisation. "Depuis, ce projet est devenu une chimère tant les blocages, arrêts et autres gels, s'y sont greffés (...) Aujourd'hui, on exige une solution concrète et un engagement signé", a-t-il soutenu. Pour d'autres contestataires, la situation sanitaire qui prévaut au niveau de leur municipalité est, selon leurs dires, catastrophique. "Autant qu'on le sache, l'accès aux soins est un droit inscrit dans la Constitution et non un privilège", soulignent nombre de citoyens qui se sont amassés devant le parvis de la mairie. "Si les pouvoirs publics veulent nous laisser mourir sans pouvoir nous soigner, qu'ils le disent clairement et qu'ils cessent de nous faire miroiter monts et merveilles", assènera M. Semmache. Pourtant et à titre de rappel, en novembre 2016, l'ex-ministre de la Santé et la Réforme hospitalière, Abdelmalek Boudiaf, avait annoncé en grande pompe que le projet allait être dégelé. Une annonce qui a eu pour seul effet de calmer la grogne populaire, mais sans grand résultat sur le terrain. Ce n'est qu'au printemps 2018, que l'actuelle directrice de la santé de Bouira avait déterré ce projet en annonçant en pleine séance de l'Assemblée populaire de wilaya (APW) que les travaux de cette polyclinique allaient "bientôt" redémarrer. Une année plus tard, aucun progrès n'a été constaté sur le terrain, ce qui a eu pour effet de raviver la colère des citoyens. Par ailleurs et selon le wali de Bouira, qui s'est exprimé sur le sujet, une commission d'enquête a été dépêchée par le département de Hesbellaoui afin de déterminer les causes des retards enregistrés dans la réalisation des structures de santé à Bouira, dont cette polyclinique. À titre indicatif, trois projets d'hôpitaux, à savoir celui de 120 lits à M'chedallah, 80 lits à Bordj Okhris et un autre de 120 lits à Aïn Bessam, accumulent des retards de trois à sept ans. Dans le même sillage, le groupe RCD à l'APW de Bouira, via un communiqué transmis à la presse, a apporté son soutien aux manifestants, tout en dénonçant un "système de malade de l'irresponsabilité du pouvoir et sa vacance", tranchent-ils, tout en soulignant que la problématique de la fuite des médecins spécialisés est toujours d'actualité à Bouira, au même titre que la défaillance des scanners au niveau des EPH de Bouira et Lakhdaria. "Notre groupe exige des responsables locaux la garantie d'accès de tous et partout à la santé, la veille permanente sur le bon fonctionnement de toutes les structures de santé publique et le déblocage de l'ensemble des projets", exhortent-ils. RAMDANE BOURAHLA