Les salles des fêtes, les restaurants, les cantines scolaires, les boulangeries et les ménages ont un point commun caractérisé par le gaspillage du pain. En effet, ces établissements, auxquels s'ajoutent d'autres qui exercent des activités dans le commerce de la restauration, se distinguent par l'achat et la manipulation en abondance du pain. Néanmoins, tous ces commerçants n'hésitent pas à jeter dans les poubelles, au même titre que leurs ordures, du pain non consommé dans la journée. Les plus aptes à témoigner de ces gâchis restent incontestablement les agents de nettoiement, à l'image d'Abdellah, qui exerce depuis une dizaine d'années à Mascara ville : "Nul ne peut rester indifférent face à de tels spectacles. Je ne pouvais nullement m'imaginer que les gens étaient si inconscients que cela. L'incivisme de certaines personnes atteste du degré de leur culture. Ces personnes qui jettent dans les poubelles du pain consommable n'ont aucune notion de la religion. Ce sont généralement des gens qui ont vécu pauvres mais qui se sont retrouvés avec un nouveau statut, car généralement les gens de bonne famille optent pour une attitude différente. À chacune de nos tournées nocturnes ou matinales, nous ramassons des quintaux de pain entassés dans des sacs, jetés à même le sol ou mis carrément dans les poubelles. Certaines familles tiennent à séparer le pain des ordures en le mettant dans des sacs. La plupart du temps, il s'agit de pain entier et frais de surcroît. Au lieu d'être jeté, ce pain devrait être donné aux pauvres qui en ont besoin. Mais, de nos jours, on dit que ‘ventre plein ignore ventre vide'. Nous assistons au quotidien à des scènes de désolation qui ne peuvent passer sous silence. Toutefois, ce gâchis est réduit puisque ce pain retrouvé mêlé aux ordures est remis aux éleveurs de bétail, de volaille ou aux commerçants de calentita qui en font bon usage. Ces morceaux et ces baguettes frais ou rassis sont donnés aux chèvres, aux vaches ou aux poules." Pourtant, en dépit de la hausse de son prix, les gens achètent le pain en abondance sans aucune restriction. Taxée à 7,50 DA le pain ordinaire et à 8,50 DA le pain amélioré, l'unique baguette est vendue à 10 DA par tous les boulangers et les dépositaires de pain. Ainsi, outre la marge autorisée, ces commerçants réalisent de gros bénéfices au détriment des consommateurs qui s'exécutent sans contester. A. B.