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Cela s'est passé un 14 juillet 1953 : Une manifestation, des morts, un massacre...
Publié dans La Nouvelle République le 15 - 07 - 2018

Cette date est très peu connue dans notre histoire. Pourtant, elle a eu aussi ses martyrs. Cet article qui relate les faits avec détails, est un témoignage sur la manifestation du 14 juillet 1953 et un hommage à ses victimes.
Le 14 juillet 1953, comme chaque année depuis 1936, le Parti communiste français (PCF), la Confédération générale du travail (CGT) et de nombreuses organisations progressistes organisent à Paris un défilé qui se veut une célébration des valeurs de la République. Cette tradition rappelle celle des manifestations du 1er Mai.
Ce 14 juillet, le cortège défile de la place de la Bastille à la Nation. Rendez-vous est donné dès 14 heures aux militants afin de se constituer en cortèges dont l'ordre a été décidé au préalable. Comme chaque année depuis le début des années 1950 les messalistes, militants indépendantistes du mouvement pour les libertés démocratiques en Algérie (MTLD) dirigé par Messali Hadj, prennent part au défilé malgré leurs divergences – le PCF n'est, à l'époque, pas favorable à l'indépendance de l'Algérie. Ils sont encadrés par leur propre service d'ordre que l'on reconnaît à son brassard vert.
Cette année le contexte est particulièrement tendu : les manifestations du 1er Mai ont été marquées par des violences policières ; celles de mai 1952 contre la venue en France du général américain Ridgway accusé d'utiliser des armes bactériologiques en Corée se sont soldées notamment par la mort de l'ouvrier communiste Hocine Bélaïd. À 15 heures, le cortège s'ébranle en direction de la place de la Nation avec à sa tête une banderole proclamant l'«Union pour la défense des libertés républicaines». L'on entonne une première Marseillaise, l'on exige la libération des militants communistes emprisonnés.
Quoi que la presse ne s'en fasse pas l'écho par la suite, l'on scande aussi du côté des messalistes des slogans favorables à une Algérie indépendante. Du côté de la rue Jacques-Cœur surgissent quelques parachutistes, de retour d'Indochine, qui provoquent et agressent les manifestants. Sporadiquement, ces «bérets rouges» qui le matin même défilaient sur les Champs-Elysées agressent les manifestants. Exfiltrés par les policiers, ils ne sont pas arrêtés. Vers 15 heures 30, une première averse estivale, violente et soudaine, sème un peu le trouble mais le cortège parvient tout de même aux alentours de 16 heures en bon ordre à la Nation où la manifestation doit se disloquer. Depuis la tribune où il prend place, le comité d'organisation salue les différents cortèges.
Tandis qu'une seconde averse, encore plus drue, s'abat sur la place de la Nation, la journée vire au cauchemar. Après son passage devant la tribune officielle, le cortège des messalistes se presse en direction de l'avenue du Trône où un camion attend les militants pour recueillir les drapeaux algériens et les portraits de Messali Hadj qu'ils portaient fièrement durant le défilé. Des rues adjacentes, des policiers fondent sur eux. Ces derniers s'acharnent à piétiner les portraits du leader indépendantiste. Eclate alors une première bagarre sous la pluie torrentielle. Surprises par la réaction belliqueuse des messalistes qui refluent malgré tout vers la place, les forces de l'ordre suppléées de gardes mobiles retournent à la charge tandis que la tribune est évacuée. Soudain, sans sommation, des coups de feu claquent.
«L'horloge monumentale, brisée à l'entrée du carrefour, est arrêtée à 17h20, où le premier coup de feu fut tiré», selon France Soir le 16 juillet. Dans la panique générale qui s'en suit, sous une pluie battante, les premiers blessés sont évacués vers les cafés où se réfugient aussi les manifestants effarés qui, comme les clients des cafés, se font frapper par la police. On appelle les ambulances pour transporter les blessés tandis que des médecins donnent les premiers soins. Avenue du Trône, un premier car de police est renversé et enflammé. Deux autres seront brûlés et une vingtaine endommagés. Bien que la traque des manifestants se poursuive jusque dans les cours d'immeubles et sur les quais du métro où les manifestants Algériens – ou qualifiés comme tel – cherchent refuge, un calme relatif revient à peine trente minutes après les premières échauffourées qui furent d'une violence inouïe.
Sept manifestants sont tombés sous les balles de la police, six Algériens et un Français : Amar Tabjadi, 26 ans, décédé à l'hôpital Saint-Louis ; Abdallah Bacha, 25 ans, décédé à l'Hôtel-Dieu des suites d'une balle reçue dans la gorge ; Larbi Daoui, 27 ans, tué d'une balle dans le cœur ; Abdelkader Dranis, 31 ans, décédé à l'hôpital Saint-Louis ; Mohammed Isidore Illoul, 20 ans, décédé à l'hôpital Saint-Louis ; Medjen Tahar, blessé par deux balles, décédé à l'hôpital Tenon et enfin Maurice Lurot, 40 ans, mort à l'hôpital Saint-Louis d'une balle dans le cœur. D'après le bilan officiel de la Préfecture de police, une soixantaine de policiers furent blessés à divers degrés. Le journal Combat indique le chiffre de quatre-vingt policiers blessés ; du côté des manifestants, outre les sept morts, le même journal recense quarante-quatre blessés.
Mais le décompte officiel de la Préfecture – quarante blessés par balles et sept morts – est certainement à réévaluer : de nombreux blessés, de peur d'être incarcérés, ne se rendent pas dans les hôpitaux et certains médecins ne les signalent pas. Dans les jours qui suivent, l'émotion est intense ; la presse s'indigne, comme par exemple l'Humanité, ou au contraire voue aux gémonies les Algériens agresseurs des forces de l'ordre : le Figaro du 15 juillet dénonce les communistes et les Algériens respectivement responsables et initiateurs des affrontements. Le PCF, tout en taisant les revendications indépendantistes des messalistes, invite à un meeting le 21 juillet au Cirque d'Hiver qui remporte un franc succès.
Le même jour, les corps des victimes algériennes sont transportés à la mosquée de Paris pour une cérémonie religieuse tandis que rue Duhesme, au local de la section du PCF à laquelle appartenait Maurice Lurot, une chapelle ardente est dressée en hommage aux sept victimes de la répression policière. Le lendemain, leurs corps sont exposés à la Maison des Métallos avant l'enterrement de Maurice Lurot au cimetière du Père-Lachaise et le transfèrement des corps des Algériens vers l'Algérie. Mais les brimades ne sont pas encore terminées : les corps de Larbi Daoui et Mohammed Isidore Illoul ne peuvent être rapatriés en Algérie pour des raisons administratives. Ils seront enterrés dans le carré musulman du cimetière de Bobigny.
Quant à Amar Tabjadi, si sa dépouille est bien parvenue en Algérie, l'Humanité du 26 juillet rapporte que son corps a été subtilisé à sa famille par des militaires français et enterré «à l'esbroufe». Tahar Madjeb sera inhumé à Guergour, Abdallah Bacha à Bahalil et Abdelkader Dranis à Nedrouma. Malgré quelques commémorations, le massacre du 14 juillet 1953 sera vite occulté dans les années qui suivent par ceux d'octobre 1961 et de février 1962.
Le 21 septembre 1995, le fils de Maurice Lurot écrivait dans le courrier des lecteurs de l'Humanité-Dimanche : «chaque année, alors que chacun danse, c'est les larmes aux yeux que je cherche un mot qui réchauffe dans l'HD [l'Humanité-Dimanche]. Chaque année, mon père est de nouveau assassiné par les camarades, par leur oubli».


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