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«L'Etat israélien ne veut pas la paix !»
Publié dans La Nouvelle République le 27 - 09 - 2011

Adhésion de la Palestine à l'ONU, non-respect du droit international par Israël, soutien américain, notamment le lobby pro-israélien... Telles ont été les questions abordées par La Nouvelle République avec Alain Gresh, directeur adjoint du Monde Diplomatique.
La Nouvelle République : Le 23 septembre l'ONU a été saisie de la candidature de la Palestine. Les Etats-Unis ont annoncé qu'ils useraient de leur droit de veto, alors que Saëb Erakat estime que la barre des 150 Etats, qui soutiendront cette proposition, pourrait être franchie, soit plus des deux tiers requis pour l'admission d'un nouveau membre. Quelles pourraient être les conséquences de ce bras de fer sur les relations arabo-américaines ? Alain Gresh : D'abord, il faut préciser comment ça se passe. Mahmoud Abbas a fait un discours et va soumettre la demande d'adhésion de la Palestine au Conseil de sécurité. Selon les statuts des Nations unies, le Conseil de sécurité doit adopter cette proposition par une majorité d'au moins 9 voix sans opposition des membres permanents du Conseil de sécurité et, ensuite, être accepté par les deux tiers des membres de l'ONU. Or, aujourd'hui, il est évident, et Obama l'a annoncé clairement, que cette proposition ne serait pas adoptée par le Conseil de sécurité. Alors, il y a deux questions qui se posent sur la tactique palestinienne. Premièrement, est-ce que les Palestiniens vont aller au Conseil de sécurité de façon à obliger les Etats-Unis à utiliser leur veto ? Deuxièmement, est-ce qu'ils iront à l'Assemblée générale pour demander un autre statut, celui d'Etat membre observateur, et, là, il suffit de la majorité dont ils disposent à l'Assemblée générale. De toute façon, il est clair que le discours qu'a prononcé Obama il y a quelques jours, discours qui a été qualifié par la presse israélienne de discours le plus sioniste tenu par un dirigeant américain, aura des conséquences sur la politique américaine et le prestige des Etats-Unis dans le monde arabe. Vous savez que depuis le début du printemps arabe, les Etats-Unis ont essayé de se placer comme étant aux côtés des peuples arabes qui luttent pour la démocratie. Je crois que ce discours va confirmer quelque chose qu'on savait déjà, mais qui est quand même très fort. C'est qu'il n'y a qu'un allié qui compte pour les Etats-Unis, surtout au moment où ils sont en campagne électorale, c'est Israël. Sachant qu'au niveau de l'Union européenne les avis sont partagés sur cette question d'adhésion, cela ne va-t-il pas provoquer une fracture au sein de cette union comme on l'a déjà vu avec la guerre de Libye où l'Allemagne s'est démarquée un tant soit peu de la position européenne ? Ecoutez, cela fait longtemps qu'il n'y a pas de position unifiée de l'UE sur la plupart des questions politiques, notamment depuis l'élargissement à 27 pays. En fait, de plus en plus, l'UE est mieux contente d'être le plus petit des dénominateurs communs des 27, c'est-à-dire, des positions qui n'ont pas de poids. Ce qui est souligné dans ce qui se passe à l'Assemblée générale, c'est le rôle que joue la France, qui veut se présenter comme un intermédiaire, mais, comme nous l'avons remarqué dans le discours de Nicholas Sarkozy, en fait, elle adopte de facto les positions pro-israéliennes. L'analyse de Sarkozy, c'est de dire : premièrement, le format adopté par les négociations ne marche pas, il faut trouver un autre format, c'est-à-dire associer d'autres pays ; deuxièmement, il faut un calendrier au bout d'un an pour aboutir à une résolution ; troisièmement, il faut accepter la Palestine comme Etat observateur, mais à condition qu'elle renonce au seul avantage qu'a le fait d'être Etat observateur, à savoir pouvoir porter plainte devant la Cour internationale de justice contre des responsables israéliens : des officiers, des politiciens, des colons coupables de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. Dans tous les discours de Sarkozy, il n'y a, à aucun moment, l'idée que le seul obstacle aujourd'hui à la paix c'est Israël. L'Autorité palestinienne, elle, est prête à négocier. Elle a fait les concessions nécessaires. On a un gouvernement israélien qui dit clairement qu'il ne veut pas les principes adoptés par le droit international et les Nations unies pour négocier. Et, malgré cela, le discours de Sarkozy et de l'Union européenne, c'est de renvoyer dos à dos les deux partenaires. Sarkozy ne dit pas du tout dans son discours qu'est-ce qui se passera si, au bout d'un an, il n'y a pas de résultats dans les négociations. Or, cela fait au moins depuis 2003, c'est-à-dire au moment de l'adoption du quartet de la feuille de route, qu'on fait des promesses aux Palestiniens qui n'ont jamais été tenues. En 2003, on a annoncé qu'en 2005, il y aurait un Etat palestinien. Le président Bush, en 2007, a annoncé à Annapolis qu'en 2008, il y aura un Etat palestinien. Obama, annonce en 2010, qu'il y aura un Etat palestinien en 2011 et s'apprête à opposer son veto face à cette création d'un Etat palestinien. Donc, on est dans un double discours, à la fois des Etats-Unis, mais pas seulement des Etats-Unis. L'UE a, à mon avis, aussi une forte responsabilité dans cette impasse. Cette adhésion, même si elle n'aboutit pas, ne pensez-vous pas qu'elle place Israël dans une mauvaise posture par rapport à la communauté internationale du moment que plusieurs pays vont quand même reconnaître l'Etat palestinien ? Il y a déjà plus de 120 pays qui ont reconnu cet Etat. Ce que donne le fait d'être membre observateur, c'est évidemment une victoire politique, d'abord. C'est très important, car la Cisjordanie et Ghaza deviendront, à partir de ce moment-là, un Etat occupé. Je pense que, symboliquement, c'est important. La deuxième carte que cela donne aux Palestiniens, c'est le fait de pouvoir poursuivre des responsables israéliens devant la Cour pénale internationale. Or les statuts de la CPI disent clairement, que l'installation de populations étrangères dans un territoire occupé est un crime de guerre. C'est que la colonisation israélienne dans les territoires occupés est un crime de guerre. Donc, il y a possibilité de poursuivre les Israéliens. Et ça, c'est également, une arme des Palestiniens. Mais il faut dire que la seule chose qui compte pour Israël, c'est le soutien des Etats-Unis et de l'UE, et pour l'instant, ils l'ont. Les Etats-Unis, c'est connu, mais l'UE, malgré toutes ses déclarations en faveur d'un Etat palestinien, dans la réalité, elle a développé, la France en particulier, des relations très étroites avec l'Etat d'Israël, aussi bien économiques, culturels et sécuritaires. Ce qui a fait dire à un certain nombre de commentateurs qu'on est revenu à la période des Guy Mollet en 1956 quand Israël, la France et la Grande-Bretagne ont attaqué l'Egypte de Nasser contre la nationalisation du canal de Suez et où il y avait une alliance stratégique entre la France et Tel Aviv. Arafat a reconnu Israël en 1988, pourquoi Israël ne veut-il pas reconnaître cet Etat palestinien et appliquer les résolutions de l'ONU ? Je crois qu'on a, dans le gouvernement israélien, notamment depuis la victoire de la droite en 2000, c'est-à-dire depuis le moment où Sharon a remporté les élections, une espèce de double discours qui est de dire, d'un côté, nous voulons la paix et, de l'autre, nous ne voulons pas les conditions qui rendent possible la paix, c'est-à-dire : nous ne voulons pas nous retirer des territoires occupés en 1967, nous ne voulons pas rendre Jérusalem, nous ne voulons pas démanteler les colonies. Je dirai que cela illustre de manière très claire que le seul obstacle aujourd'hui à l'instauration d'une paix juste, c'est la position du gouvernement israélien. Malheureusement, il faut dire que le gouvernement israélien, qui est le plus à droite de l'histoire d'Israël depuis 1948, avec des éléments comme Lieberman qui est ministre des Affaires étrangères et qu'on qualifierait, dans n'importe quel pays européen, ouvertement de fasciste, c'est le gouvernement le plus à droite soutenu par une grande majorité de la population qui inclut le parti travailliste, censé être de gauche, dont la nouvelle secrétaire générale, qui a été élue hier, a dit : «Mais la colonisation n'est ni un crime ni un péché ; la preuve, c'était nous (les européens, NDLR) qui l'avons commencée.». C'est vrai, qu'après la guerre de juin 1967, le parti travailliste était au pouvoir et a commencé la colonisation. Donc, on a, et je le dis clairement : l'Etat israélien ne veut pas la paix ! Et cet Etat, malheureusement, ne paye aucun prix pour ce refus, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de sanctions contre lui. Il dispose, comme je l'ai dit, de l'appui des Etats-Unis, de la complaisance de l'UE..., et peut continuer malheureusement comme ça, très longtemps s'il n'y a pas de mesures prises, de sanctions et de pression sur lui. Les Israéliens cherchent à ce que les Palestiniens reconnaissent un Etat juif. N'est-ce pas là une manœuvre dangereuse qui pourrait éventuellement compromettre tout processus de paix ? Oui, vous avez tout à fait raison. Il y a plusieurs réponses. Bon, c'est un argument qui a été avancé il y a quelques années parce que chaque fois qu'on va vers la paix, les Israéliens inventent un nouvel argument pour dire : il faut encore une condition. Et si même les Palestiniens acceptaient cette condition, on leur demanderait autre chose. Donc, c'est une espèce de manœuvre dilatoire. En même temps, elle est dangereuse pour deux raisons : d'abord, parce qu'elle fait de la minorité palestinienne en Israël des étrangers dans leur propre pays. C'est-à-dire que si Israël est l'Etat du peuple juif que sont le million et demi de Palestiniens qui vivent en Israël et qui ont la nationalité israélienne. Et puis, cela constitue un autre danger. Cette affirmation que les juifs forment un peuple à travers le monde veut dire quoi ? Cela veut dire que les juifs français sont une minorité nationale en France ? Cela crée une situation extrêmement trouble. D'ailleurs, il y a eu avant l'été un appel de plusieurs centaines de personnalités juives françaises disant qu'ils refusaient cette qualification de l'Etat d'Israël comme étant l'Etat du peuple juif, parce que cela mettait en cause leur identité qui est avant tout française. Dans ce
contexte (reconnaissance d'un Etat juif), n'assiste-t-on pas, en fait, à la poursuite de cette politique de transfert enclenchée déjà en 1948 avec les différents massacres de Der Yassine, Lydda, Ramle... ? Ecoutez, je pense que la politique qu'on peut qualifier de nettoyage ethnique, qui a été commencée en 1948, a continué, elle n'a pas besoin du prétexte de l'Etat juif. Il y a le prétexte que la Cisjordanie c'est la terre d'Israël, que cela a été donné par Dieu, et donc les juifs ont le droit de s'installer n'importe où. Même si, comme vous le savez en fait, on prend la dernière grande vague d'émigration en Israël qui était celle de l'émigration russe. On sait qu'un tiers des Russes n'étaient pas du tout des juifs. C'étaient des «Blancs». En fait, on est vraiment dans le cas d'un projet colonial. C'est-à-dire qu'il faut remplacer les populations «barbares» par des «Blancs». C'est évident que c'est cette idéologie d'Etat juif, d'un Etat à la fois religieux et ethniquement pur... qui pose problème et qui donne les fondements, je dirais, idéologiques à l'entreprise de nettoyage ethnique à laquelle on assiste en Palestine depuis 1948. Qu'est-ce qui empêche la communauté internationale d'exercer des pressions sur Israël afin d'appliquer les résolutions onusiennes, garantes du respect du droit international ? Quant on parle de la communauté internationale, c'est un peu exagéré. On peut dire qu'il y a deux éléments dans la communauté internationale qui, aujourd'hui, jouent un rôle négatif. Ce sont les Etats-Unis, qui ont une alliance stratégique avec Israël qui remonte aux années 1950, surtout à partir des années 1960, et qui considèrent que le seul allié stable dans la région, c'est Israël et qu'il faut le soutenir à tout prix. Cela c'est un principe de la politique américaine à travers tous les gouvernements successifs, y compris celui d'Obama. Il y a en plus un élément particulier en ce moment, c'est qu'on rentre en période d'élections présidentielles aux Etats-Unis et qu'Obama a peur du lobby pro-israélien qui est très puissant, notamment au Congrès, dans l'opinion, dans les médias, et donc, il ne doit pas l'affronter. Cela d'un côté. De l'autre, on a la politique de l'UE, et je dirais surtout de la France malheureusement, et là on a une vraie rupture avec la politique traditionnelle dite pro-arabe de la France, qui n'était pas du tout pro-arabe mais qui était déjà équilibrée, puisque, maintenant, on a une politique où, sur le plan des principes, on dit toujours qu'on est pour deux Etats : un Etat palestinien et un Etat israélien. Mais, en fait, on développe des relations avec Israël. On fait comme si Israël n'occupait pas la Palestine et, donc, on développe des relations économiques, politiques, culturelles, comme je l'ai dit, avec Israël. Les raisons, elles sont multiples, mais je crois que, de plus en plus, il y a l'idée chez les dirigeants français, aussi bien ceux de la majorité actuelle que ceux de l'opposition socialiste, c'est qu'Israël est dans le même camp que nous, c'est-à-dire le camp occidental, partie de la lutte contre le terrorisme islamiste, contre l'islamisme radical, une espèce d'avant-poste de la civilisation. Il y a une thèse de Théodore Herzl, fondateur du sionisme, qui disait que le futur Etat juif devrait être l'avant-garde de la lutte contre la barbarie. C'est ce à quoi on assiste aujourd'hui. Dans l'un de vos articles, si je me rappelle bien, vous disiez : «Le droit d'user de la violence pour se libérer est aussi un droit légitime des peuples». D'après vous, jusqu'où cela serait-il acceptable ? Ecoutez, ce n'est pas une question philosophique. Les mouvements de libération nationaux, en général dans les années 1950 et 1960, notamment l'Algérie, en sont le parfait exemple. Face à la violence du colonisateur, utiliser la contre-violence contre une oppression étrangère est légitime. Cela a été le cas du FLN algérien, des mouvements de libération de l'Angola et du Mozambique, en Afrique du Sud aussi. Bon, la question ne porte pas sur le principe. L'utilisation de la violence n'est pas une fin en soi, c'est un moyen d'arriver à une fin politique. Je veux dire le cas du FLN algérien n'était pas d'utiliser la violence pour utiliser la violence, mais utiliser la violence pour atteindre la libération. La question c'est qu'aujourd'hui pour des raisons qui tiennent à l'histoire de la Palestine, aussi à la configuration géographique, etc. La possibilité d'une lutte armée est extrêmement limitée. On l'a vu après 1967, quand le Fatah de Yasser Arafat a essayé de mener une lutte armée et on le voit aujourd'hui avec le Hamas qui, de temps en temps, bombarde avec quelques roquettes le territoire israélien, mais, en fait, cela n'a aucune efficacité militaire. Je dirais donc que c'est à la fois le droit d'un peuple occupé d'utiliser la violence. Maintenant, il faut savoir, et c'est une question qu'il faut poser aux Palestiniens et c'est à eux de la résoudre : est-ce que cette violence est efficace pour le but politique qu'ils se fixent, c'est-à-dire celui de l'indépendance nationale ? On reproche aux Palestiniens d'user de «violence» (attentats), alors qu'on a déjà vu des luttes populaires réprimées par des balles réelles (intifadas). Quels moyens de lutte pourraient persuader Israël à accepter une solution équitable au conflit ? Comme je l'ai dit, d'abord, la réponse à cette question appartient aux Palestiniens, c'est-à-dire, ce n'est pas moi, ici dans mon bureau à Paris, qui vais dire aux Palestiniens ce qu'il faut faire. Ce qui est sûr, c'est que l'utilisation de la violence telle qu'elle a été faite à travers les attentats au moment de la seconde intifada s'est révélée contre-productive politiquement. C'est-à-dire qu'elle a isolé les Palestiniens, n'a pas permis de faire réellement pression sur Israël, a aliéné une partie de la communauté internationale... Bon, la question, en même temps, c'est que les négociations telles qu'elles se passent depuis dix ans, c'est-à-dire des négociations, comme disent les Américains, de bonne foi, entre les deux parties amènent à une chose très évidente, c'est qu'il n'y a pas d'issue parce que les Israéliens ne veulent pas céder. Et je pense que les Israéliens ne céderont pas s'il n'y a pas de pression sur eux. Maintenant, quelles sont les formes de pression possible ? Comme on le sait, Israël, même face à des manifestations pacifiques, tire à balles réelles et tue des gens. Donc on n'est pas dans une situation simple. Je pense, en tous les cas, qu'il y a une chose qui est importante, c'est les pressions internationales sur Israël, notamment toute la campagne de Boycott Desinvestissement Sanction (BDS), lancée notamment par les ONG et la société civile et qui donne des résultats. Comme on a vu un certain nombre d'entreprises qui travaillaient avec les entreprises israéliennes dans les colonies obligées de se retirer. Il y a le boycott des produits qui viennent des colonies. Enfin, il y a toute une série de moyens qui, à mon avis, doivent se développer dans la période suivante et amener à un isolement israélien comme l'isolement de l'Afrique du Sud sous l'apartheid. Dans une de ses déclarations que je résume, Ariel Sharon avait dit que nul ne peut dicter à Israël ce qu'il doit faire. La même idée a été reprise par le Premier ministre Benjamin Netanyahu. Dans cette situation, quelle lecture peut-on donner à la capitulation de Barack Obama face à Netanyahu sur le gel de la colonisation ? Je ne pense pas que le fait que Sharon ou Netanyahu disent que seul Israël décidait est vrai. Si les Américains décidaient qu'Israël devaient faire une chose, en quarante-huit heures il capitulerait. Il n'y a aucun doute là-dessus. La question c'est : quels sont les obstacles à une telle position américaine ? D'abord, c'est parce que les Américains considèrent que leur alliance avec Israël, je l'ai dit tout à l'heure, est une alliance stratégique. C'est un des fondements de leur politique au Proche-Orient. Parce que c'est un Etat pro-occidental, pro-américain, et que c'est le seul régime stable même s'il y a des changements entre les travaillistes, la droite ou le centre, et c'est quand même une chose très importante. Et dans la période, en tous les cas avant les révolutions arabes, il y avait l'idée aussi qu'en plus, cette alliance stratégique n'a pas de conséquences sur les relations des Etats-Unis avec les Etats arabes. L'Egypte avait de très bonnes relations avec les Etats-Unis, l'Arabie saoudite également. Cela peut être mis en cause avec les révolutions arabes et que plus les Etats dans le monde arabe seront démocratiques, plus l'expression de la volonté de soutien au peuple palestinien s'exprimera. La deuxième raison de l'attitude américaine, comme je l'ai dit, c'est la force du lobby pro-israélien. On l'a vu au moment où Netanyahu est venu devant le Congrès américain à la fois envoyant balader les propositions d'Obama sur les lignes de 1967... et en même temps se faisant applaudir par les membres du Congrès. Je crois que ces derniers se sont levés vingt-neuf fois pour applaudir Netanyahu. Il y a un commentateur israélien, je crois que c'est Ury Avnery, qui a fait remarquer que le discours que le président Bachar avait prononcé devant le Parlement syrien eut moins de ratio pour Bachar qu'il y en a eu pour Netanyahu devant le Congrès. Donc, on a un Congrès qui est beaucoup à la solde pour beaucoup de raisons. Ce lobby pro-israélien aux Etats-Unis n'a-t-il pas une influence sur la politique américaine ? Oui, bien sûr. Vous savez, ce lobby est constitué de deux jambes, si on peut dire. Une partie de la communauté juive organisée et pas toute, parce que, récemment, il y a eu un sondage qui montrait que la majorité relative des juifs américains étaient favorables à l'adhésion de la Palestine à l'ONU, mais c'est un groupe très bien constitué qui dispose de beaucoup de moyens. Et puis vous avez l'autre jambe du lobby qui est la droite fondamentaliste chrétienne qui, pour des raisons
idéologiques, soutient Israël. Tout cela pèse évidemment et énormément sur la politique américaine et jusqu'à présent, d'autant plus que, pour les Américains, il n'y avait pas de prix à payer à leur soutien à Israël dans la région. Peut-être que cela va changer si demain l'Egypte ou d'autres pays adoptent une position plus ferme. A ce moment-là, ce sera plus difficile pour les Américains de maintenir cette position 100 % pro-israélienne. Croyez-vous personnellement à la coexistence de deux Etats, vivant en paix et se respectant mutuellement ? Si oui, quelles seraient les conditions requises pour la réussite d'un tel projet ? Franchement, il y a dix ans, je vous aurai dit : oui je crois à la possibilité. Aujourd'hui, je suis beaucoup plus interrogatif. C'est-à-dire que j'ai l'impression que ce qui se passe sur le terrain en termes de colonisation, l'absence de volonté américaine, l'absence de volonté européenne fait que la solution de deux Etats apparaît de plus en plus difficile. Le projet d'un Etat unique où existeraient juifs, musulmans et chrétiens, d'un Etat bi-national, apparaît aussi utopique. Je dirais qu'en fait, on est face à une crise stratégique du mouvement palestinien de la génération qui est née après la guerre de 1967, avec Yasser Arafat qui a combattu, qui est arrivé au bout du chemin. Et, à mon avis, il n'y a plus de stratégie palestinienne. Quelle réponse avoir à cette crise ? Encore une fois, c'est aux Palestiniens d'y répondre. Mais je dirais que l'expérience de ces dernières années a montré une chose qui me semble tout à fait importante. L'intellectuel palestino-américain Edouard Saïd a écrit un livre intitulé «L'égalité ou rien» dans lequel il disait que ce qui pose problème entre Israël et la Palestine, c'est le refus des Israéliens de reconnaître les Palestiniens comme des égaux. Et je pense que fondamentalement c'est ça le problème. Et c'est bien une pensée coloniale que vous avez connu en Algérie, la manière dont les Français considéraient les Arabes. Tant qu'on n'aura pas cassé cette manière israélienne que je résume en une phrase : la sécurité d'un Israélien vaut la vie de dix Palestiniens, tant qu'on ne sera pas sorti de cette mentalité, il y aura très peu de chance d'arriver à une coexistence pacifique entre Israël et la Palestine.


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