Ils se savent qu'ils ne servent d'une part qu'à enjoliver une façade voulue républicaine et agrémenter aussi l'anonymat ou l'oisiveté lucrative de la leur. Qu'ils soient deux éléments dénivelés d'une grande chambre que l'on appelle communément assemblée, sénat ou parlement ; elle n'a pu, la grande chambre avoir, depuis sa formation, l'impact attendu. Considérée comme un contre pouvoir dans le principe sacro-saint des constitutionnalistes relatif à la théorie de la séparation des pouvoirs, elle n'avait pu remplir qu'une fonction d'un organe nécessaire dans le tissage d'un Etat. Avec ou sans prérogatives, cette assemblée composée reste caractérisée, dans ses membres, par l'esprit de courtisanerie face au pouvoir en place. De mémoire, elle n'aurait fait obstacle à l'élan exécutif, d'aucune autorité. En pleine tourmente de la catastrophe nationale (vacance de pouvoir, manque d'autorité, terrorisme, séisme, fraude électorale, injustice, déposition et inégalité de cadres, mutineries, rébellions, suicides, accidents routiers, criminalité, drogue, dépravation, corruption, etc.) notre auguste cénacle n'adoptait qu'une seule démarche entérinée par des questions orales. Ce fut une séance de bonne récréation. Son utilité relève bien d'autres considérations devenues maintenant objet à grand débat et qui doit aller à la profondeur des choses. Sa composition de même. Les deux tiers sont une opération de tractations outrageuses à la Ould Abbès ou à l'accidentel Bouchareb et à la Ouyahia. Le tiers manquant et pas du tout bloquant, une cooptation, un rachat ou un rêve toujours pendu pour ceux qui savent fermer la bouche et hisser la main. Ce tiers-présidentiel est une imposture dans la logique de la représentation populaire et une rente viagère pour certains qui ont eu des mandats à forte répétition. Le président intérimaire en est un exemple. Avec ou contre le Hirak, les sénateurs viennent de rejeter la levée d'immunité réclamée par le ministère de la Justice à l'encontre de deux de leurs pairs. Cette attitude qui ne pouvait se faire, il y a quelques mois, reste compréhensible si l'on prend toutefois la réaction prophylactique des membres prévenant ainsi d'ouvrir le bal à une prochaine série de demande de levée de ce privilège. L'instinct de sauvetage, de survie était seigneur dans les bancs de l'hémicycle. Dans la dimension juridico-politique, l'immunité peut être protocolaire dans tous les cas et totale uniquement du fait d'activités, d'expression ou de faits exclusivement politiques. Griller un feu rouge, même au motif d'une réunion urgente au Sénat, libeller un chèque sans provisions même au profit de son parti ou financer une opération électorale restent punissables. Déclarer publiquement son opposition à une feuille de route, un projet de loi ou marcher chaque vendredi et hurler son refus c'est tout ce qu'il y a de plus légal dans son appui et que la loi solennelle devra renforcer. Et puis la prochaine constitution doit, à l'aide de tout mécanisme, garantir la protection de tout élu dans l'exercice de son mandat. Il ne peut y avoir de sélection ou de préférence entre les différents niveaux de la représentativité populaire. Un élu communal dans une p'tite municipalité juchée là-haut dans la montagne ou logée dans le noyau central de la capitale peut faire l'objet de pression, de convocation ou d'intimidation du fait aussi de son exercice. S'opposer à un Zoukh était un blasphème. Pour dire que l'élu local n'est qu'un naufragé dans la tête de certains walis encore en poste. Ainsi la réalité vient de démontrer qu'un sénateur ne sert à rien, juste à se protéger. Il n'est pas promu à ce rang par des électeurs. Entre eux, il existe bien une douteuse passerelle. Le deuxième collège. A ce propos l'un de ces sénateurs zélé, narquois, audacieux, fanfaron, goulu et avaricieux avait dit un jour à un citoyen emporté qui croyait l'accoster pour régler l'un de ses multiples problèmes : « C'est pas toi qui m'a élu, ce sont tes élus qui l'on fait ! » cinglante réplique du citoyen : « tu en étais bien l'un d'eux, et si tu te sens grand, tu seras tout aussi petit dans quelques années comme tu l'as toujours été ». Pas de levée d'immunité donc à Zeghmati de jouer sur un autre plan. L'imprescriptibilité jusqu'à la déchéance ou fin de mandat. Le bras de l'Etat est long, disait un apparatchik effacé des écrans.