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Cinéma. Trois algériens au « cannes » du court : Poète, paon, sans-papiers
Publié dans El Watan le 06 - 02 - 2010

A cette 32e édition du Festival international du court-métrage de Clermont-Ferrand, l'Algérie n'a pas manqué le coche. Focus…
La ville est enneigée. Nonchalance des pas, architecture moderniste, jeunesse conséquente, cités universitaires à la puissance 10. Au beau milieu de ce fourre-tout culturel, le « Cannes » du court-métrage mérite amplement son surnom, tant les films de tous horizons affluent ici et là. Un film sur les zombies, un autre qui traite des décibels, plus loin quelques films allemands largement influencés par la symétrique kaurismakienne et vers la gauche, quelques courts fennecs. Parmi les 57 films présents, l'Algérie est représentée par Abdenour Ziani pour la compétition internationale, tandis qu'en compétition nationale, ce sont Mohamed Latrèche et Nazim Djemaï qui caresseront l'écran blanc de leur sensibilité algérienne. Le festival peut commencer !
D'abord Fatah, de Abdenour Ziani. Toujours le son d'une mélodie. Le verbe se fait corps et traverse le cadre de notre imaginaire. Fatah est rondouillard, imposant, et traverse les pièces tel Gargantua avalant la modernité. Fatah est un poète d'un temps précieux, celui de la résistance, de la persévérance et du courage. Il est Algérien, effectue des boulots ici et là et écrit des instants mélodiques où ses sentiments inondent la blancheur d'une page pure. C'est un homme dont le cinéma ne pouvait faire abstraction, tant l'art de l'image aspire à canaliser les sujets forts. Derrière la caméra, un militant nommé Abdenour Ziani : « J'ai un parcours simple et compliqué à la fois. Mouvement lycéen, syndicat étudiant, je suis issu du mouvement associatif. J'assume le côté militantisme de toutes ces actions. Et puis, au milieu de tout cela, il y avait le ciné-club qui nous permettait d'aller vers l'autre, de nous réunir, de lutter en quelque sorte.
De fil en aiguille, il y eut Kaina Cinéma et Project'Heurt avec lesquels nous avions mis en place les « Rencontres cinématographiques de Béjaïa ». Maintenant, Kaina Cinéma, qui s'est éloigné de ces Rencontres, a créé Béjaïa Doc avec l'association Cinéma et Mémoire. Notre objectif : donner ses lettres de noblesse au documentaire en accentuant la formation. Cela se traduit par des ateliers, par un suivi et un encadrement imposant. Et en octobre de chaque année, on met en place les Rencontres du documentaire, toujours à Béjaïa ! » Dans Fatah, le réalisateur observe le poète, filme cette respiration, ses envolées lyriques dans une voiture ou bien dans un simple bistrot autour d'une bière. Ziani filme sans cesse, ne se préoccupe aucunement des artefacts, et enregistre la vérité sans la démonter.
C'est la qualité du film : « Je voulais rendre hommage à tous ces anonymes qui luttèrent contre l'intégrisme durant les années 1990. Fatah, c'est le livreur, c'est le manutentionnaire, c'est le gars qui a tout perdu et qui est obligé de prendre un crédit pour vivre. C'est une forme de résistance qui a perduré durant la décennie noire et qui n'a jamais baissé les bras. A travers le verbe de Fatah, c'est tout ce discours clair et lucide que je voulais mettre en image. » Malheureusement, et à mesure qu'on avance dans le film, Ziani ne peut éviter le piège de la fascination : « C'est son film ! Lorsque j'avais terminé le montage, il fut mon premier spectateur. S'il avait hésité sur certaines séquences, je ne l'aurais jamais montré en public. Je le respecte trop et je ne veux pas que son image soit manipulée car n'oublions pas que nous détenons une arme dans la main. La caméra peut détruire une idée. Et je m'y refuse ! ».
Fatah est trop réel, remplissant effrontément l'image de sa force tranquille. Ziani ne prenant aucun recul, tombe forcément dans le piège de l'arroseur arrosé, donc du faiseur d'images qui ne maîtrise plus son sujet. C'est le seul et important défaut du film car il lui donne une sensation d'inachevé, quelque chose qui serait déréalisé et dont le plan final serait la parfaite représentation de cette erreur : Fatah lit un de ses poèmes et décide soudainement de tout arrêter. Il se lève et quitte la pièce sans mot dire, laissant Ziani et sa caméra dans la pénombre d'un tournage raté. Stop et fin !
Autre film, autre approche avec La Parade de Taos de Nazim Djemaï. Le prénom Taos, en arabe comme en tamazight, signifie « paon », d'où la parade... Lorsque la claque se fait sentir, difficile de se lever. La joue est rosée par ce trop plein d'émotions incontrôlables et l'esprit continue son lent vagabondage à travers les couloirs lumineux du festival. La Parade de Taos du jeune réalisateur franco-algérien, Nazim Djemaï, est un bofni (bel objet filmique non identifié). Naviguant entre la sécheresse du trait propre à l'univers du cinéaste français Robert Bresson (Pickpocket, Les Dames du Bois de Boulogne) et la temporalité excessive des films de Tariq Teguia, La Parade de Taos coule dans nos veines de spectateurs exigeants.
L'histoire est simple : Taos, belle brune algéroise, rejoint sa raison de vivre au jardin zoologique d'Alger, afin de mieux retrouver l'intimité des couples épatants. Un jour, son homme ne vient pas au rendez-vous, la laissant seule et désarçonnée. Le film peut commencer. Chaque plan de Djemaï est une étude sur la forme humaine et sur le corps qui balance son sentiment tel un ermite. Composition picturale autour d'un noir et blanc granuleux, qui déverse une folie sur les séquences garnies d'amoureux furtifs. Par ce procédé, Djemaï révèle un cul-de-sac, celui de l'intimité qui vise à caresser les tendres visages des romantiques. L'auteur refuse ostensiblement de montrer en pointant du doigt les sempiternels problèmes de la société algérienne. Mieux que cela, il les filme par petites touches en se réappropriant l'imaginaire du spectateur. Très peu de dialogues, allant au plus près de la peau et du fantasme, Djemaï laisse sa caméra pénétrer à travers les contradictions de l'âme humaine.
Le résultat fait mal, car la souffrance de Taos nous renvoie à celle de nos manières étriquées. Taos croule sous l'injustice des cancres et n'aspire qu'à une seule chose : aimer librement ! Djemaï l'a compris et nous livre en une vingtaine de minutes, les désarrois subtils de la femme algérienne. Il faudra suivre de très près ce jeune auteur car quelque chose me dit qu'il nettoiera certaines pellicules poussiéreuses de son regard expérimental. On y reviendra en détail très vite… Filmée en 35mm, l'œuvre de Latrèche, L'Aide au retour tourne autour d'un fait de société qui hante la citoyenneté française, lui retirant sa fameuse étiquette des droits de l'homme. Sofija et Miroslav, couple immigré serbe et sans papiers, vit dans l'Hexagone. L'Etat leur propose une aide de 11 000 euros pour retourner dans leur pays avec leurs deux enfants.
Fort de ce canevas, Latrèche va se focaliser autour d'un élément primordial afin de cerner et dévoiler la condition kafkaïenne de ces gens sans terre : plus le temps est dilaté, plus ses propos seront mieux façonnés. Dès la séquence d'ouverture, nous plongeons dans l'intimité de ce couple épatant qui ne cherche qu'à cavaler après la vie. En un seul plan-séquence, Latrèche tourne autour de ses personnages, capte leurs peurs, et finit par tisser un lien avec la parole en déposant une réelle intention : la subtilité ! De fil en aiguille, nous comprenons que Sofija a été convoquée par la préfecture pour finaliser cette fameuse aide au retour. Nous sentons la gêne, la tristesse enfouie dans son cœur perdu. Nous en sommes conscients car Latrèche ne force pas le trait, laissant une nette respiration envahir le cadre. Plus on avance, plus Latrèche commence à hésiter entre le cinéma et la politique.
La tentation est trop grande car le sujet du film - grandiloquente actualité - prend souvent la forme d'un réquisitoire. Effectivement, lorsque surgit cette fameuse et tant attendue scène de convocation, l'auteur ne peut s'empêcher de dessiner une nouvelle case par crainte que le spectateur ne comprenne pas la portée dramatique de la situation. A ce moment du film, Latrèche ne fait plus confiance à ses plans. Il amplifie le message avec un discours qui déréalise ses propos. « Vous savez d'où je viens ? Du Kosovo ! Vous savez ce qui s'est passé dans ce pays ? », hurle de détresse Sofija à une fonctionnaire froide comme la mort et superbement interprétée par Assia Maïga. A ce moment précis, nous savons une chose : Latrèche vient de tomber dans le piège du cinéma politique et c'est regrettable !


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