Ce cours d'eau fait face à une véritable catastrophe écologique. En dépit des efforts consentis par la direction de l'environnement locale dans le but de venir à bout de la pollution qui affecte les nombreux cours d'eau de la région, il n'en demeure pas moins que ce phénomène persiste. En effet, l'oued Isser, lequel prend sa source dans la commune de Berrouaghia (wilaya de Médéa) et passe par Bouira, fait face à une véritable catastrophe sanitaire. Ainsi, dans la commune de Lakhdaria (ouest de Bouira), précisément à proximité de la zone d'activité implantée à sa sortie nord-est, la pollution fait des ravages, ce qui a poussé la population à lancer un cri de détresse à l'intention des autorités concernées. Et pour cause, de la margine issue des huileries avoisinantes, ainsi que du sang et des déchets animaliers provenant d'un abattoir situé au sein de ladite zone se déversent dans cet oued, lui donnant une texture flasque et visqueuse. "Voilà comment on massacre la nature et le tout avec la bénédiction des autorités !", fera remarquer un villageois croisé aux abords d'oued Isser. Notre interlocuteur ajoute d'un ton dépité : "On a écrit, dénoncé, manifesté, mais personne ne veut nous écouter. Ils veulent empoisonner les gens ? Qu'ils le fassent ! Nous, on a notre propre puits." Sur les rives de cette rivière, des cadavres de poissons s'amoncellent. Il faut dire que les eaux de cet oued sont d'une toxicité extrême, puisqu'en plus de la margine et du sang, les déchets hospitaliers au même titre que des produits chimiques qui pourraient provenir, selon les riverains, de l'usine de détergents implantée à Lakhdaria y sont déversés sans le moindre contrôle. Renseignements pris auprès de l'Enap (Entreprise nationale de peinture), implantée à Lakhdaria, il nous a été clairement indiqué que leur usine ne déverse en aucun cas les produits toxiques en plein air. "Nous avons une réglementation très stricte en la matière. D'ailleurs, notre unité a été félicitée par l'ancien ministre de l'Industrie lors de son dernier passage à Bouira", ont tenu à préciser les responsables de l'Enap de Bouira. Qu'en est-il du traitement des eaux provenant de cet oued, qui sont essentiellement utilisées par les agriculteurs de la région ? En effet, tout un processus de traitement des eaux provenant des oueds est prévu en amont et en aval. Cependant, là où le bât blesse et où la situation prête sérieusement à l'inquiétude, c'est lorsqu'on sait que la station d'épuration des eaux usées de Lakhdaria est partiellement hors service pour d'obscures raisons depuis plus de sept ans. À titre indicatif, la wilaya de Bouira dispose de trois stations d'épuration implantées à Bouira, Sour El-Ghozlane et Lakhdaria. Initialement, ces trois centres de dépollution ont une capacité théorique de traitement avoisinant 200 000 m3. Or, dans les faits, ces stations traitent selon les statistiques de l'ONA (Office national de l'assainissement) local, un peu plus de 70 000 m3, ce qui est largement insuffisant. Pour sa part, Guenoune Hocine, vice-P/APC de Lakhdaria, que nous avons interpellé au sujet de cette pollution, affirmera d'un ton résigné : "On fait tout notre possible pour nettoyer et verbaliser les contrevenants, mais hélas, on ne peut surveiller tout le monde." S'agissant de la "culture" de la sauvegarde de l'environnement chez les citoyens, l'adjoint au maire dira spontanément : "Elle est inexistante, et ce n'est pas propre à Lakhdaria." Et de préciser : "Les huileries rejetaient leur margine dans cette rivière, mais en 2015 l'ancien wali de Bouira avait procédé à leur fermeture, désormais ils ont un bassin de décantation." Or, ce responsable s'est dit "surpris" d'apprendre que certains propriétaires d'huileries continuent de déverser leur margine dans ce cours d'eau.
