Les Constantinois étaient encore plus nombreux, hier, à battre le pavé avec la même détermination et les mêmes slogans et chants qui ont retenti le long de l'itinéraire revu en boucle par les marcheurs. Une manifestation qui ne s'est guère souciée des soupçons d'une présumée mainmise des islamistes et autres militants du mouvement Rachad sur le Hirak, tant il est vrai que la marche s'est déroulée dans la bonhomie, préservant le caractère pacifique qui a empreint le mouvement populaire depuis son avènement. " Le Hirak a été et doit rester transgénérationnel et transpartisan comme il a débuté", commente Nourredine, un fidèle des marches du vendredi à Constantine. Pour lui, "les slogans changent d'un carré à l'autre et chacun est libre d'adhérer aux mots d'ordre qui lui conviennent. Depuis son avènement, le Hirak n'a pas fait dans la dentelle en inventant des slogans foudroyants, mais qui ne sont pas forcément de nature à appeler à la violence, comme on le laisse entendre. Ce n'est qu'une autre manœuvre pour le diaboliser". Montrant de la main la foule, il s'adresse à son compagnon qui, vraisemblablement, l'interpellait sur la question de l'appropriation présumée du Hirak par le mouvement Rachad et autres slogans qui font jaser et minent la cohésion légendaire des hirakistes. "Où sont-ils ? Combien sont-ils et comment arriveraient-ils à dominer et à diriger tout ce beau monde ?", s'interroge Noureddine, en fulminant : "Il y a une volonté manifeste de torpiller le Hirak par ceux-là mêmes qui misaient sur son essoufflement après la trêve induite par la pandémie." Pour ce hirakiste convaincu, "rien n'a changé depuis mars 2020 sur le plan politique, alors que le front social est au bord de l'implosion". "Seul le Hirak est à même de dénoncer la gabegie du pouvoir et de porter les préoccupations populaires en l'absence d'une classe politique digne de ce nom. Il est la seule force d'opposition qui joue pleinement son rôle dans ce pays et c'est aussi pour cette raison que le Hirak est ciblé", estime-t-il. Un groupe de jeunes prend le relais en scandant à tue-tête : "Ni laïc, ni islamiste, ni militaire, nous voulons un Etat civil." Cela dit, les manifestants ont longuement scandé des mots d'ordre hostiles à la tenue des élections législatives le 12 janvier prochain alors que de nombreuses pancartes appelant à la libération des détenus d'opinion ont refait leur apparition lors de la marche d'hier, qui a duré plus de trois heures et sans incident.