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Macron, un projet constitutionnel populiste
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 17 - 12 - 2020

Les constitutions dans les régimes autoritaires ne servent à rien sinon à enrober l'inacceptable dans un costume à apparence juridique et démocratique, je ne les commente jamais.
En revanche, il est des projets de révision constitutionnelle dans les autres horizons politiques qui sont également un moyen de diversion politique. Celui que propose le Président Emmanuel Macron en est la parfaite illustration.
Nos anciens professeurs de droit constitutionnel, Georges Vedel (celui dont la place à l'Académie Française a été attribuée à notre glorieuse Assia Djebar) et Maurice Duverger, devraient boucher leurs oreilles dans leurs tombes suite à l'annonce du projet constitutionnel du Président Emmanuel Macron car ils mourraient une seconde fois.
De quel projet s'agit-il ?
Le Président de la république vient, avec fracas, d'annoncer aux membres de la Convention Citoyenne pour le Climat qu'il allait organiser un referendum pour introduire dans la constitution l'obligation d'une politique visant à respecter l'environnement.
Une annonce qui aurait pour but de remettre sur les rails les obligations signées lors des accords de Paris (COP 21, conférence internationale sur le climat) et qui n'avaient pas vu l'ombre d'un début de réalisation.
Cette idée semblerait à beaucoup une excellente proposition visant à s'attaquer enfin au véritable défi auquel est confrontée l'humanité. Effectivement, personne ne pourrait critiquer un tel projet dans son fond.
Oui mais voilà, si le droit est sous l'autorité du politique quant à son écriture, il ne se laisse pas si facilement emprisonné dans l'enthousiasme et les ficelles de ce dernier, à moins de s'abandonner aux bras des populismes.
Essayons de tenter un argumentaire sur le fond avant de revenir sur les grossières ficelles de cette annonce fracassante.
La lutte contre la pollution n'est pas un objet juridique
Le sentiment, le concept, la morale, la doctrine ou l'objectif politique ou économique ne sont pas des objets juridiques. Ils n'ont pas de matérialité suffisante pour être circonscrits dans une rigoureuse définition et contrôlés pour leur bonne conformité et application de la norme juridique fixée.
Ils sont fondamentaux en amont du processus législatif ou constitutionnel, c'est eux qui impulsent et battissent les fondements du droit mais il ne sont en aucun cas transcris dans le droit dans la forme de l'enthousiasme des emportées lyriques du discours politique et des rêves de la société. En tout cas, ils ne sont pas une précaution pour placer le droit dans son indispensable clarté et rigueur, dénué de sentiments et de slogans.
Bien entendu que leur inscription sous cette forme est toujours possible mais ils ne seraient que de pure forme. Et lorsque le droit est tenté de jouer avec ce genre d'artifice, soit un écran de fumée, il n'est pas loin de donner opportunité aux citoyens de l'ignorer et d'enlever tout sens au texte constitutionnel.
Car ce qui ne fait pas l'objet d'une définition rigoureuse ne peut être appréhendé par le droit.
C'est comme si on inscrivait dans la constitution que le peuple doit être gentil, que les oiseaux doivent chanter ou que la soupe soit chaude.
Il en est de même pour les objectifs politiques ou économiques. Ils relèvent du débat et du combat politique mais pas d'un ordre juridique. Une norme juridique doit être définie, claire dans ses manifestations et pouvoir être interprétée dans les cas de son application ou pour juger de sa transgression.
Comment définir une lutte contre la pollution ? Sur quel critère la juger et qui contrôlerait sa conformité à la règle constitutionnelle ? Qui déterminerait l'atteinte des objectifs ?
L'objectif politique est conçu par le pouvoir exécutif qui relève du choix majoritaire exprimé dans les urnes après que l'opinion publique ait été impulsée par les partis politiques, les experts et toutes sortes d'intermédiations possibles, comme l'instruction et l'information libre.
Qui contrôlerait la légalité constitutionnelle ? Un conseil constitutionnel fait partie du pouvoir judiciaire, il vérifie et sanctionne la non conformité au texte des rédacteurs (donc des hommes politiques élus), il ne crée pas la loi ni ne l'exécute. Il ne peut être partie et juge.
Déclarer constitutionnel l'énoncé d'une liberté ou la procédure d'une institution, de son fonctionnement et de ses décisions ne peut être possible que s'ils possèdent un caractère objectivement observable. Qu'en serait-il d'une politique pour l'environnement ?
L'inscription du droit à la grève, de la liberté d'opinion ou de celle de circuler ont des manifestations bien objectives et on peut juger de leur non application. Une institution qui ne respecterait pas la procédure de nomination ou de fonctionnement prévu par le texte constitutionnel serait une manifestation de droit observable dans sa conformité ou non.
La démocratie directe, un mythe aussi ancien que la Grèce antique
En démocratie, ce sont les représentants du peuple qui « font la loi » par réponse à l'expression de la diversité dans le débat et de la majorité dans le vote. Ce vote s'exprimant pour des représentants choisis par les citoyens, à condition que le choix soit libre et éclairé.
C'est ce qu'on appelle la démocratie indirecte, celle qui est la plus efficace et la plus répandue car on ne peut faire voter des dizaines de millions de personnes pour un projet politique ou un texte de loi.
Le processus de dynamisation et de démocratie profonde est en revanche l'affaire des partis politiques, des associations, des humeurs collectives, des écrits des érudits ou des scientifiques qui organisent et impulsent le choix politique de chacun, dans une diversité foisonnante et qui se termine, au final, dans la solitude et la liberté du choix individuel par le bulletin de vote.
La constitution française précise dans son article 3 « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum. ». Elle prévoit ainsi le référendum, soit une forme de démocratie directe. La décision d'Emmanuel Macron est donc parfaitement compatible avec la démocratie mais nous verrons plus loin ses désagréments lorsque le référendum n'est pas organisé pour des projets sérieusement réfléchis et calculés dans ses risques, en plus de ce qui a été dit précédemment.
La démocratie directe a ses charmes, parfois utilisée couramment comme l'éternel exemple suisse, mais elle a ses limites, souvent dangereuses. Le mythe du forum et de l'agora dans la démocratie grecque n'est qu'une vue de l'esprit.
Tout d'abord par l'argument que nous avons déjà précisé, l'impossibilité d'organiser le débat au niveau de la nation de cette manière. Puis, il ne faut jamais l'oublier, la Grèce antique n'a été démocratique que dans le fantasme de la mémoire collective.
Sous une apparence lyrique et mythique du débat se cachait une nation épouvantablement ségrégationniste et une société dont les valeurs étaient entièrement marquées par la noblesse de la guerre et de la conquête territoriale, souvent à l'intérieur de la nation elle-même.
La démocratie directe, sans précaution et garde-fous, c'est le risque de l'expression de la violence des sentiments, des rancœurs et des extrêmes. C'est l'ouverture sans filtre aux bas instincts et aux refoulements. C'est la démocratie de la rue qui, lorsque le régime n'est pas une dictature, représente le plus grand danger pour la démocratie.
Et lorsque le régime est autoritaire, c'est le champ ouvert à tous les populismes dont la définition est de dénoncer l'élite comme une cible à contourner ou à éliminer. Une terrible tentation pour les grands dictateurs sanguinaires qui utilisent les bas instincts et la frustration pour mieux régner en maîtres.
Bien entendu qu'avec le Président français nous sommes loin de ce cas de figure, très loin.
Mais dans les démocraties, la tentation est toujours présente d'utiliser un brin de populisme pour atteindre son objectif politique ou de faire diversion.
Quel est l'objectif de cette tentative de diversion ?
Alors que la pandémie est au pic de son effet désastreux et que les autorités sanitaires et gouvernementales sont dans une panique monstre et que l'économie est dans un tunnel d'endettement vertigineux, le Président de la république ne trouve rien d'autre à proposer ...qu'un referendum sur la politique du climat.
C'est comme si, dans une terrible catastrophe provoquée par des inondations dévastatrices, on proposait une compétition de Kayak pour susciter l'optimisme des esprits et les encourager à surmonter le drame. Comme le Président Macron n'a pas perdu l'esprit, il y a donc bien une explication à cette incongruité. Et lorsqu'un homme politique intelligent se lance dans ce genre d'élucubrations, c'est qu'il y a toujours, pas loin, des élections.
Il avait crée cette institution, la Convention Citoyenne pour le Climat, avec des membres tirés au sort, comme un camouflet aux élus de la république, parce que le mouvement mondial pour la préservation de l'environnement avait explosé dans le monde, particulièrement par l'extraordinaire participation et expression des jeunes citoyens de toutes nationalités.
Mais pour faire peur à un homme politique et lui faire prendre conscience, il faut aussi des dangers plus proches, plus palpables. Emmanuel Macron les a perçus avec la montée fulgurante du mouvement politique du parti écologiste français dont la côte de popularité comme des résultats électoraux n'ont jamais été aussi élevés.
Contesté par son silence sur les questions écologiques lors de sa campagne électorale, rien de plus trompeur que créer cette Convention, inutile et populiste. Mais lorsque le premier enthousiasme de ces personnes tirées au sort, ce qui est le comble de la démocratie, s'est dissipé, ils se sont aperçu que leurs propositions n'avaient été reprises dans le dispositif législatif que dans la portion minuscule de leur dimension, alors la grogne a pris le relais.
Et lorsque la grogne est là, pour un sujet si sensible que l'écologie, une nouvelle grande force politique, il faut une décision à la hauteur du risque politique. Le référendum en est une, en tout cas un pari du Président de la république qui croit qu'elle en est une.
Un risque en boomerang
C'est incroyable ce que les gens dotés d'une très grande intelligence, ce qui est véritablement le cas pour le Président Macron, peuvent perdre le sens du discernement et de la mémoire lorsque le pouvoir politique, qu'ils ont recherché avec force et talent, leur échappe.
Le plus inconnu des citoyens, sans être un analyste en droit ou en sociologie politique, sait que le référendum, arme suprême de la cinquième république, s'est toujours retourné contre ses initiateurs. Ce fut le cas pour le Président De Gaulle qui en avait fait l'alpha et l'oméga de la démocratie et qui a perdu son poste pour l'avoir manipulé en croyant en faire un avantage contre la grogne post 1968. Ce fut le quatrième référendum1 de De Gaulle, un de trop.
Depuis le referendum pour l'indépendance de l'Algérie ou celui de l'instauration de la cinquième république en 1958 (et celui se sa modification en 1962) les citoyens n'ont jamais plus (1 Un mot latin ne prend pas d'accent sauf s'il est utilisé dans sa traduction française. J'ai volontairement utilisé les deux cas même si l'accent est nécessaire dans un développement sur la politique, donc en version française. C'est un clin d'oeil pédagogique aux jeunes lecteurs.) répondu dans un referendum à la question qui leur était posée mais à la personne qui leur a posé la question. Et comme les referendums sont proposés, par nature et par calcul politique, pour un sujet controversé ou pour dévier l'attention des problèmes et des troubles du moment, le boomerang revient vers les initiateurs.
En conclusion, la démocratie est beaucoup plus difficile à manier dans ses tentatives de détournement que pour les régimes autoritaires qui se nourrissent et survivent par des rideaux de fumée et de slogans.
Le référendum est toujours justifié pour des questions institutionnelles, sociales ou économiques lourdes et après une confrontation politique des représentants du peuple ainsi que le débat entre les diversités des opinions, Il ne saurait être utilisé pour « le choix de la couleur des rideaux de l'Assemblée Nationale », comme le disait mon regretté professeur Georges Vedel, à l'Institut d'Etudes Politiques de Paris.
*Enseignant


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