Le nombre d'étudiants algériens inscrits dans les universités françaises a connu une augmentation de 44% entre 2013 et 2018. L'Agence nationale française d'accueil des étudiants internationaux, Campus France, vient de publier un rapport exhaustif qui rend compte de l'évolution des inscrits d'origine étrangère dans les établissements supérieurs en France. Cette étude révèle que les étudiants algériens figurent parmi les effectifs qui ont connu les plus fortes augmentations. Entre 2013 et 2018, leur nombre a augmenté de 44%. Avec 31 196 inscrits en 2019, les Algériens arrivent aussi en seconde position en termes d'effectifs après les Marocains (41 729) et devant les Chinois (28 436). Ils représentent actuellement 9% des étudiants étrangers. Toutefois, Campus France note que la croissance du nombre des inscrits en provenance d'Algérie s'est ralentie, avec +2% d'inscriptions seulement en 2018. Bien que des statistiques précises (par pays d'origine) pour l'année 2020 ne soient pas encore disponibles, de premières estimations montrent que le contexte sanitaire a eu un impact très négatif sur le volume des arrivées. Selon Campus France, le nombre de visas délivrés aux nouveaux inscrits étrangers dans les universités françaises a chuté de 20% en 2020. La pandémie de coronavirus a également ralenti le rythme des opérations de délivrance et de renouvellement des titres de séjour-étudiant. La lenteur et la dématérialisation des démarches compliquent la vie des demandeurs, dont les Algériens. Ces difficultés faussent aussi l es objectifs du gouvernement français de rendre la France plus attrayante pour les étudiants étrangers, conformément au programme "Bienvenue en France", du ministère de l'Enseignement supérieur. Cette volonté s'exprime d'ailleurs par le nombre des titres de séjour-étudiant (91 000) délivrés en 2019. Celui-ci a dépassé pour la première fois le volume des titres de séjour pour motifs familiaux, économiques ou humanitaires (88 700). Un peu moins de la moitié des étudiants étrangers arrivent d'Afrique. En 2018, 6 606 titres de séjour ont été délivrés aux Algériens, contre 11 282 aux Marocains. Selon Campus France, les filles constituent un peu moins de la moitié du nombre des inscrits en provenance d'Algérie. 49% des nationaux sont inscrits à l'université, dont 44% en sciences et 28% en lettres et langues, 32% sont dans des écoles d'ingénieurs et le reste suit des études de commerce. Sans surprise, 79% des étudiants algériens à l'étranger sont en France. 1,9% a choisi de s'expatrier au Canada. Quasiment la même proportion de nationaux se trouve en Arabie saoudite, aux Emirats arabes unis et au Royaume-Uni. Dans son rapport, Campus France observe que l'Algérie, en revanche, ne constitue pas une destination importante pour les étudiants étrangers. De son côté, le Maroc figure dans le top 25 des pays privilégiés par les Français. "Le Maroc est une destination émergente pour les étudiants français. Leur nombre a été multiplié par neuf en cinq ans, grâce à l'ouverture de campus délocalisés et de filiales d'établissements français dans le pays, au développement d'accords de double diplôme et à la création d'établissements orientés vers la recherche", note le rapport. La précarité pousse des étudiants algériens à vouloir quitter la France À cause de la détérioration de leurs conditions de séjour en France, des étudiants algériens cherchent par tous les moyens à revenir en Algérie, momentanément ou de manière définitive. Sur la page facebook de l'association Ecaf (Etudiants et cadres algériens en France), des messages de jeunes filles et de garçons totalement désespérés sont publiés tous les jours. Leurs auteurs veulent s'informer des modalités d'inscription sur les listes de rapatriement, afin de retourner dans leurs familles. "Je n'ai pas de travail et plus d'argent pour payer mon logement et me nourrir convenablement", nous a confié Lylia, étudiante à l'université de Villetaneuse, près de Paris. Arrivée en France, il y a deux ans pour un mastère, la jeune fille a perdu son travail de vendeuse à mi-temps en juin dernier et n'arrive plus depuis à retrouver un emploi. "Avec la crise sanitaire, les embauches se font plus rares. J'ai dû m'inscrire dans une banque alimentaire pour bénéficier de denrées gratuitement", dit Lylia, en précisant qu'elle a restreint le nombre de ses repas pour conserver le plus longtemps possible les provisions. Depuis l'Algérie, ses parents qui ne peuvent pas l'aider lui ont demandé de rentrer. "Je n'ai pas le choix", fait-elle savoir, résignée. Kamel, étudiant en architecture, voudrait aussi pouvoir rentrer en Algérie. Mais provisoirement, le temps que la situation sanitaire et économique s'améliore. "Comme les cours se déroulent à distance actuellement, je me suis dit que je pourrai continuer à travailler à partir de l'Algérie, dans une ambiance plus sereine et sans devoir penser aux problèmes d'argent", explique l'étudiant. Pour porter secours aux étudiants algériens, des associations tenues par des compatriotes se mobilisent depuis le début de la crise sanitaire. De nombreuses opérations de distribution de colis alimentaires et de collecte d'argent ont été organisées. Mais cette campagne de solidarité s'avére très insuffisante. Récemment, l'Adraa (Association des Algériens des deux rives et leurs amis) a publié un communiqué pour alerter sur la hausse importante de demandes d'aide des étudiants. "Nous avons reçu 203 messages de détresse en une semaine. Nous sommes dépassés", a indiqué l'association sur sa page facebook. La précarité qui touche les Algériens est partagée par la majorité des étudiants en France, qu'ils soient étrangers ou pas. Par désespoir, quelques-uns ont choisi de mettre fin à leur vie. En août dernier, un jeune de Béjaïa, inscrit dans une université de la Rochelle, à l'est de la France, s'est suicidé en se jetant de la fenêtre de son logement étudiant. Pour faire face à la situation précaire des étudiants, le gouvernement français a fini par prendre des mesures, comme la facturation des repas à un euro dans les restos U, la distribution de chèques pour des accompagnements psychologiques, ainsi que le gel des loyers dans les résidences universitaires.