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« L'Algérie a besoin d'une politique culturelle qui s'autofinance »
Lyes Salem (Acteur réalisateur)
Publié dans El Watan le 24 - 07 - 2009

Un téléfilm avec Ariane Ascaride, une série avec Bachir Deraïs, une émission de cinéma sur TV5… Après le succès de Mascarades, Lyes Salem n'arrête plus. Entre la France et Algérie, l'acteur réalisateur fait le pont entre les deux rives de la Méditerranée et pose un regard décalé sur la politique culturelle en Algérie.
Les journées sont chargées en ce moment pour vous : vous tournez actuellement à Marseille et à partir du mois d'août, vous serez à Alger.
Oui, je suis actuellement à Marseille où je tourne dans un téléfilm pour France 2 avec Ariane Ascaride. La comédienne fétiche de Robert Guédiguan passe à la caméra et m'a proposé de jouer dans Ceux qui aiment la France, un conte social, l'histoire d'une famille algérienne, des immigrés clandestins débarqués à Marseille. Ce sont des enfants qui tiendront les rôles principaux. Moi, je joue le rôle du père de famille. Au mois d'août, direction Alger où je dois jouer pour la série de cinéaste algérien Bachir Deraïs, une série policière de six fois une heure, relatant les péripéties du Commissaire Loeb dans l'Algérie d'aujourd'hui. C'est Yasmina Khadra, auteur de l'œuvre, qui a signé le scénario. La série sera tournée à Alger et Oran et j'incarne un inspecteur de police. La série sera diffusée sur l'ENTV.
Et à la rentrée, vous animerez une émission sur le cinéma sur TV5 Monde…
Oui. TV5 m'a proposé d'animer une émission sur le cinéma où mon rôle sera de mettre en valeur les réalisateurs du Sud. En tout, il y aura quatre émissions en septembre consacrées aux sorties cinéma et DVD qui peuvent intéresser la rive sud de la Méditerranée. J'ai carte blanche. Il est clair que l'on ne parlera pas de la énième sortie de Batman, j'ai envie de faire découvrir Khorma (la bêtise), le premier long métrage du réalisateur tunisien Djilali Saâdi, sorti en 2004, un véritable bijou. Il raconte l'histoire d'un jeune homme orphelin à Bizerte qui détonne par la rousseur de ses cheveux. Un peu attardé, il apprend son métier de prieur pour les morts. C'est une fable sur la différence. Nous allons également suivre la sortie DVD du film de Teguia qui fait un beau parcours et l'on s'intéressera aux tournages en cours au Maghreb, notamment celui du réalisateur tunisien Nouri Bouzid.
Et qu'en est-il, selon vous, de l'industrie du cinéma en Algérie ?
Le problème en Algérie, c'est que l'on a besoin d'événementiel (comme le Panaf' ; Alger, capitale de la culture arabe) pour investir dans la culture. La solution n'est pas là. On ne peut pas faire de la culture tous les deux ans et ne rien faire le reste du temps. Il nous faut une politique culturelle au jour le jour. J'entends par là une politique culturelle qui s'autofinance sur l'année. En Algérie, il existe une institution : le Centre national de cinématographie et de l'audiovisuel (CNCA) qui a besoin d'être entretenu financièrement. Mais par qui ? Par une industrie cinématographique qui n'existe pas…
Pourquoi ? Le cinéma en Algérie n'est pas une activité rentable ?
Normalement, un pourcentage doit être délivré au CNCA par cette industrie cinématographique (producteurs, distributeurs, exploitants…) pour faire vivre l'institution. Mais à l'heure actuelle en Algérie, quand un producteur met de l'argent sur la table pour un film, il risque de ne jamais le récupérer, et cela même si le film marche à merveille. Faute de distribution, car faute de salles de cinéma, etc. C'est un problème économique grave. J'ai connu cela avec Mascarades en Algérie. Le film est financé à 80% en France et pris en charge dans un réseau de distribution efficace, c'est pour cela que l'on a pu s'en sortir. Mais je rappelle que c'est un film algéro-algérien, avec une culture, des personnages, un paysage purement algérien, et il aurait dû être financé à 80% par l'Algérie et non par la France. On voit bien le risque de dépendance vis-à-vis de la France. Mais je reste optimiste. Ces événements comme le Panaf' sont positifs à condition de ne pas faire l'autruche le reste de l'année. Il faudrait que l'on s'inspire du modèle français ou marocain en matière d'industrie cinématographique. Nos voisins, qui ont un système économique viable, ne sont pas si mauvais en la matière.
Vous poursuivez votre carrière en France. Faut-il s'exiler pour réussir au cinéma ?
Je suis parti en France à l'âge de 15 ans pour des raisons familiales. Ma mère est française catholique et mon père algérien musulman. Je ne me suis pas exilé, je suis le fruit de deux cultures. Vous savez, à l'origine, Mascarades était un besoin de ma part d'accaparer l'Algérie… Quand j'ai tourné ce film, c'était avant tout pour affirmer mon algérianité. Je suis français mais je suis aussi algérien. Ce retour à son origine, je le remarque tous les jours chez les jeunes de banlieue. Ils ont besoin de se ressourcer, de s'identifier. Cela ne veut pas dire pour autant qu'ils vivront en Algérie… La plupart d'entre eux restent deux mois en vacances l'été et veulent repartir aussi vite chez eux en France, parce qu'ils ne sont pas habitués à la vie au pays mais à leur vie occidentale. Ils ont une double culture, comme moi. Je le vis davantage comme une richesse supplémentaire que comme un handicap dans la vie. Ce n'est pas tous les jours évident, mais j'assume pleinement cette double culture et surtout mon algérianité.
Comment peut-on décrire la vie quotidienne en Algérie, en saisir les subtilités dans une fiction quand on ne vit pas dans le pays même ? Puisque vous êtes en France, est-ce possible d'abord ?
Tout d'abord, je suis né et j'ai grandi à Alger. Ce n'est pas non plus l'endroit qui m'est le plus inconnu sur cette planète. Mes premiers moments de joie et de tristesse m'ont été offerts par ces bords de mer et ces corniches. Mais quand je réfléchis un peu plus sérieusement à cette question, j'en arrive toujours à la même conclusion : l'éloignement (ou exil, bien que ça ne soit pas du tout mon cas) est une notion très proche de la mémoire. Comme je suis parti, je me souviens de ce que j'ai laissé derrière moi. Je m'en souviens parfaitement, puisque se sont figés dans ma mémoire des évènements, des odeurs, des bruits… auxquels je me raccroche quand la nostalgie me prend. Et puis je crois aussi que justement, comme je suis parti, j'ai besoin de me réaccaparer ce pays que j'ai quitté très jeune, à un moment aussi où entre moi et l'Algérie, il y avait mon père. La vie a fait que mon père a disparu et il fallait que je me réapproprie ce pays et cette langue. Raconter des histoires, c'est ce que je sais faire, c'était une manière de dire comme tout ça m'avait manqué. Et puis je ne suis pas si étranger que ça au quotidien de l'Algérie puisque j'y suis à peu près six ou sept fois par an. Et quand je n'y suis pas, je vis le quotidien à travers ma famille, mon frère ou mes cousins par exemple qui vivent à Alger (vivent le portable et Internet !). Je crois que l'éloignement que j'ai vécu avec ce pays a, d'une certaine manière, affûté mon regard sur le monde. Bien sûr, comme je vis en France, c'est un regard qui risque d'être teinté d'« orientalisme » (au sens où l'entend E. W. Saïd)… J'en suis conscient. J'essaye d'être vigilent. Et je me bats farouchement contre cet orientalisme qui tend à représenter les Orientaux (le monde arabe, quoi) par des Occidentaux convaincus de leur supériorité. Mais ce qui m'étonne, c'est pourquoi on ne pose cette question qu'aux artistes qui sont inspirés par l'Algérie, leur pays natal ou d'origine. Seraient-ils moins légitimes que ceux qui sont allés faire des formations dans les camps en Afghanistan et qui sont revenus en criant qu'on ne faisait rien comme il fallait ?
En France, on a souvent cantonné « l'Arabe » aux rôles du délinquant, du sportif ou du rappeur… Est-ce que le cinéma français a mûri en la matière, vous propose-t-on d'autres rôles que ces rôles clichés ?
Une société, c'est un peu comme un escargot par certains aspects : ça avance mais lentement. C'est le cas ici si on doit parler des rôles qu'on propose aux Français d'origine maghrébine. Mais je veux être optimiste. Les choses avancent dans le bon sens. Non qu'il y ait de moins en moins de « beurs de service », mais c'est qu'il y a surtout de plus en plus de cinéastes qui veulent se poser les vraies questions et qui sont sinon inspirés, en tout cas intéressés par cette partie de la population française. J'en veux pour exemple le dernier film de Jacques Audiard (Un Prophète) qui offre un très beau rôle à un jeune « beur » et qui pose une question intéressante à la société française et au racisme latent qui la menace encore. Pour ma part, je viens de terminer en mai un film (Suerte de Jacques Séchaud), un polar où le rôle qui m'a été offert se caractérise plus par l'amitié qu'il développe à l'égard d'un des personnages principaux que par ses origines. Le mois prochain, je tourne un autre film (Des Filles en noir de Jean-Paul Cyvérac) dans lequel le rôle qui m'est attribué s'appelait au départ le docteur Dorval et qui est devenu le docteur Kateb (en hommage à Kateb Yacine…). Donc oui, je crois que les choses évoluent dans le bon sens. Mais je voudrais surtout dire que l'on doit cette notion de « beur de service » en partie à un complexe bien défini : celui de l'ancien colonisateur. Et ce complexe d'ancien colonisateur ne disparaîtra pas, du moins pas tant qu'il y aura un complexe d'ancien colonisé pour lui faire écho.
Bio express
Né en juillet 1973 à Alger, il suit une formation d'acteur en 1998 au Conservatoire national supérieur d'art dramatique, joue Shakespeare, Molière, Büchner ou Ostrovski dans quelques-uns des principaux théâtres nationaux. En 2001, il réalise son premier court métrage, Jean-Farès, qui fait l'objet de nombreuses sélections en Festivals nationaux et internationaux. Avec son deuxième court métrage, Cousines, tourné à Alger, il obtient le césar du meilleur court métrage 2005. Mais c'est avec Mascarades, son premier long métrage (2008) qu'il rafle le plus de récompenses : meilleur film au Festival international du film du Caire, Grand Prix au Festival des cinémas d'Afrique du pays d'Apt, meilleur film au Festival d'Angoulême, prix du public et du public jeune au Festival de Namur, prix meilleur premier film et du public jeune au Festival de Carthage, meilleur film au Festival du film de Dubaï…


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