Il y a des hommes d'Etat doués pour bâtir et défendre en toutes circonstances leur pays, autrement dit l'ordre social dominant. D'autres, au contraire, prédestinés uniquement à saborder leur nation. Le général de Gaulle appartient à cette catégorie d'homme providentiel. L'ancien employé de la banque Rothschild, Emmanuel Macron, vivant dans un palais présidentiel où le luxe le dispute à la luxure, appartient à cette engeance de «rois maudits» à la gouvernance vouée à saper l'autorité de l'Etat, ruiner l'économie de leur pays, paupériser leur peuple. Le général de Gaulle aura sauvé l'ordre bourgeois français à deux reprises : en 1945 et 1958. En 1944-45, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, dans une France chaotique menacée par la révolution sociale, le général de Gaulle, qui avait combattu au front européen contre l'armée bolchevique, comprend qu'il faut impérativement éviter la réitération de l'expérience russe : la transformation d'une guerre capitaliste en voie d'achèvement en révolution ouvrière. En effet, en 1944 l'inquiétude s'empare des puissants, tant au niveau national qu'international. Tous craignent le déferlement d'une vague révolutionnaire semblable à celle qui s'est produite en Europe entre 1917 et 1923. Les puissances impérialistes, effrayées par cette perspective révolutionnaire fatale, s'empressent de préparer l'installation en France d'un gouvernement militaire d'occupation constitué par des officiers britanniques et américains chargés d'administrer les territoires libérés. Toutefois, le général de Gaulle, déterminé à conjurer cette humiliation, la transformation de la France en protectorat contrôlé par des militaires américains et britanniques, parvient à s'imposer comme ultime recours pour instaurer une administration civile et militaire, contrôlée par le gouvernement provisoire qu'il dirigera avec ses alliés communistes (PCF) et socialistes (SFIO), sans oublier la droite démocrate-chrétienne (MRP) et le parti radical centriste. La France bourgeoise indépendante est, in extremis, sauvée. La bourgeoisie jubile. Après s'être accommodée du régime de Vichy et vautrée dans la collaboration avec les nazis, à partir du débarquement du 6 juin 1944, la bourgeoisie française, désormais sous la houlette de la gouvernance du général de Gaulle, s'engage dans une course de vitesse pour bâtir cet Etat salvateur afin d'éviter la désagrégation de la société entraînée par la fin chaotique du régime pétainiste. Et, surtout, dans un climat quasiment anarchique où les ouvriers sont pleins d'ardeur révolutionnaire, la menace de la révolution sociale menée par un prolétariat massivement armé. Dans les rues, l'heure est à l'arrestation des collaborateurs, et dans les entreprises à l'éviction des directeurs ou des patrons compromis avec l'occupant nazi pour les remplacer par des comités de gestion chargés de la direction de l'entreprise. Pour rappel, en 1944 la France est exsangue. L'activité économique est à l'agonie : les infrastructures détruites (ponts, ports, chemins de fer...), l'appareil industriel au point mort. Le nouvel Etat doit s'atteler à rétablir les voies de circulation, les approvisionnements en eau, gaz et électricité, construire des logements pour un million de sans-logis, redémarrer la production et assurer la survie de la population française famélique. Dès son intronisation, de Gaulle s'active pour rebâtir l'Etat et redémarrer la production. Pour ce faire, sur le volet économique, il s'appuie sur l'organisation syndicale la CGT afin de remettre les ouvriers au travail pour relancer l'industrie. Dès septembre 1944, Benoît Frachon, le secrétaire général de la CGT et membre du bureau politique du PCF, lance la « bataille pour la production ». Le capital français peut ainsi compter sur les organisations syndicales pour encadrer les travailleurs et, surtout, les persuader de consentir les plus grands sacrifices, c'est-à-dire fournir le maximum de productivité, tout en les maintenant dans les conditions d'existence les plus précaires et misérables. À l'heure de l'épuration, il est utile de souligner que le nouveau pouvoir bourgeois dirigé par de Gaulle ne remet aucunement en cause le pouvoir des grands capitalistes, à l'exception de quelques-uns notablement impliqués dans la collaboration. Dès la fin de la fin de 1944, le nouveau régime procède aux nationalisations (Renault, Houillères, secteurs de l'énergie, banques...). À cet égard, il est important de rappeler que ces nationalisations n'avaient aucune motivation politique socialisante. Si l'Etat bourgeois français nationalise plusieurs entreprises, notamment dans le secteur de l'industrie lourde, il s'agit d'entreprises fragilisées par la guerre, que leurs propriétaires capitalistes ne peuvent relancer faute de financement. Dans une France exsangue, l'Etat est contraint d'être ainsi directement ou indirectement l'entrepreneur principal et le financeur essentiel de la Reconstruction. Et sur le volet politique, il peut compter sur la collaboration du parti communiste français (PCF) pour rétablir l'ordre bourgeois afin d'assurer la transition. Le nouveau gouvernement qui comprend des ministres communistes, aussitôt formé, ordonne, pour neutraliser la menace de la révolution, le désarmement de la population, la dissolution des Milices patriotiques et l'incorporation des Forces françaises de l'intérieur (FFI) dans l'armée régulière. Sur le volet social, pour s'assurer ses bons et loyaux services en matière de contrôle social et d'encadrement des prolétaires aux fins d'éviter la montée révolutionnaire, la bourgeoisie française concédera au PCF, en dépit des difficultés économiques, la mesure d'instauration de la sécurité sociale. La hantise de la révolution (qualifiée de totalitarisme communiste), c'est-à-dire de l'effondrement de l'ordre bourgeois français, transparaît dans les Mémoires de guerre de Gaulle, ouvrage publié en trois tomes dans les années 1950. Dans le chapitre consacré à la Libération, Charles de Gaulle écrit : « Trois périls mortels nous attendent : l'inflation, le niveau intolérablement bas des salaires et de prix des services, la pénurie du ravitaillement. (...) Le pays, à la libération, compte tenu du déferlement psychologique que celle-ci doit entraîner, risquera simultanément : l'effondrement monétaire, l'explosion des revendications sociales, la famine. Pour le gouvernement, laisser faire et laisser passer ce serait livrer la nation à des troubles irrémédiables, car sous le choc de la libération l'inflation serait déchaînée et l'on verrait crouler toutes les digues. (...) Encore doit-on obtenir pour cet effort le concours des classes laborieuses, faute duquel tout sombrera dans le désordre et la démagogie. (...) Si l'on ne fait rien dans ce sens, on rendra inévitable le glissement des masses vers le totalitarisme communiste. Au contraire en agissant tout de suite, on pourra sauver l'âme de la France. D'ailleurs l'opposition des privilégiés ne se fera guère sentir, tant cette catégorie sociale est compromise par l'erreur de Vichy et effrayée par le spectre révolutionnaire. Quant à la résistance, elle est tout entière favorable à l'évolution ; les combattant, qui courent ensemble des périls semblables, étant enclin à la fraternité ». C'est-à-dire à la collaboration de classe. Au sortir de la guerre, au même titre que Pétain avec sa «révolution nationale» faisait croire, avec sa démagogie nazifiée, aux travailleurs qu'ils participaient à la construction d'une France fraternelle débarrassée des classes sociales antagoniques, de même de Gaulle, avec sa démagogie démocratique, fera croire aux ouvriers qu'avec la «France libre» ils œuvrent au relèvement et au rayonnement de la nation républicaine et sociale. En tout cas, il aura réussi à gagner l'adhésion de la population française à son projet de redressement national. Quoi qu'on puisse en penser, le général de Gaulle, en fin stratège étatique, aura réussi à relever le défi de la reconstruction nationale, en bâtissant un Etat fort appuyé sur une économie prospère garantie par une paix sociale durablement enracinée. En même temps que de Gaulle s'est employé à domestiquer, dans l'intérêt national, autrement dit la défense de l'ordre capitaliste, la bourgeoisie, en lui imposant une politique de redistribution sociale, il a amorcé le processus d'embourgeoisement des travailleurs par la généralisation de la consommation de masse. L'instauration de l'Etat- providence aura permis, grâce à l'amélioration des conditions de vie des Français, l'atténuation, voire la neutralisation, des antagonismes de classe. Dans les années 1950, la France, après avoir surmonté la crise économique et amorcé le «redressement national», plonge néanmoins dans une inextricable instabilité politique liée au fonctionnement de la IVe République et à la guerre d'indépendance de l'Algérie. À l'époque, Charles de Gaulle n'est plus au pouvoir depuis 1946. Il s'est retiré de la politique depuis 1953, date de la mise en sommeil de son parti le Rassemblement du peuple français (RPF). La crise institutionnelle culmine le 13 mai 1958, à la faveur du putsch des militaires d'Alger, qui fondent un Comité de Salut public présidé par le général Massu. Ce comité réclame un pouvoir politique fort et capable de les soutenir fermement dans la guerre contre les combattants indépendantistes algériens. La France est menacée dans son existence. Alors que Paris bruisse de rumeurs de débarquement militaire en métropole, dès le lendemain, le 14 mai, Massu sollicite de Gaulle pour dénouer la situation de crise. En tout cas, comme en 1944, le Général de Gaulle se positionne en sauveur suprême du régime républicain, autrement dit de l'ordre bourgeois menacé de dislocation. Dans sa conférence de presse du 19 mai, le général de Gaulle fustige le régime des partis et pose le cadre de nouvelles institutions. Sans avoir au préalable désavoué aucunement le coup d'Etat militaire, le Général se déclare « prêt à assumer les pouvoirs de la République ». Le 27 mai, de Gaulle annonce avoir « entamé le processus régulier nécessaire à l'établissement d'un gouvernement républicain capable d'assurer l'unité et l'indépendance du pays ». Profitant de la «crise algérienne», prenant acte de l'agonie de la IVe République, de Gaulle annonce sa décision de rédiger une nouvelle constitution pour la France. Une constitution conforme à ses ambitions présidentielles au pouvoir illimité. C'est la naissance de la Ve République. Ainsi, en quelques jours, comme en 1944, le génialissime général de Gaulle réussit le tour de force de surmonter la crise institutionnelle et de sauver la République, notamment par le changement, en un tour de main, comme un prestidigitateur, des institutions et en créant une nouvelle République, la Ve République. Dans la foulée, le généralissime de Gaulle est investi Président du conseil par une Assemblée nationale désormais domestiquée, puis président de la France par un peuple français pâmé d'admiration, débordant de vénération pour son patriarche républicain galonné. Ainsi la population française est rassurée par le retour au pouvoir du Général, posé en sauveur. Enfin, de Gaulle va couronner ses succès politiques par la fin de la guerre d'Algérie et la reconnaissance de son indépendance. L'instauration de la Ve République et la fin de la guerre d'Algérie permettront à de Gaulle de mener sa politique de «grandeur» pour redonner à la France le statut de grande puissance. Quatre-vingts ans plus tard, son successeur, Emmanuel Macron, par sa politique économique et sociale irresponsable, précipite la France dans le sens inverse. Vers le déclin et la révolution. Vers le retour de l'instabilité politique et institutionnelle, c'est-à-dire la IVe République. Nul besoin d'insister sur la faillite de la gouvernance macronienne qui aura sabordé, en quelques années, toutes les réalisations économiques, sociales et politiques bâties par de Gaulle. De Gaulle, sur les ruines de la France libérée en 1944, aura réussi le tour de force à bâtir une nation riche. Macron, hissé au pouvoir à la tête d'une nation opulente, aura précipité, à force d'enrichir les puissants, sa ruine. En tout cas, la seule porte de sortie de la crise que propose Macron est la guerre. Ironie de l'histoire, si de Gaulle aura été l'homme politique de la fin des guerres et de l'amorcement de la prospérité économique de la France. Le président maudit, Macron, c'est tout le contraire. Macron, l'employé de banque Rothschild propulsé par calcul à l'Elysée, est l'homme de l'amoncellement des catastrophes sociales, faillites financières et débâcles politiques. Sa régence bonapartiste marque la fin de la prospérité de la France, de la stabilité institutionnelle. Et, surtout, le début des guerres. Mais Macron, plus exactement la classe bourgeoise qui l'a hissé à l'Elysée, trouvera sur sa route la Révolution, ce spectre que de Gaulle s'est employé avec succès à juguler.