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Ruines, écrans et mensonges…
Entre Ghaza, Alger et Paris :
Publié dans La Nouvelle République le 03 - 08 - 2025

« Si la guerre est le règne du mensonge, alors la paix commence par le rétablissement de la vérité. » Dans la guerre, il n'y a pas que les corps qui tombent. Il y a les vérités qu'on fusille, les récits qu'on viole, les mots qu'on enrôle.
À Ghaza, comme ailleurs, les bombes s'abattent sur les vivants, et les narrations sur les consciences. Car derrière chaque image, chaque déclaration, se livre un autre combat – plus feutré, plus insidieux : celui de la propagande.
Une vérité ensevelie sous les décombres
Depuis octobre 2023, Ghaza traverse l'une des pires tragédies humaines de notre époque. Selon les derniers rapports des Nations unies (juillet 2025), plus de 57.000 Palestiniens ont été tués, dont 28.000 femmes et filles, et plus de 1.370.000 personnes blessées, dont 40.000 enfants. 320 employés de l'UNRWA ont péri dans l'exercice de leurs fonctions. Plus de 150 journalistes ont été assassinés, un chiffre sans précédent dans l'histoire moderne du journalisme.
La bande de Ghaza n'est plus qu'un ossuaire à ciel ouvert, un charnier géopolitique où même les pierres pleurent. Un cimetière sans clôture, où les tombes n'ont plus de noms, seulement des chiffres et de la poussière. L'humanité y vacille sous les gravats, pendant que le silence complice des chancelleries transforme la tragédie en écho étouffé.
Et pourtant, à mille lieues de là, dans les studios bien éclairés de Paris, des éditorialistes bien nourris poursuivent leur chorégraphie verbale. Tandis que les enfants sont ensevelis sous le béton, la vérité, elle, est enterrée sous des tonnes d'euphémismes diplomatiques et de litotes médiatiques, ensevelie sous les décombres sémantiques des rédactions : niée, pliée, passée à la truelle du politiquement utile. À Ghaza, on tue, à Paris, on enjolive.
Le verrouillage médiatique : Crif, Bolloré, CNews et consorts
Ce grand écart entre la réalité brute et sa représentation polie n'est pas un accident de parcours, mais le produit d'une ingénierie du récit. Le verrouillage de la parole publique est devenu une science exacte : le doute y est semé comme du gaz lacrymogène, pour brouiller les pistes, neutraliser l'indignation et anéantir la conscience. Le dispositif est huilé comme une horloge suisse : une critique de l'Etat israélien ? Elle sera prestement recodée en antisémitisme, sans distinction entre droit et délire, faits et fantasmes. L'objectif n'est pas tant de convaincre que de rendre la critique inaudible. Pendant ce temps, les voix palestiniennes ou juives anticolonialistes sont reléguées aux catacombes de l'opinion, quand elles ne sont pas carrément radiées du réel. Les chaînes du groupe Bolloré, devenues des cathédrales de l'indignation sélective, diffusent des dogmes en boucle, comme une messe néo-coloniale.
Les grands prêtres du récit imposé s'y succèdent, l'écume aux lèvres, récitant leur credo : Israël est la lumière, Ghaza l'ombre, et la France, la vigie morale… tant que ses intérêts ne sont pas froissés.
Boualem Sansal :
d'écrivain à outil politique
Dans cette guerre des mots, certaines figures deviennent des marionnettes sans le savoir, ou pire : en le sachant. Boualem Sansal est de ceux-là. Jusqu'en juin 2024, il était Algérien. Quelques semaines plus tard, le voilà adoubé Français, non par une cérémonie républicaine, mais par une onction médiatique aussi bruyante que suspecte. Lorsqu'il est condamné par la justice algérienne pour atteinte à l'unité nationale, Paris s'émeut, brandit le calame outragé de Voltaire, et oublie, dans le même souffle, les milliers d'autres Français incarcérés dans le monde (2.297 selon le Sénat français, dont plusieurs condamnés à mort !…) sans provoquer le moindre frémissement de plume.
Pourquoi cette ferveur soudaine ? Parce que Sansal est devenu une arme blanche dans les mains de ceux qui manient la parole comme d'autres les grenades. Il crache sur son pays d'origine, et encense, sans nuance, la politique israélienne. Il est la preuve vivante que la propagande aime les écrivains, du moins ceux qui tournent leur plume dans le sens du vent dominant. Mais l'affaire Sansal dépasse l'homme. Elle sert un dessein plus large : celui d'un ministre de l'Intérieur en campagne anticipée, qui rêve d'Elysée comme d'autres rêvent d'un trône. Un César en costard-cravate qui joue à l'empereur gaulois, et pour qui l'Algérie n'est qu'un punching-ball électoral.
Alger–Paris : la tentation du clash
Le décor est planté : la République a trouvé son gladiateur. Et dans l'arène diplomatique, ce ministre-candidat avance à grands pas, sabre au clair, prêt à rompre les équilibres pour quelques points de popularité. Usant des médias comme d'un mégaphone de préfecture, il piétine les usages diplomatiques, empiète sur les prérogatives de l'Elysée et de son Quai d'Orsay, et jette l'Algérie en pâture aux sondages.
Chaque sortie est un coup de canif dans la fragile toile des relations bilatérales. Chaque interview, un projectile lancé à l'aveugle vers l'autre rive. L'Algérie n'est plus un partenaire : elle est un décor d'opérette pour ambitions personnelles.
Mais l'effet boomerang ne tarde pas. L'Algérie, loin de se prêter à cette dramaturgie bon marché, diversifie ses alliances, noue des partenariats avec l'Italie, la Chine, la Turquie, la Russie, les pays du Golfe. L'Hexagone, habitué à jouer les parrains, découvre avec stupeur qu'il est relégué au rang d'invité de dernière minute. Les privilèges d'avant-Hirak ? Balayés comme les miettes d'un banquet terminé. La France, qui pensait tenir la clef de la porte algérienne, découvre qu'elle n'est plus qu'un trousseau rouillé.
Chalghoumi et consorts : les visages instrumentalisés
Dans ce théâtre d'ombres, les « imams de plateau » tiennent lieu de figurants consentants. Hassan Chalghoumi, toujours prompt à dénoncer le Hamas mais jamais à pleurer les enfants de Rafah, incarne à merveille ce rôle de caution.
Il est là, à chaque convocation médiatique, fidèle au poste comme un porte-parole sans ministère. Il ne prêche pas, il répète. Il ne pense pas, il récite. Et lorsqu'il parle, ce n'est pas sa voix qu'on entend, mais l'écho d'un script déjà écrit.
Chalghoumi, c'est l'alibi parfait, c'est la barbe halal de la République, le certificat d'islam compatible estampillé Bolloré. Le visage de l'Autre qui dit ce que le pouvoir ne peut plus dire à visage découvert. C'est l'orientalisme recyclé en prime time. Un opéra grotesque où l'on convoque l'origine pour mieux étouffer la complexité.
L'information : un champ de bataille
À Ghaza, les bombes. À Paris, les bombes à retardement discursives. Là-bas, on ensevelit les corps. Ici, on ensevelit les faits. Deux violences parallèles qui convergent dans une même stratégie : effacer, normaliser, inverser. Les ONG, les juristes, les reporters indépendants crient dans le désert. Et les grands médias, confortablement installés dans leurs tours de verre, choisissent le brouillard plutôt que la lumière. Il est plus facile de douter que de dénoncer ; plus rentable de relativiser que de résister.
Ce que l'Histoire retiendra
L'Histoire jugera, comme elle l'a toujours fait. Elle relira les éditos et les unes de journaux comme on feuillette les archives de la honte. Elle décortiquera les silences comme autant de complicités. Elle pointera les noms. Et elle n'oubliera pas. Mais elle retiendra aussi les poètes, les juristes, les enseignants, les mères, les enfants, les journalistes, ceux qui ont dit non avec leur plume, leur voix, leur corps. Elle retiendra ceux qui ont tenu la vérité à bout de bras quand elle s'effondrait sous les gravats de la propagande.
Résister par la vérité
Être humain aujourd'hui, c'est refuser de se nourrir à la gamelle des récits préfabriqués. C'est oser appeler un massacre par son nom, même quand le mot fait trembler les puissants.
C'est rappeler qu'un enfant brûlé n'est pas une « erreur de tir ». Qu'un hôpital bombardé n'est pas une « zone grise ». Qu'un écrivain ne devient pas sacré parce qu'il insulte son passé, et qu'un ministre ne devient pas président en piétinant l'histoire des autres.
Résister, ce n'est pas hurler, c'est tenir. Tenir debout dans un monde qui se couche. Tenir le cap quand la boussole médiatique tourne à vide. Tenir la main de la vérité quand elle vacille.
Et si la guerre est le triomphe du mensonge, alors chaque regard lucide, chaque mot juste est un acte de paix. Mais dans le vacarme des propagandes, les mots s'usent, les vérités vacillent, les images deviennent otages.
Pourtant, quelque part, sous les ruines du langage et les gravats du réel, subsiste une promesse inflexible... Et pendant que les bombes tombent, certains débattent encore de la nuance entre « génocide » et « opération défensive ». L'Histoire, elle, n'a pas besoin de guillemets.« La vérité, comme la Palestine, ne se rend pas. Elle se terre, elle résiste, elle attend qu'on la nomme avec des mots qui ne trahissent pas. » (2)
Khelfaoui Benaoumeur
-MCA, Université Kasdi Merbah – Ouargla
1- Edward W. Said


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