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Orient-Occident, où sont les frontières ?
Publié dans El Watan le 28 - 04 - 2005

Parmi les plus anciennes, celles de Saint Sever (Xe siècle). La plus remarquable demeure la carte catalane de 1375. Ce n'est qu'au XVIe siècle que des cartes plus complètes furent établies. Faites par des gens du Vieux-Monde, elles ne pouvaient avoir pour orient que ce qui est à leur est, et pour occident ce qui est à leur ouest. On ne pouvait d'ailleurs pas tracer un trait séparateur en dehors de l'immense surface qu'occupe le Pacifique, sinon ce trait aurait toujours traversé une terre quelque part. Alors, inutile d'essayer de bouleverser le monde, l'Orient restera orient et l'Occident occident. On sait où commence l'un et où se termine l'autre ; mais cela devient beaucoup moins clair lorsqu'on se demande où finit le premier et où commence le second. Nous serions bien embêtés, si on venait à nous demander de tracer des frontières entre les deux. L'orient est un concept qui a été forgé en Europe : en France, en Angleterre et en Allemagne, tout particulièrement. En terre germanique, Goethe lui a donné pignon sur rue et Mozart l'a mis en musique dans La Flûte enchantée. Avec Les Lettres persanes, Montesquieu offre à la société française la couleur très orientale du Sérail d'Usbek, à Ispahan. L'orient était alors très à la mode depuis les récits de voyages de Tavernier (1676-1679) et de Chardin (1711). L'exotisme est piquant mais demeure artificiel et silencieux. Il devient familier, palpable, visible, durant la période coloniale, et l'Algérie est le pays le plus proche. Il n'y a qu'à traverser une mer et en ligne droite. On vient voir s'extasier devant des paysages inhabituels, et on expérimente.
C'est ainsi, par exemple, que le site de Constantine a été décrit par Alexandre Dumas dans Le Véloce, par Guy de Maupassant dans Au Soleil, par Théophile Gautier dans L'Orient (titre plutôt étrange lorsqu'on sait que Paris et Alger sont traversés par le même méridien), par Georges de La Fouchardière dans Au Pays des chameaux et Louis Bertrand dans Les Villes d'or et dans Africa. On en vient à se demander si ce qui est orient n'est pas tout simplement toutes ces contrées aux mœurs, aux coutumes et aux institutions «étranges».
Y a-t-il un seul orient ?
Si nous regardons vers l'Est européen, celui des Balkans, les fils de l'histoire s'entremêlent à merveille. Elle est faite d'héritage byzantin via la langue ou la culture slave, la religion orthodoxe, mais aussi d'influence turque et musulmane, elle-même en partie héritière de Byzance et de la Grèce, elle-même venue d'Asie et peut-être, pour une part aussi, d'Egypte et de l'Islam arabe. De Saint Pétersbourg, Varsovie, Prague ou Budapest à Istanbul, Bursa, Ankara, Damas, Palmyre ou Jarash, les vestiges sont là pour nous convaincre des richesses spirituelles et culturelles de ces pays et de cet Orient. L'orient du Moyen-Age est tout aussi complexe. Bien avant l'arrivée des Croisés en terre de Palestine – et même si la cohabitation était dans la tolérance et la bonne entente (les trois religions monothéistes étant nées dans cette même région du globe)-, il y avait querelle autour du Livre et de la langue de la Bible, la traduction de celle-ci dans la langue sacrée du Coran, démêlés de l'Islam avec le judaïsme mais aussi avec le christianisme, avec les héritages gréco-latins. Les filiations occultes depuis Abraham et les ruses de l'histoire ont tout embrouillé et les colonisations de notre ère sont venues compliquer la chose à ravir. Venise fut aussi héritière de Byzance, elle est l'empire chrétien d'Orient et la porte de l'empire ottoman, lui-même héritier de Byzance et de l'Islam. La Perse et la civilisation arabe furent aussi l'incarnation de cet Orient mythique aux yeux des Européens.
Migrations civilisationnelles
L'empire ottoman qui occupa l'Europe jusqu'aux portes de Vienne (Poitou-Charente), la Perse et l'empire arabo-berbère qui fonda Cordoue, Séville et Grenade jusqu'en 1492, constituèrent l'Orient avant d'être relayés par l'Inde, le Japon et la Chine. Edward Saïd n'a qu'en partie raison de dire que le concept d'orient est le masque de la volonté impérialiste de l'Occident car celui-ci est aussi un lieu mythique imaginaire de rencontres, de désir, de convoitises et d'affrontement. C'est aussi ce qu'exprime Salman Rushdi dans ses romans. A mes yeux, Abdelwahab Meddeb a le grand mérite de rétablir des filiations philosophiques interrompues des deux côtés, entre Orient et Occident, et de montrer qu'il y a historiquement de l'occident dans la pensée d'orient et que l'orient arabe est présent dans la constitution de la pensée occidentale. Les héritages ont été niés des deux côtés, ouvrant ainsi un fossé d'incompréhension, de contradictions et d'affrontement. La reprise de ces héritages croisés rend possible la constitution des problématiques communes et la reconnaissance des identités et des différences. La modernité n'est pas le masque de l'impérialisme occidental mais un bien commun à l'orient et à l'occident ainsi qu'un problème pour le christianisme comme pour l'Islam. Pour le petit exemple, le dialogue (et le conflit ?) entre l'Orient et l'Occident sont au cœur de Constantine, dans son nom lui-même et dans son histoire. Comme l'écrit A. Meddeb – un homme à la pensée téméraire, ambitieuse et profonde – : «En introduisant l'héritage de Cordoue et d'Ispahan à l'intérieur de l'Europe, nous changeons la substance même de l'orient et de l'occident. Cette polarité gagnera en relativité et en universalité dès qu'on saura qu'elle a agi au sein de l'Islam, lequel ne pourra plus être assimilé à un Levant exclusif, irréductible à l'Europe. L'introduction de la civilisation islamique dans le Vieux Continent trouverait toute sa légitimité dans la bonne part occidentale qu'elle porte. Et son inscription dans l'identité européenne peut aider, sinon à défaire l'intégrisme, du moins à atténuer son impact. Car ce sont l'exclusion et le déni qui font croître l'intégrisme. Il importe de ne pas laisser l'Islam prospérer comme une entité en laquelle s'identifieraient tous les exclus du monde.» (in Face à l'Islam, Paris, Editions Textuelles, 2004. pp.193-194)
L'exemple
Orient et Occident s'entremêlent et se confondent chez Averroès (Ibn-Roshd). Il est arabe et musulman européen, non seulement par sa naissance, mais aussi par son étrange destin. «Sa descendance philosophique et spirituelle fut essentiellement européenne, chrétienne, juive, latine, hébraïque. C'est lui qui rendra emblématique l'articulation entre foi et raison, laquelle constituera une étape de la pensée pour ceux qui se vouent à l'exercice intellectuel dans le cadre d'une vérité révélée. Dans sa descendance européenne sera invitée la notion de la double vérité qui va contribuer à la séparation et à l'autonomie des champs, enclenchant le long processus qui conduira jusqu'à la laïcité (…) Nul doute que c'est en lui que nous reconnaissons l'ancêtre plausible de tout prétendant qui se réclame à la fois d'Islam et d'Europe ou qui agit pour réaliser le désir d'être arabe européen.» Où se situent donc les frontières entre l'Orient et l'Occident ?


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