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La moudjahida Claudine Chaulet n'est plus

Claudine Chaulet qui vient juste de nous quitter est une femme, une Moudjahida de la première heure qui aura marqué, par son parcours de militante de la guerre de libération nationale, puis de la construction nationale, plusieurs générations.
Être Française de naissance et de culture, et issue d'une famille de résistants à l'occupation allemande qui s'installe en Algérie en 1942, voilà déjà une caractéristique peu courante pour une jeune fille de l'est de la France. Ses déplacements entre Oran, Paris et Alger pour poursuivre ses études vont lui faire découvrir, de proche en proche, la réalité coloniale ; voilà encore une évolution dans la perception du fait colonial qui n'est que peu partagée dans le milieu des Français de France, et que les Français d'Algérie préfèrent occulter et soustraire à la réalité. La rencontre de Claudine Chaulet avec « Consciences Algériennes » et le groupe qui active autour d'André Mandouze en 1951 aura contribué à son passage dans le militantisme étudiant et dans les premières luttes anticolonialistes. Peut-être y a-t-il là les premiers ingrédients de la rupture radicale, qui ne sera pas ―comme cela fut le cas pour une toute petite minorité de Français― qu'une révolte contre le tort fait aux valeurs de la République. Il s'agit en fait de la formation/émergence d'une conscience algérienne et non plus française. Un premier pas vers l'autre, le colonisé, l'exploité, le dominé, qui correspond en réalité à une première identification. Mais être une militante anticolonialiste et participer à la rédaction d'une brochure clandestine ; rencontrer des nationalistes algériens, dont le moins qu'on puisse dire est qu'ils ne se contentent pas d'organiser de simples « stages universitaires » ou d'anodines séances de cinéclub, voilà une activité qui n'est déjà même plus partagée par les jeunes étudiantes algériennes. 1954-1955, c'est donc le grand examen, la grande rupture, le passage à l'action dans les rangs du FLN. Ses choix ont fait de Claudine Guillot, devenue entre-temps Claudine Chaulet, une actrice engagée dans un processus de libération nationale. Elle ne se contentera pas de porter le courrier, de lui faire traverser les frontières de la colonie ; elle transportera des militants, visitera des malades, participera à la formation des infirmières des maquis. Elle se lancera corps et âme dans le combat pour une Algérie libre, pour des Algériennes et Algériens libres. On peut les compter sur les doigts d'une main, ces étudiantes algériennes qui, les premières, avaient rejoint les rangs du FLN/ALN. Combien sont-elles qui, comme elle, ont hébergé Ramdane Abane, transporté Belkacem Krim, Amar Ouamrane, Slimane Dehilés ou Larbi Ben M'hidi ? Claudine Chaulet emmènera hors d'Alger en février 1957, et malgré le quadrillage de la ville par les parachutistes, au volant de sa 2 CV, seule avec son bébé, au moment même où son mari venait d'être emmené par les policiers de la DST. Elle rejoindra plus tard Tunis, en octobre 1957. Elle y participera à l'animation culturelle aux côtés de Safia et Mohamed Kouaci, de Nadia Oussedik, de Rédha Malek, de Franz Fanon, de Mohamed Sadek Moussaoui dit Mahieddine, de M'hamed Yazid et d'autres encore, à la réalisation de la voix de l'Algérie combattante, le journal El Moudjahid. Les conditions dans lesquelles l'Algérie a accédé à l'indépendance (départ massif de l'encadrement européen des entreprises et des fermes agricoles, retour des réfugiés souvent d'origine rurale, abandon des exploitations agricoles par leurs propriétaires, nécessité d'assurer les récoltes et de préparer les futures campagnes agricoles) place dès 1960 la question paysanne au cœur de la problématique de la construction nationale, dans un pays réputé agricole. Le souci de tous, et en particulier de Claudine Chaulet dans l'Algérie indépendante, est : comment peut-on et doit-on, selon son expression, travailler la terre « Algérie », la préserver, utiliser les richesses sans les gaspiller ? Comment, au sortir de la guerre de libération, penser et vivre l'indépendance ? Diverses approches s'affrontent ici : la première a trait au type de régime politique qui devrait prévaloir. La seconde concerne le statut de la terre et celui du paysan ; le « secteur autogéré » est vécu et défendu par tout un courant politiquement dominant comme le fer de lance de la paysannerie, au point de l'utiliser comme un instrument de contrôle du Pouvoir. Il s'agit là d'un prisme réducteur pour d'autres, dont Claudine Chaulet, qui, s'inscrivant en faux, tentent de souligner que la paysannerie, y compris dans les zones réputées totalement autogérées telles que la Mitidja, ne saurait se réduire aux ouvriers des fermes autogérées, fussent-ils eux-mêmes membres de familles paysannes et anciens ouvriers saisonniers, ni se confondre avec eux. La lutte pour le contrôle du pouvoir et le développement d'un nouveau système politique, notamment à travers la mise en place de relais sociaux, se double d'un autre combat d'idées autour des formes d'exploitation et de propriété, du rôle et de la place historique de la paysannerie dans la construction nationale, de la définition de celle-ci. Claudine Chaulet a choisi d'y répondre en s'intéressant de près à ses composantes, en gardant la distanciation nécessaire sans jamais prétendre être le porte-parole ou le guide d'un quelconque groupe, encore moins imposer son approche. Son point de vue et ses réponses seront le résultat d'enquêtes, d'entretiens avec les diverses composantes des espaces ruraux qu'elle va investir, d'un processus interactif dans lequel elle gardera toujours sa distance et assumera son statut d'intellectuel « non organique ». Elle s'emploiera à saisir la complexité des trajectoires historiques des familles paysannes – en particulier le rôle et le statut de la femme – pour la promotion desquelles elle ne cessera de plaider. Aux responsabilités et à la gloire politiques auxquelles son rôle historique durant la guerre de libération nationale auraient dû ou pu la conduire, elle préfère le travail sur le terrain de la connaissance et la formation des générations futures, tout d'abord au sein de l'INRA et de son Centre national de la recherche en économie et sociologie rurales. Elle a fait le choix de travailler avec ceux qu'elle a trouvés «en bas» et dont on a escamoté l'existence à coups de raccourcis historiques et d'analyses sociologiques à connotation structuraliste. C'est ainsi qu'elle a approché les « paysans » puis les « femmes », lesquelles, selon la réponse que lui a donnée un chef de famille exploitant agricole, sont tout en « bas» : « ce sont les femmes qui récoltent les lentilles car elles sont habituées à se courber ». Le terrain, celui de « ces gens d'en bas» , a toujours été dans sa sociologie la pierre de touche de ses analyses. Une question est au cœur de la sociologie de Claudine Chaulet : comment se libérer, dans un rapport au demeurant étroit à cette terre ? Les réponses à cette question, elle les a cherchées au plus près des acteurs que sont les femmes et les hommes du pays profond, paysans et acteurs locaux, ces Algériens dont elle a reçu les témoignages sur leur quotidien, les mutations vécues, les rapports de domination dans lesquels ils étaient pris. Ces témoignages seront autant de points d'appui aux travaux qu'elle aura conduit. Avec les jeunes chercheurs qu'elle a formés et encadrés, et qu'elle continue de suivre et de conseiller, elle ne cessera de partager sa façon d'approcher la réalité socio-économique. Autant de dons reçus de ces populations, enquêtés, enquêteurs, jeunes chercheurs, étudiants auxquels elle a toujours tenu à rendre intelligible le sens de leur démarche par le dialogue et le partage, la publication et la formation.

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