Tenter d'expliquer une évidence reviendrait à porter de l'eau à la rivière. Ce flot d'interrogations savantes qui fusent de toute part et s'inquiètent de ce que l'Algérie adopterait une sorte de politique de l'autruche à l'égard de la guerre civile qui fait rage en Libye paraît si simplet et tellement contradictoire avec la gravité du moment. Qu'attendait-on de l'Algérie ? Qu'elle saute dans les bras de l'Otan pour chasser du Kadhafi ? Et pourquoi l'aurait-elle donc fait ? Quel est son intérêt dans le renversement du régime de ce despote à qui l'Europe déployait le tapis rouge chez elle il n'y a pas si longtemps ? Qu'a l'Algérie à gagner dans son implication directe dans cette guerre qui n'est pas la sienne ? Du pétrole ? Elle en a. Des hommes de main au sein du CNT ? C'est le dernier de ses soucis. Des territoires à l'Est ? Elle n'en a que faire, elle est le plus grand pays d'Afrique. Des dividendes ? Elle a de l'argent à en redistribuer. Un effacement de sa dette ? Elle n'en a pas. Des armes en récompense ? Ses armes, elle les achète chez qui elle veut et elle les paye cash. Comment voudrait-on que l'Algérie, dont la politique étrangère a toujours consisté à soutenir les mouvements de libération contre l'occupant étranger, puisse aujourd'hui se battre aux côtés de ce même étranger pour destituer un chef d'Etat dans son propre pays, fût-il un despote ? L'Algérie aurait mobilisé toute son armada si l'Otan l'avait sollicitée pour la libération de la Palestine ; elle aurait été aux avant-postes et dépensé sans compter comme elle l'a toujours fait. L'Algérie aurait apporté toute son aide aux insurgés s'ils l'avaient cherchée auprès d'elle, le pays voisin, musulman, berbère, arabe et africain. Ce que l'Algérie veut, c'est que les Libyens cessent de s'entretuer sous le regard amusé d'une Otan qui teste ses armes sur des Arabes et faxe la facture à Doha.