Alors que l'économie nationale peine à sortir la tête de l'eau, nombre d'entreprises publiques connaissent des impasses managériales. La guerre des prérogatives rend ardus les arbitrages entre différents secteurs. Confronté aux graves difficultés que vivent les grands groupes industriels publics, le premier responsable du département de l'Industrie, Ferhat Aït Ali, serait en butte à des résistances au niveau de certaines sociétés et serait prisonnier de certaines lois héritées du temps où Ahmed Ouyahia était à la tête du gouvernement. Cela fait des semaines que le ministre de l'Industrie tente de changer certains dirigeants de groupes publics. Mais selon nos informations, la tâche est ardue. Parfois même délicate. L'exemple du président du groupe Elec El-Djazaïr est éloquent. Sur décision du ministre, une réunion du conseil d'administration avait décidé de remplacer Kinane Djaouadi Djilali par Mustapha Ferfer à la tête du groupe en question. Pendant des semaines, ce groupe public, qui compte dans son portefeuille l'Eniem, l'Enie ou encore Electro-industrie, était "géré" par deux responsables. La raison ? En l'absence de l'aval du représentant du Premier ministre, le procès-verbal de la réunion du conseil d'administration n'a pas été validé. Le groupe s'est donc retrouvé avec un P-DG démis de ses fonctions et un nouveau qui n'était pas officiellement installé.Il a fallu l'urgence de régler le cas de l'Entreprise des industries de l'électroménager (Eniem) de Tizi Ouzou pour que Mustapha Ferfer soit installé dans ses fonctions, la désignation des P-DG des filiales devant être officiellement installés par les présidents des groupes. Le cas d'Elec El-Djazaïr n'est pas isolé. La situation du groupe Algerian Chimical Society (ACS) est encore plus problématique. Un conseil d'administration réuni il y a quelques semaines a décidé de remplacer l'actuel P-DG, Abdelghani Benbetka, à la tête de ce groupe qui englobe entre autres l'industrie chimique (peintures, industries plastiques, détergents...) et pharmaceutique, dont les groupes Saidal et Socothyd. Mais le représentant du Premier ministre a refusé de parapher le document pour des raisons inexpliquées. Un nouveau responsable a été formellement désigné par le ministère. Abdelghani Benbetka aurait cependant refusé de quitter ses fonctions tant que le PV d'installation du nouveau P-DG n'est pas encore validé par les services du Premier ministère. Ce dernier s'appuie, dans cette démarche, sur une circulaire signée en 2018 par l'ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia obligeant les ministres de l'Industrie à demander l'aval du Premier ministre avant d'opérer un quelconque changement à la tête des holdings. Il s'agissait, pour l'ancien responsable, d'éviter les changements qui s'opéraient à la tête de ces groupes publics selon le bon vouloir des ministres qui semblaient avoir tendance à changer les responsables sans motifs économiques. Mais cette note est devenue une source de blocage pour l'actuel ministre. Ainsi, à l'occasion de la crise qu'a connue récemment l'entreprise de Matériel de gerbage et de manutention de Constantine (German), le député du FJD, Lakhdar Benkhellaf, a révélé au quotidien El Watan que le ministre de l'Industrie avait des difficultés avec les P-DG des groupes publics. "Le ministre nous a affirmé qu'il demande depuis une année au holding de lui fournir des rapports de situation sur l'entreprise German, mais il n'a rien reçu", a révélé le député de Constantine, citant le ministre avec qui il avait eu des entretiens quelques jours auparavant. "Ces groupes ont été créés durant une certaine période avec une mission bien définie au profit de la îssaba ; ils n'en font qu'à leur tête", a indiqué le parlementaire qui précise même que "malheureusement, il n'a rien pu faire à cause d'une vieille note d'Ouyahia", qui a désigné ces chefs de holdings en les protégeant, selon lui, par des textes de loi les rendant comptables seulement devant le Premier ministre. Des éléments probants indiquent que le ministre connaît des difficultés avec d'autres dirigeants d'entreprises ou de groupes publics. Mais en l'absence de communication officielle, on ignore les raisons qui ont poussé les services du Premier ministre à ne pas valider les décisions du ministre de l'Industrie qui, indique-t-on, a pourtant écrit des courriers destinés à Abdelaziz Djerad. Mais point de réponse. Tout comme nos tentatives de joindre certains des groupes concernés et les services du ministre de l'Industrie qui n'ont pas abouti.