Signature d'un mémorandum d'entente pour la commercialisation des produits d'ACS en Mauritanie    Arkab reçoit le Vice-président exécutif du groupe énergétique norvégien "Equinor"    Installation d'un nouveau DG à la tête de l'Organisme national de contrôle technique des travaux publics    Agression sioniste contre Ghaza: l'UE appelle à un cessez-le-feu immédiat    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'élève à 34.735 martyrs    Espagne: le Maroc fustigé pour non-coopération dans la lutte contre le trafic de drogue    Khenchela: Merad inspecte au sud de la commune de Babar le périmètre agricole de Cosider Agrico    Belkacem Sahli réitère son intention de prendre part aux présidentielles du 7 septembre    Recensement de l'agriculture à Mostaganem Réunion de préparation avant le jour «J»    Répression Comment le système judiciaire esclavagiste américain renfloue les caisses des oligarques    « Ils menacent d'envahir Rafah, nous leur promettons l'échec et la défaite »    Une manifestation à Paris prônant la fin de l'agression israélienne    Ligue 1 Mobilis : Les présidents de clubs souhaitent un aménagement équilibré du calendrier    Abdelhak Benchikha de retour, et des interrogations    Coupe d'Algérie 2023-2024 : les résultats complets des finales    La révolution des nouvelles technologies de l'information au sein d'un monde super-médiatisé et le rôle du journaliste et de l'intellectuel    «Pour des produits adaptés aux besoins des citoyens»    «Je suis une femme de terrain pas des réseaux sociaux»    Déplacements périodiques et inspection des projets    Enfin un toit pour 4.122 familles    Le Zimbabwe accueillera le premier Forum de l'ONU    La Lune, ses influences, son pouvoir magique…    Décès du journaliste Abdelhalim Atik : la Direction générale de la communication à la Présidence de la République présente ses condoléances    Protection civile : la coopération avec la Tunisie " doit être appliquée davantage sur le terrain "    Le Premier ministre s'entretient avec le vice-président du Conseil présidentiel libyen    "Médias algériens: Réalité et Perspectives", thème d'une Conférence du RND    L'ANR appelle à une forte participation aux présidentielles du 7 septembre prochain    Le sommet de l'OCI félicite l'Algérie pour l'inauguration de Djamaâ El-Djazaïr    Mois du patrimoine: le 9e Festival national de la création féminine célèbre les costumes et les bijoux algériens authentiques    Natation/Championnats d'Afrique Open: l'Algérie décroche six nouvelles médailles, dont trois en or    Sétif: une pléiade d'artistes et de réalisateurs à l'ouverture des Journées internationales du cinéma    Le wali honore la presse locale    A Monsieur le président de la République    Recueillement à la mémoire des martyrs de l'attentat terroriste de l'OAS du 2 mai 1962    Grand prix de cyclisme de la ville d'Oran : Nassim Saïdi remporte la 28e édition    AG Ordinaire du Comité olympique et sportif algérien : adoption des bilans et amendement des statuts    La protesta estudiantine occidentale face aux lobbies sionistes.    Megaprojet de ferme d'Adrar : « elmal ou Etfer3ine »    ALORS, MESSIEURS LES DIRIGEANTS OCCIDENTAUX : NE POUVEZ-VOUS TOUJOURS PAS VOIR LES SIGNES ANNONCIATEURS DUN GENOCIDE A GAZA ?    Témoignage. Printemps Amazigh. Avril 80    Le Président Tebboune va-t-il briguer un second mandat ?    L'imagination au pouvoir.    Le diktat des autodidactes    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Ils revendiquent la régularisation de la Pension complémentaire de retraite: Sit-in des mutualistes de la Sonatrach devant le siège Aval    Coupe d'afrique des nations - Equipe Nationale : L'Angola en ligne de mire    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Les Algériens sont-ils racistes ?
Publié dans El Watan le 15 - 11 - 2012

Dans un bus allant de Bab Ezzouar à Alger, elle tance sa fille : «Tais-toi, sinon j'appelle ‘‘el kahloucha'', la Noire assise là-bas. Regarde-la, elle est laide !» La femme noire dont il est question, en djellaba et foulard rose, fait mine de ne pas entendre. La fillette se blottit dans les bras de sa mère, certains passagers esquissent un sourire et l'autobus slalome sur l'autoroute menant à Alger afin de contourner les embouteillages.
Mépris, insultes, agressivité et humiliations quotidiennes sont le lot des Noirs en Algérie. Attaher, étudiant nigérien vivant en Algérie depuis trois ans, porte un regard lucide sur son pays d'accueil : «Au début, nous étions bien accueillis, puis les choses ont changé. Le problème réside surtout dans le fait qu'on ne côtoie pas beaucoup d'Algériens, nous vivons reclus. Du coup, il y a beaucoup d'incompréhensions de part et d'autre.» Ceci dit, assure-t-il, les actes racistes sont très rares.
Pendant qu'Attaher s'adresse à l'auteure de ces lignes, près de la cité universitaire de Bab Ezzouar, des moqueries fusent. L'un des jeunes persifleurs justifie ces railleries par le fait que les Africains qui vivent dans les cités universitaires ont, eux aussi, des comportements répréhensibles. Il dit le mot «Africain» comme s'il s'agissait d'un continent complètement étranger. L'africanité de l'Algérien lui est, semble-t-il, complètement inconsciente.
Moi Africain ? Jamais !
«Etes-vous Africains ?», interrogeons-nous. «Non, nous ne sommes pas Noirs, juste un peu bronzés.» Notre interlocuteur prend soin d'énumérer tous les clichés véhiculés sur le continent : «L'Afrique, c'est la misère, les guerres, la famine. El hamdoulilah, grâce à Dieu, nous ne sommes pas dans ce cas de figure !»
Malgré les apparences, assure Hocine Abdellaoui, sociologue, l'Algérien n'est pas raciste. «Non l'Algérien n'est pas raciste, mais il peut avoir des comportements hostiles qui peuvent paraître racistes», explique-t-il. Il souligne : «Dans notre imaginaire, l'étranger, c'est le colonisateur venu pour nous exploiter et accaparer nos biens.»
Le panafricanisme prôné par le président Boumediène a disparu sous les cendres. Le Festival panafricain, c'était en 1969, autant dire il y a un siècle. Et les tentatives du président Bouteflika de faire renaître ce sentiment sont restées vaines. Le dernier Panaf' organisé en juillet 2009 n'avait pas la même saveur. Tout au plus cela a-t-il été considéré comme un grand carnaval durant lequel des Africaines défilaient à moitié nues dans les rues d'Alger.
«Lorsque nous étions étudiants, au milieu des années 1970 et que les dirigeants algériens ont invité les étudiants africains à venir en Algérie, il n'y avait plus de place dans les cités universitaires. Nous n'avons pas protesté car nous étions fiers de les accueillir dans notre pays», raconte Hocine Abdellaoui. Force est d'admettre que les temps ont changé.
Une étude réalisée par l'Association pour l'aide, la recherche et le perfectionnement en psychologie (Sarpp), traitant de la situation des migrants subsahariens en Algérie, renvoie une image peu flatteuse de nous-mêmes. Les migrants y utilisent des qualificatifs particulièrement durs pour signifier leur perception des Algériens. A leurs yeux, ils seraient racistes ou xénophobes, agressifs, désagréables, méprisants et malintentionnés. Les appréciations positives représentent moins de 21%.
Plus violente encore est la manière dont ils croient être perçus par les Algériens : misérables avec près de 29% de fréquence, esclaves (près de 18%), sous-hommes (12%), étrangers, trafiquants, animaux, porteurs de maladies et enfin mal éduqués. Les appréciations positives ne dépassent pas 8,2%.
Noureddine Khaled, psychosociologue ayant dirigé cette étude, impute toutefois ces jugements au fait que les migrants en situation irrégulière en Algérie, comme dans d'autres pays, vivent des situations très difficiles. «Quand ils ont la chance de trouver du travail au noir, ils sont exploités et n'ont aucun droit. Ils sont pour la plupart mal logés, mal nourris et harcelés par la police puisqu'ils n'ont pas de titre de séjour en règle. Cette situation explique en grande partie la perception négative qu'ils ont de l'Algérie et des Algériens. Certaines associations font beaucoup d'efforts pour les aider, mais cela restent très insuffisant au regard de l'importance de leurs besoins», nous explique-t-il. Noureddine Khaled souligne, par ailleurs, que les comportements dits xénophobes ou racistes viennent de préjugés et s'expriment envers des minorités perçues comme physiquement ou culturellement différentes de la population dominante.
Ces minorités peuvent être perçues comme dangereuses ou menaçantes : ils menacent nos emplois, apportent les maladies, apportent la drogue, etc. Ces préjugés sont souvent faux, mais sont entretenus par la rumeur et la désinformation relayées parfois par certains médias.
Quid des Noirs algériens ? Il n'y a pas de débat sur la diversité en Algérie. Les Algériens issus de la communauté noire sont pratiquement absents aux postes de responsabilité et dans les rangs supérieurs de l'armée. Le fait est que, bien que les Noirs algériens ont été, dès l'indépendance de l'Algérie, sensibles au message égalitaire et anti-esclavagiste de l'ex-parti unique, le FLN, l'inexistence d'une classe moyenne noire a rendu difficile leur promotion politique.
Le Sud est perçu comme un territoire sous-administré, comme en témoignent les récurrentes actions de protestation dans la zone pétrolifère de Ouargla, où les jeunes s'insurgent contre le fait de recruter des habitants du Nord pour travailler dans les entreprises situées au Sud.
Hocine Abdellaoui fait remarquer que «les gens du Sud sont de plus en plus hostiles envers ceux du Nord». Il cite pour exemple l'une des prisons du sud du pays dans laquelle les responsables sont tous originaires du Nord : «L'hostilité envers les gens du Nord devient un réflexe.» Par ailleurs, comme l'explique le sociologue Alain Blin dans un document, vieux de plus de 30 ans mais qui reste d'une actualité saisissante, l'Algérie est le pays ayant accueilli le plus petit nombre d'esclaves noirs, selon les estimations de la traite transsaharienne. Il serait ainsi le moins «noir» des pays du Maghreb.
Crise identitaire
Mais le racisme algérien, réel ou supposé, n'est pas dirigé uniquement contre les Noirs. Le match ayant opposé l'Algérie à la Libye le 14 octobre au stade de Blida a donné une très mauvaise image de notre pays. Il a aussi mis à nu le fait que les Algériens ne retiennent de ce pays, avec lequel ils partagent une frontière de près de 1000 kilomètres, que les truculences du dictateur déchu. Le psychosociologue Noureddine Khaled considère que ce qui se passe dans les stades relève d'un autre registre, celui de la rivalité entre deux équipes qui s'affrontent et qui font écho à une rivalité entre deux régions ou entre deux pays. Pourtant, force est de constater que les mots utilisés sont particulièrement virulents. Les comportements hostiles deviennent plus visibles lors des crises. L'exemple le plus édifiant est la crise diplomatique entre l'Algérie et l'Egypte suite au match de qualification à la Coupe du monde.
«Le fait est que les Algériens ont une attitude hostile au point que certains comportements sont à la limite du racisme : les Chinois sont des mangeurs de chats, les Egyptiens sont des amateurs de fèves, les Marocains sont adeptes de la sorcellerie, etc. Ils adoptent ainsi un comportement distancié en collant des étiquettes», observe Hocine Abdellaoui. Il ajoute : «Les Libyens sont devenus nos égaux après la révolution, c'est pour cela qu'on les attaque. Nous sommes à la recherche d'un positionnement par rapport à l'autre.»
Le fait est, par ailleurs, que la violence est devenue plus palpable ces dernières années. «C'est que les jeunes d'aujourd'hui n'ont plus peur de dire tout haut ce qu'ils pensent. Ceux des anciennes générations refoulaient leur violence, les jeunes l'affichent sans crainte», précise Hocine Abdellaoui.
Complexe face à l'Européen
La xénophobie dans la société algérienne, si elle existe réellement, n'est pas dirigée contre «l'Occidental». Plus beau car blond aux yeux bleus, plus riche car payé en devises et plus compétent, son seul défaut serait, selon une idée répandue, qu'il ne soit pas musulman. «On ne développe pas de sentiment de rejet envers des minorités quand certains facteurs sont absents : perception de danger, perception de menace, sentiment de rivalité», souligne Nouredine Khaled. En revanche, les comportements hostiles peuvent apparaître en cas de crise ou d'atteinte à la dignité. «Là, l'Algérien aura une attitude de rejet. Le fait est que cela est intimement lié à la perception qu'il se fait de lui-même. Cela est symptomatique de la construction qu'on fait de notre propre identité. On veut se placer par rapport à l'autre», justifie Hocine Abdellaoui. A l'en croire, les actes assimilables au racisme ne sont que le reflet d'une crise identitaire en Algérie.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.