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Panama, le canal et… le paradis fiscal
Escale dans un pays latino-américain partagé entre les quartiers misérables et la ville moderne
Publié dans El Watan le 25 - 11 - 2009

Réticence et hésitation tels ont été notre lot d'incertitudes quant au voyage que nous nous proposions d'effectuer au Panama, car en face il y avait la présence quasi-certaine du spectre de la grippe A. En plus, la médiatisation à outrance des méfaits de cette pandémie mettait un frein à notre désir de visiter ce beau pays, le Panama. Les communiqués de l'OMS, aussi, n'étaient pas sans nous dissuader de franchir la porte d'une quelconque compagnie aérienne. Mais la « redjla », la curiosité et l'amour pour la découverte de la planète ont eu le dessus. Plusieurs plans de vols s'offraient à nous, cependant, nous avions pris option pour un direct à partir d'Amsterdam.
Après 12 heures d'avion sans escale, nous atterrissons à l'aéroport Tocumen à Panama City. Il fait déjà nuit. Nous subissons le premier contrôle de notre passeport algérien, il semblerait que le code de notre pays soit inconnu. Le second policier des frontières, une femme, posent des questions, parfois même étranges, bref, le chef entre en scène. Il disparaît une vingtaine de minutes avec le document. Puis, l'estampille d'entrée au pays est apposée. A nous le Panama, crions-nous, enfin ! Juste à la sortie, un kiosque et à la une du journal El Periodico, un titre attire notre attention : « Les défilés commémoratifs peuvent être suspendus à cause du virus ». Vraiment, la chose est sérieuse ici, avons-nous pensé. C'est le début des regrets. Le taxi fonce vers l'hôtel California, au centre-ville. Rien à voir en dehors des lumières des gratte-ciels. Il fait chaud et humide.
Tolérance et violence
Le premier réveil au Panama se fait un peu tard, il est vrai que le décalage horaire de six heures demande un certain temps d'adaptation. Le petit-déjeuner à l'hôtel est déjà clos. On nous indique un autre lieu pour prendre un café. Juste à la sortie de l'hôtel, nous empruntons à gauche, la « calle 43 », soit la rue 43. Il faut savoir qu'au Panama, les rues et avenues portent soit des numéros soit des noms de pays ou villes étrangères. Après avoir trotté quelques dizaines de mètres dans cette allée bordée par de très hauts cocotiers, un son bien de chez nous nous parvient à l'oreille. D'une maison peinte en vert, s'échappait des psalmodies du Saint Coran, en somme du « tadjwid » de haute facture. Stupéfaction ! L'édifice mitoyen à cette demeure, n'est autre que « La casa de oracion cristiana », c'est-à-dire la maison de prière chrétienne. A une vingtaine de mètres, la synagogue Sinaï se dresse dans le même prolongement. Bel exemple de tolérance. D'ailleurs, questionné, le musulman d'origine indienne d'Asie, se prélassant dans son jardin, nous dira : « Ici, on vit en harmonie, chacun de nous pratiquant sa religion dans la paix. Ce qui prime pour nous c'est le respect d'autrui. » L'idée d'une virée en ville nous taquine.
Mais, retour à l'hôtel pour s'informer car les dépliants touristiques et autres revues ne donnent pas les détails que l'on souhaite. Omeida, la réceptionniste, nous sort un plan de la ville et commence à faire des cercles avec son stylo sur certains quartiers. « Ici pas question d'y aller parce que vous ne reviendrez jamais », dira-t-elle avec un sourire bien ironique. Les quartiers sont Curundu, Chorillo, San Miguel, soit une demi-douzaine de zones extrêmement dangereuses. Nous le saurons par la suite, quand le chauffeur de taxi refuse de nous conduire vers ces lieux, malgré le prix de la course doublé. Aussi, la chaîne TV ECO, nous apprendra, quotidiennement, images à l'appui que plusieurs assassinats ont lieu dans ces endroits où des bandes y règnent et règlent leurs comptes à longueur de journées et de nuits, nombreux sont les innocents qui en font les frais. On nous propose de voir le récent film Vida Loca du français Christian Poveda, tué à San Salvador, après avoir terminé le tournage sur les Maras 18 et les bandes rivales, cela, pour avoir une idée de la violence instaurée dans les favellas latines. On achète, à un dollar, une copie sur CD.
Après son visionnage, il n'est même plus question pour nous de passer dans les parages de ces bourgs où seules les balles et la drogue ont droit de cité. Mais notre devoir de reporter a fait titiller notre grande curiosité. Un policier, chauffeur de taxi à ses heures de repos, nous propose de nous y emmener pour jeter de loin un coup d'œil sur Curundu. Le langage des tags nous renseignent sur l'esprit des bandes tel que : « Je suis né pour être persécuté », « Même le pantalon, ils me l'enlèvent », ou « La mort c'est la liberté ». Quelques photos prises à la hâte et retour express.
Tourisme à l'américaine
En effet, Panama City est une ville partagée en deux, les quartiers misérables et sales ou favellas et la ville moderne avec ses gratte-ciels, ses avenues immenses, ses jardins fleuris, ses monuments, ses centres commerciaux et ses voitures somptueuses. Pour imaginez le décor, c'est comme un costume-cravate mis sur un corps crasseux et des sous-vêtements en haillons. Pour déjeuner, on nous conseille « El mercado de los mariscos » (Le marché des fruits de mer). Au rez-de-chaussée, sur d'innombrables tables en marbre, du poisson, des océans Atlantique et Pacifique, de toutes sortes et de tous calibres, ainsi que des fruits de mer sont exposés à des prix pas chers. Au premier étage, des restaurants, spécialités produits de mer, vous régalent. A titre d'exemple, un immense plat, avec une grosse langouste, du calamar, des crevettes royales, des langoustines et des moules à moins de six dollars, est proposé à environ 450 DA. Ce qui nous frappe, c'est que depuis notre arrivée, nous n'avons vu aucune personne porter un masque contre la grippe A. Seuls, des distributeurs de gel alcoolisé ou de lingettes accrochées aux murs des grandes surfaces, restaurants ou hôtels nous font rappeler qu'il y a certaines mesures d'hygiène à prendre. Dehors, la pluie tombe comme des cordes du ciel. La saison des pluies va de mai à fin décembre nous dira-t-on. Mais le mois le plus arrosé est celui d'octobre.
Chaque jour que fait le bon dieu, vers 13h des nuages gris-noirs assombrissent la ville, puis les coups de tonnerre se multiplient et c'est l'averse. La circulation ralentit, les rues et routes sont inondées pour une à deux heures au maximum. Nous avons appris qu'il y a deux options, soit choisir ce moment pour déjeuner, soit aller faire du shopping dans les grands centres commerciaux. D'ailleurs, on vous l'avoue, ce n'est pas cher du tout. Dans la banlieue, vers la partie sud-ouest de la ville, entre la baie de Panama et l'entrée du canal, les Gringos, comme on aime les appeler ici, ont relié par des voies artificielles trois petites iles, celles de Naos, Perico et Flamenco. Un véritable vivier touristique. Nous choisissons la Isla Flamenco, celle qui se trouve au bout de la langue de terre et en pleine mer, pour avoir une vue complète sur le littoral de Panama City qui s'étire au loin. Le décor de gratte-ciels, buildings et édifices vitrés donne l'impression que l'on est en face de New-York. Un petit port de plaisance abrite une cinquantaine de luxueux yachts. Des bus déversent des centaines de touristes américains. Les uns vont aux restaurants perchés au-dessus de l'océan, d'autres font la queue pour faire un tour sur des bateaux mouches, certains louent des tricycles pour se promener et le reste rejoint le Duty free shop. C'est un monde fabriqué pour les touristes américains et quelques autres étrangers comme nous.
Le canal de Panama
Les nombreux bateaux, qui se croisent à une centaine de mètres de ce lieu paradisiaque, entrent au canal de Panama en provenance de l'océan Pacifique alors que d'autres en sortent. A vrai dire, avant de voir ce canal, nous n'avions aucune idée du titanesque travail qui a été réalisé pour le construire sur une longueur de 81 km. Une visite au centre de Miraflores s'impose pour assister au passage de bateaux. Nous prenons l'option de visite totale à huit dollars, à savoir séance cinéma, musée, guide et mirador pour observer les bateaux. Nous apprendrons qu'à partir de 1884, pas moins de 19 243 travailleurs, sous les ordres du français Ferdinand de Lesseps, ont participé à la construction du canal, en enlevant plus de 250 millions de mètres cubes de terre. Un tour au musée, nous fera découvrir sur des photos, des travailleurs en tenue arabe, ‘« seroual loubia » et turban blanc. Sans équivoque, des concitoyens ont été enrôlés sous le label de la nationalité française. Plus de la moitié de ces travailleurs de l'extrême sont morts suite aux épidémies de fièvre jaune, dengue hémorragique, paludisme ainsi qu'aux nombreux glissements de terrain. Le 7 janvier 1914, la première embarcation fit la première traversée et les américains commencèrent à en assurer le contrôle.
Aujourd'hui et depuis exactement le 31 décembre 1999, le Panama assume la responsabilité totale de l'administration. Dès qu'un bateau s'engage dans le transit, il est pris en charge par les experts marins panaméens pour lui assurer un passage remorqué à l'aide de locomotives électriques, dans un espace de 32,31m de largeur, avec un dénivellement de 26 m entre les océans Pacifique et Atlantique. Le système a été judicieusement étudié pour transvaser plus de 197 millions de litres d'eau douce dans des écluses et permettre aux bateaux de faire la traversée en 12 heures, au lieu de 3 à 4 semaines pour contourner le continent sud- américain. Nous saurons qu'un seul bateau algérien a effectué la traversée du canal en 2008.
Le paradis fiscal, les indigènes et le président
Si le Panama possède une vanne financière grâce au canal qui rapporte au pays quelque 1500 millions de dollars par an, une autre voie lui permet de récolter de très grands dividendes grâce à sa zone commerciale libre. Effectivement, dans la région de Colon, sur la côte Atlantique, toute une zone, s'étendant sur plusieurs hectares, est réservée au commerce de gros avec l'avantage de ne pas payer les taxes. Tout ce commerce est tenu par des arabes et des juifs. Là, pas d'algériens, nous nous sommes renseignés. L'unique entité qui se dénomme « Argelia International » est dirigée par des arabes qui ne sont pas algériens et qui de surcroît lancent des appels pour recruter des travailleurs pour…. L'Algérie. Nous les avons appelés par téléphone, mais aucun dirigeant n'a voulu nous parler. Le seul algérien, résidant au Panama, est originaire de Tébessa et a un petit commerce. Nous n'avons pas pu le rencontrer.
Il faut savoir, par ailleurs, que le mois d'octobre a réservé une grosse surprise au Panama, puisque l'Organisation pour la coopération et le développement économique (l'OCDE) a exercé une pression sur ce paradis fiscal, obligeant des pays, comme la France, à retirer les filiales de ses banques. Avec cette décision les panaméens verront sûrement leurs caisses s'alléger. Cela ne sert pas le président panaméen, Ricardo Martinelli, qui vient de boucler ses 100 jours de gouvernance. Il est cependant très apprécié par son peuple et les diverses opinions que nous avons pu récolter auprès des chauffeurs de taxis, vendeurs, agents d'hôtels ou enseignants lui sont très favorables. Cependant, sur un autre volet sociopolitique, il semble que le vent qui a soufflé sur le Venezuela, la Bolivie ou l'Equateur, ait touché le Panama, car par pur hasard, nous sommes tombés sur une manifestation devant la présidence, d'indigènes ngäbes, en tenue traditionnelle.
Ils revendiquent leurs droits et leurs conditions d'autochtones légaux. Ils demandent avant tout que la date du 12 octobre ne soit plus une date commémorative heureuse mais plutôt de deuil national, car jusqu'à aujourd'hui elle commémore la découverte de l'Amérique en 1492 et est considérée comme jour de l'hispanité. Sur leurs banderoles, les slogans sont assez révélateurs : « Pourquoi fêter si avec ces gens nous avons perdu notre culture et notre langue », et « Leur découverte s'est traduite par massacres, vols et viols ». Ces autochtones étaient là également pour dénoncer et exiger de différer les projets miniers et hydrauliques sur leurs terres. C'était beau à voir, c'était comme au carnaval avec toute cette panoplie de tenues indiennes, de parures et de tatouages. Mais ce qui plaisait le plus, c'était de constater que l'histoire, à un certain moment, se réveille et donne lieu à des revendications légitimes. Nous rejoignons l'hôtel avec le sentiment d'avoir découvert un pays avec ses spécificités et ses diversités. Le lendemain, nous quittons le Panama sous une pluie diluvienne. Sur la route de l'aéroport, Juan, le chauffeur de taxi, nous montre les dizaines de gratte-ciels non habités et d'autres en construction. Il nous dira : « C'est l'argent des narcos des années 1980 ». Et voilà que l'histoire recommence.


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