Avec une douzaine de travaux exposés à la Galerie Ifru Design, Mohammed Bakli, dit Klimo pour les intimes, nous fait l'honneur du partage d'un seul pan de ses arts multiples. En effet, Klimo est plasticien, homme de théâtre, homme de mots entre poésie et écriture romanesque, il décline un curriculum pertinent qui nous laisse la peinture en pâture jusqu'au 11 avril prochain. Cet homme qui a côtoyé quelques grands comme Mesli, Arezki Larbi, Denis Martinez ou bien-même le théâtral Ziani-Cherif Ayad et le hip-hoper Kader Attou…fait montre d'une grande modestie qui tranche avec un talent immense en tant que coloriste en premier lieu et en abstractif qui, dans le lyrisme admis en la matière, reste un mentor du genre. Mohammed Bakli joue avec les textures, il les maitrise pour les rendre siennes, redoutable compositeur, il joue avec les formes, les virgules immenses, les calligraphies improbables, les calligraphies connues et ressassées, les pinceaux insolents et provoquants laissant souvent la part belle à des asymétries flamboyantes, qui «habitent» les supports et laissent l'interrogation émerger dans les compositions farouches, éloquentes emplies de couleurs orageuses qui tempêtent sur les supports comme de fortes ondées agitées. En effet, ce plasticien adopte des techniques expressionnistes en premier lieu, par les arêtes la contradiction voulue de ses formes quelques peu acérées qui peuvent être jugées agressives, mais qui adoptent des tons chauds pour nous balancer au visage quelques abruptes vérités. Ici un trait coupé par deux sortes de nœuds, portant une forme lourde, atténuée par des éléments graphiques, là une composition toute en verticalité, les touches en virgule dépassent leur fonction par le format choisi, elles deviennent du fait du peintre des calligraphies limites, juste posées là pour courir sur le support, et la saga continue sur des sentiers lumineux, avides de sens, mais le sens est gardé secret… Mohammed Bakli est un surprenant personnage né dans le Tafilelt mozabite, il grandit à l'ombre des palmeraies, mais s'en va suivre la piste du paternel qui gèrera un bain maure dans les rues d'Aïn Témouchent, il pousse dans le dessin et dans les années 1970 grandit dans son art, il était intéressant pour nous de suivre à la trace son parcours qui est le suivant pour les multiples raisons situées dans les lignes qui arrivent. Mohammed Bakli est donc plasticien, scénographe, professeur formateur et auteur. Il est né en 1957 à Tafilelt, à quelques kilomètres de Ghardaïa. Il est diplômé de l'Ecole des beaux-arts de Constantine, et ensuite de l'Ecole nationale des beaux-arts d'Alger (entre 1979 et 1983), quelques mois plus tard, il sera boursier de l'Académie royale des Beaux-arts de Bruxelles. Il séjourne à l'atelier Inder maure en Suisse, cela durant l'année 1988, et à l'atelier Rondot en France, de la période allant de 1989 à 1991. Dans ce grand parcours, il possède à son actif un bon nombre d'expositions personnelles, notamment à la salle El-Mougar (en 1981), à la salle Ibn Khaldoun (en 1986), et au Palais de la Culture d'Oran (en 1996). Il sera à la Casta Cegna italienne (en 1988). La Tunisie le verra passer par la ville de Sousse (en 2016). Duo avec l'artiste Merdoukh à la galerie Ezzou'Art à Alger lors de l'année 2013… Il participe à de nombreuses expositions : notamment à Alger : Centre Culturel Abane Ramdane (1984) aux côtés de Denis Martinez, M'hamed Issiakhem…, aux 7 villes 7 arts organisé en 2006 par le photographe Karim Abdesselam, en 2018 au Printemps des arts au palais de la culture Moufdi-Zakaria, à la galerie Arts en liberté, dans les années 2006 et 2007. Constantine l'accueillera au sein de la Maison de la culture et des arts en 1996 et à Besançon durant les années 1987 et 1996. Il signera un passage à Paris en 1990, à Marseille (en 1985), à Adrar et à Oran, précisément à l'ex-galerie Elfa en 1995. A Tipasa, il réalise une installation en hommage à l'écrivain journaliste assassiné Tahar Djaout en 1995 intitulé «Les bâtisseurs de ruines». Après cela et quelques années plus tard, il participe à une rencontre méditerranéenne entre 2007 et 2008. Il ira à Berlin exposer à la Grafik Studio galerie - Yeed en 2007 et aussi en 2010. Il sera présent aux cérémonies pour le patrimoine de l'humanité à Ghardaïa durant l'année 2007, et à la Biennale Méditerranéenne d'Oran de 2010, pour rallier ensuite la ville de Bordj Bou Arreridj en 2012, on le retrouvera la même année à la Rencontre Internationale d'Art Contemporain réalisée à Mostaganem (2012), et dans la ville de Ouargla en 2013. Ces pérégrinations artistiques le verront aller dans les villes de Sétif, Tizi Ouzou, Khenchela, Sidi Bel Abbès, Guelma, Mila, Cherchell, Annaba …. Il participe à une installation urbaine : «Triangle» (Lyon 2014). Il rejoint le collectif «Ini falastine » en solidarité avec le peuple Palestinien, la même année. Le voyage continue donc à New York, à Alger, et à Pancevo près de Belgrade en 2015. Acteur d'un jour, il a fait son apparition dans le film de Noureddine Bekkay, et de Tarek Téguia. On notera qu'en 2017, il est nommé par le ministre de la culture comme Commissaire du festival de la chanson et de la musique du M'zab. Il est membre de la fédération Arabe de la diplomatie culturelle, membre de l'union des écrivains algériens et des arts culturels UNAC, président de l'association des plasticiens amis du Mzab (1997-1999). Nombre de ses œuvre ont été acquises par plusieurs institutions notamment l'ambassade de Palestine à Alger, l'ambassade d'Algérie à Belgrade, le ministère de la culture, l'UNAC, l'école supérieure des beaux-arts en Algérie, le consulat d'Algérie à New-York, l'Hôtel de ville de Besançon, le Triangle humanitaire (Lyon), l'Association ARETE clair soleil (Besançon), mais aussi par des particuliers en Algérie, Argentine, Allemagne, France, Suisse et USA. Pas fatigué pour un sou, Mohammed Bakli a réalisé plusieurs scénographies pour des spectacles notamment pour le compte de la compagnie de Kader Attou «Accrorap». Il Collabore avec «Shop Vida» dans le domaine du design textile (USA)… Il réalise des travaux d'architecture intérieure notamment à Ghardaïa, Alger, Paris, (Beaumont de Lomagne) et Toulouse. Il crée des bas reliefs, des installations, il réalise une fresque avec les enfants issus de l'émigration au clairs-soleils (France) 1991, participe à SOS Somalie en 1992. Il est l'auteur de la scénographie pour la pièce théâtrale, «L'Eau le remporta sur la semoule » de Mohammed Islam Abbas montée en 1988 sur un texte de Salah Tirichine. Il reprendra la scénographie pour la pièce chorégraphiée de Hip-Hop «Prière pour un fou » toujours de Kader Attou, cela au Centre Chorégraphique du territoire de Belfort en France en 1999. Il est le coordinateur du projet «Masar I» sur la nationale I Alger-Ghardaïa. Il remporte plusieurs prix nationaux, on citera le premier prix des oasis en 1989, premier prix de la peinture non figurative en 1998 au festival de la Kalâa des Béni-Hammad… Honoré par plusieurs organismes notamment, Civ-œil d'Oran, la direction de la culture de Ghardaïa, de Bordj Bou Arreridj, par l'ARETE de Besançon, la ville de Metlili, Triangle humanitaire de Lyon… Il participe à plusieurs émissions de radio et de télévision depuis 1981. L'artiste à la personnalité engagée, ses actions dans le champ humanitaire, environnemental et social sont multiples, c'est pour cela que cet artiste aussi discret que talentueux vaut le détour, il sera encore un bout de temps pour une escale artistique sympathique, à rencontrer donc à tout prix du côté du Télémly. Exposition, «Les corps lumières», Mohamed Bakli, exposition visible du samedi 23 mars au 11 avril 2019 entrée libre au139 boulevard Krim Belkacem, Télémly Alger.
