Les hommes de loi estiment qu'il est impossible d'organiser une élection présidentielle, dans les conditions actuelles, avec des instruments juridiques obsolètes et surtout des responsables d'institutions stratégiques, rejetés par la rue. La grève du barreau à laquelle a appelé l'Union nationale des bâtonnats, a été massivement suivie, hier à Alger. Au tribunal de Sidi M'hamed, toutes les audiences, programmées en matinée, ont été reportées. "Il y a eu un accord avec le parquet général pour ne mettre en examen que les affaires en dernier délai", a indiqué une avocate rencontrée dans la salle des pas perdus. Le mouvement des robes noires durera quatre jours ouvrables, c'est-à-dire jusqu'à lundi 25 avril inclus. "Le mot d'ordre de grève a été respecté par l'ensemble des avocats. C'est une réaction au refus de prendre en considération les propositions de l'Union des bâtonnats", a expliqué Me Allague. Dans le rassemblement observé hier matin sur le parvis de la cour d'Alger, les avocats ont exposé, pour la énième fois, l'issue qu'ils préconisent pour la crise politique en cours. Ils ont demandé aux autorités nationales d'être à l'écoute du peuple et de trouver les solutions qui lui conviennent. Concrètement, ils ont proposé la mise en branle d'une "période de transition conduite par des personnalités consensuelles et acceptées par le peuple". Les hommes de loi pensent, majoritairement, que les mesures et les décisions, prises jusqu'alors par les représentants visibles du régime, vont à contre-courant des revendications des Algériens. Ils estiment, aussi, qu'il est impossible d'organiser une élection présidentielle, dans les conditions actuelles, avec des instruments juridiques obsolètes et surtout des responsables d'institutions stratégiques, rejetés par la rue. À leur avis, le scrutin ne sera pas crédible, ni transparent d'ailleurs, même si on parvient à contourner la contrainte du boycott massif (la loi organique portant code électoral ne fixe pas de seuil minimum sous lequel un scrutin est invalidé systématiquement). Dans le sillage, les avocats que nous avons approchés, ne connaissent presque pas le nouveau président du Conseil constitutionnel, Kamel Feniche, désigné à cette fonction quelques heures après la démission de Tayeb Belaïz. Dimanche prochain, les avocats sortiront, de nouveau, dans les rues pour exprimer leurs exigences. À rappeler que le corps des avocats accompagne la révolte populaire depuis ses premiers balbutiements. Des collectifs se forment spontanément pour défendre les manifestants et les activistes interpellés par les forces de sécurité. Ils portent aussi publiquement, la demande de la rue. Ils ont réussi, au bout de quelques jours, à rallier des magistrats à l'insurrection citoyenne contre le régime. Souhila H.