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«Le centre ne saurait exister sans la recherche scientifique algérienne»
Slimane Hachi. Chercheur et directeur du Centre régional pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel en Afrique
Publié dans El Watan le 02 - 03 - 2019

A l'occasion du lancement du nouveau Centre régional de catégorie 2 pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel en Afrique, et de l'exposition qui se tiendra au palais de la Culture Moudfi Zakaria de Kouba, le chercheur Slimane Hachi revient sur les grandes lignes de ces deux événements phares.
– Vous avez été nommé dernièrement à la tête du nouveau centre, mais au préalable pourriez-vous revenir sur les deux conventions importantes qui ont été ratifiées par l'Algérie ?
L'Unesco a élaboré plusieurs conventions internationales, dont l'Algérie a ratifié quelques unes. L'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture est une institution spécialisée de l'Organisation des Nations unies créée le 16 novembre 1945, à la suite des dégâts et des massacres de la Seconde Guerre mondiale. Au niveau du volet culturel plus précisément, pour le patrimoine, l'Unesco met en œuvre un certain nombre de conventions qui sont adoptées par la conférence générale que les Etats ratifient. Et une fois que ces conventions sont ratifiées, elles sont mises en œuvre.
Il y a deux conventions qui me paraissent importantes pour les pays et pour l'Unesco. La première, de 1972, s'occupe à sauvegarder, protéger et préserver le patrimoine matériel et naturel. Il faut savoir que le patrimoine matériel, ce sont des héritages culturels qui ont une matérialité, tels que, par exemple, Tipasa, ou encore Djemila. Cette convention, qui a été ratifiée par un très grand nombre d'Etats est à l'œuvre depuis le milieu des années 70. Chemin faisant, au fur et à mesure qu'on la mettait en œuvre, on se rendait compte que seul un pan du patrimoine était pris en charge.
Tout ce qui n'est pas dans le patrimoine de la matérialité n'était pas pris en charge. En 2000, le directeur général de l'Unesco, Koïchiro Matsuura, avait décidé, après mûre réflexion, d'élaborer une autre convention qui serait chargée de la sauvegarde et de la protection du patrimoine immatériel. Le comité de rédaction a été présidé pendant deux ans par l'ancien ministre des Affaires étrangères algérien et ancien président de la Cour internationale de justice de la Haye, Mohammed Bejaoui. L'Algérie a grandement participé à ce comité de rédaction de la convention.
A partir de 2002, le ministère de la Culture algérien a envoyé régulièrement des experts à toutes les réunions du comité de rédaction et de réflexion. En octobre 2003, la convention en question a été adoptée lors de la 32e session de la conférence générale de l'Unesco, qui s'est tenue à Paris. Il a fallu, par la suite, attendre que cette convention soit ratifiée par les Etats pour être mise en œuvre. L'Algérie a été le premier pays au monde à avoir ratifié cette convention en 2004. L'Algérie a activement participé à l'élaboration de cette convention de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Aujourd'hui, il y a 175 Etats qui ont ratifié cette convention. La première réunion de ce premier comité s'est tenue à Alger en 2006. Puis, maintenant, il y a une réunion du comité tous les ans.
Cette convention de 2003 est très importante pour nous. D'autre part, le second aspect qui me paraît important est celui de l'intérêt de l'Algérie pour l'Afrique. Pour rappel, l'Algérie a organisé le premier Festival culturel panafricain en 1969. Quarante ans après, l'Union africaine décide de confier à l'Algérie le soin d'organiser la seconde édition de ce festival, qui s'est déroulé en 2009 à Alger. J'ai eu d'ailleurs l'honneur et le privilège d'organiser un certain nombre de colloques, dont deux me paraissent les plus importants. Le premier, qui a trait à la préhistoire, s'est déroulé à Sétif, j'en avais confié l'organisation à un grand spécialiste, Mohamed Shanouni.
Nous avions fait venir les plus grands savants du monde, s'agissant des origines de l'humanité. Le second colloque avait été organisé à Alger sous le thème «L'anthropologie africaine». A la fin de ce second colloque, nous avons rédigé la déclaration d'Alger, laquelle a été publiée dans les actes du colloque. Cette déclaration d'Alger appelait à la prise en charge des patrimoines culturels de l'Afrique. Une prise en charge plus efficace, globalisante, fédératrice et plus intégratrice de la culture africaine. Cette déclaration d'Alger, a appelé explicitement les chercheurs, les universitaires, les étudiants à se structurer et à créer des établissements, des structures, des ONG et des associations en faveur du patrimoine culturel africain.
– D'où la création officielle, à Alger, du centre régional de catégorie 2 chargé du patrimoine immatériel et du continent africain…
Effectivement, le centre dont nous parlons aujourd'hui est l'une des retombées de ce grand Festival culturel panafricain de 2009 à Alger. Nous avons entrepris les démarches auprès de l'Unesco dès 2011-2012. Nous avons repris le chemin de la discussion en 2014 avec l'Unesco pour créer à Alger un centre dit «de catégorie 2», en faveur du patrimoine du continent. Voilà comment, en 2014, nous sommes arrivés, après avoir suivi toutes les étapes nécessaires, notamment une étape décisive, celle de l'envoi par la directrice générale d'un expert, à élaborer un rapport de faisabilité.
Il s'agit d'un expert neutre, qui établit son rapport et qui le soumet à la directrice générale de l'Unesco. L'assemblée générale, sur la base des rapports de faisabilité, décide de choisir le pays qui semble le mieux outillé pour recevoir ce centre. Et d'ailleurs, dans ce rapport de faisabilité, qui est maintenant sur le site de l'Unesco, il est dit la chose suivante, qui est très importante : «L'Algérie met en œuvre la convention de 2003 depuis 1998.» L'Algérie met en œuvre et protège son patrimoine culturel immatériel grâce à cette loi qui est antérieure à la convention. C'est pour cela que l'Algérie est rentrée dans cette convention sans aucune difficulté, car sa propre loi nationale était à l'œuvre. Voilà l'une des raisons pour lesquelles ce centre est né.
C'est un grand honneur pour nous que l'Algérie reçoive ce centre de catégorie 2, chargé du patrimoine immatériel et du continent africain. Il ne faut pas oublier aussi qu'en février 2014, un accord gouvernemental a été signé avec la directrice générale de l'Unesco par la ministre de la Culture de l'époque. Cet accord a été ratifié en décembre 2015 par le président de la République algérienne. Après la ratification, il fallait mettre en place les instruments administratifs et de contact avec l'Unesco. J'ai eu l'honneur d'avoir été chargé de ce projet de montage et des rouages de ce centre.
Nous sommes à la veille de son commencement et de le voir mis en œuvre, puisque le 5 mars 2019, à Alger, aura lieu la réunion de la première session du conseil d'administration international de ce centre, qui donnera le signal de son démarrage. Ce conseil est présidé par l'Algérie. Il y a, aussi, un relais international dans ce conseil d'administration. Il y a un représentant de la directrice générale de l'Unesco et il y a des représentants par sous-région. Pour l'Afrique du Nord, c'est la Tunisie qui préside. Pour l'Afrique de l'Ouest, c'est le Mali, pour l'Afrique de l'Est, c'est l'Ethiopie, pour l'Afrique Centrale, c'est le Cameroun, et pour l'Afrique australe c'est la Namibie.
– Quelle sera la fonction de ce centre ?
Ce centre de droit algérien est sous l'égide de l'Unesco. Il est chargé de mettre en œuvre la stratégie culturelle, patrimoniale immatérielle de l'Unesco. Nous avons un petit siège provisoire qui est situé à la villa Abdeltif. Le siège officiel, Djenane Lakhdar, qui est actuellement en restauration, sera livré dans quelques mois. A partir du 5 mars prochain, le centre sera en activité. Lors de l'assemblée générale du 5 mars prochain, nous aurons un certain nombre de sujets à discuter, dont des textes à adopter et des mesures à identifier. Les objectifs de ce centre sont la mise en œuvre des objectifs stratégiques de la commission de culture de l'Unesco, s'agissant du patrimoine culturel immatériel.
A partir de l'existence affirmée d'une recherche scientifique en sciences humaines et particulièrement en sciences du patrimoine, il y avait lieu de structurer tout cela en dehors de l'Algérie, c'est-à-dire de pouvoir faire bénéficier le continent de la connaissance et de l'expertise de la recherche scientifique algérienne qui, aujourd'hui, arrive à se proposer sur la scène internationale de la recherche, vu ses capacités et le capital accumulé. Aujourd'hui, l'Algérie peut proposer des compétences au contient. Nous avons un certain nombre d'expériences et la connaissance anthropologique, sociologique, de la culture, notamment de notre grand Sahara. Ce centre ne saurait exister sans la recherche scientifique algérienne, maghrébine.
– Le jour de la première session du conseil d'administration de ce centre de catégorie 2 sera organisée, au palais de la Culture Moufdi Zakaria de Kouba, à Alger, une imposante exposition sur les patrimoines culturels immatériels classés sur les listes de l'Unesco…
Il est tout à fait exact qu'à l'occasion de la première session de ce conseil d'administration, le 5 mars, nous allons organiser une grande exposition au Palais de la culture Moufdi Zakaria de Kouba. Une exposition qui s'étalera sur près de 2000 mètres carrés et qui sera dédiée aux patrimoines culturels immatériels, classés sur les listes de l'Unesco. 27 pays seront conviés.
Chaque pays sera représenté par un seul élément. Nous avons pris les éléments qui représentent une certaine diversité dans les domaines du patrimoine. Nous avons pris des savoir-faire, des activités, des arts de l'artisanat, tels que, entre autres, la fabrication de masques, des instruments de musique, des danses et des méthodes thérapeutiques. Nous avons structuré cette exposition par sous-région. L'Afrique du Nord est représentée par l'Algérie, la Tunisie, le Maroc, l'Egypte et la Maurétanie. Le Maghreb est représenté, quant à lui, par l'élément que nous sommes en train de préparer, le couscous.
L'Afrique de l'Ouest est représentée par le Mali, le Niger, le Sénégal. Nous avons aussi des pays de l'Afrique de l'Est, de l'Afrique australe et de l'Afrique centrale. Il s'agira d'un voyage initiatique, depuis l'Afrique du Nord jusqu'à l'Afrique du Sud, en passant par l'Afrique de l'Est, de l'Ouest et centrale, où nous allons prendre connaissance des patrimoines. Le visiteur de cette exposition ressortira avec une image de l'identité africaine. L'Afrique est le continent matinal et le continent d'avenir. D'ailleurs, de grandes puissances l'ont compris.
– L'Algérie sera-t-elle présente par tous ses patrimoines ?
L'Algérie, comme c'est elle qui organise cette exposition, sera présente par tous ses patrimoines, aussi bien ceux qui sont classés que ceux que nous sommes en train de monter.
– Cette exposition voyagera-t-elle dans d'autres wilayas du pays, ou encore à l'international ?
J'ai insisté pour que la conception de cette exposition puisse assurer plus de mobilité. Elle est conçue comme une exposition mobile. Il est nécessaire que cette exposition puisse aller à Oran, à Constantine, à Tamanrasset, à Béjaïa, à Sétif, ainsi qu'à l'international, par exemple au siège de l'Unesco, à Paris.
– Hormis les éléments qui sont déjà inscrits sur le patrimoine immatériel de l'Unesco, d'autres dossiers de candidature seront-ils remis prochainement à l'Unesco pour la classification de certains chants algériens ?
L'Algérie est parmi les pays qui ont le plus d'éléments inscrits au patrimoine immatériel de l'humanité. Nous avons inscrit seps éléments : l'Ahellil du Gourara, les rites et les savoir-faire artisanaux associés à la tradition du costume nuptial de Tlemcen, le pèlerinage annuel au mausolée de Sidi Abdelkader Ben Mohammed, dit «Sidi Cheikh», le rituel et les cérémonies de la Sebeiba de Djanet, Le sbuâ de Timimoun, les pratiques et savoirs liés à l'Imazd des communautés touareg de l'Algérie, du Mali et du Niger et les savoirs et savoir-faire des mesureurs d'eau des foggaras ou aiguadiers du Touat-Tidikelt. Autre élément important, l'Unesco va organiser, en juin prochain, au sein de son siège, une manifestation mondiale sur la culture et l'eau.
L'Unesco a retenu comme emblème et comme élément d'importance les mesureurs d'eau des foggaras. Nous avons quatre chants populaires emblématiques de l'Algérie qui sont le raï, le chwiq de kabylie, le Ayé Ayé de l'Atlas, le srawi des Aurès. Ces quatre chants emblématiques feront l'objet d'un dépôt de dossier tous les ans.
– L'Algérie compte également déposer, en mars prochain, un dossier à l'Unesco, en vue d'inscrire le couscous comme patrimoine immatériel mondial…
Le couscous est un mets emblématique de l'Afrique du Nord qui nous vient du fonds des âges, probablement du néolithique d'avant Massinissa. Dans cette civilisation du blé qui intéresse particulièrement le bassin algérien, il y a la façon de faire et de cuire la semoule, donnant du pain et de la pâte par cuisson en contact direct avec le feu. Mais ce qui caractérise l'Afrique du Nord, c'est l'invention de la cuisson de la semoule et de la farine de blé à la vapeur. Cela est une grande révolution.
Le couscous est le mets de base de tous les Africains du Nord. Depuis la Tripolitaine jusqu'à l'Atlantique. Ce couscous est répandu partout. Evidemment nous n'allons pas classer les variétés. Ce n'est pas un classement de recettes de cuisine. C'est le classement d'un savoir-faire et d'un patrimoine. Ce savoir-faire mobilise toute une panoplie de fabrications d'ustensiles et de savoir-faire, depuis la transformation du grain de blé jusqu'au grain de couscous. Toutes les cérémonies où ce mets est partagé vont, également, faire partie du dossier de classement. C'est pour cela que ce dossier s'appelle «savoir-faire lié à la production et à la consommation du couscous».
Les pays qui l'ont dans leur patrimoine se sont réunis à plusieurs reprises pour élaborer un dossier en commun. Il s'agit de la Tunisie, de l'Algérie, du Maroc et de la Maurétanie. Nous nous sommes réunis plusieurs fois en Algérie, et à l'unanimité, ces pays à la première réunion ont désigné l'Algérie pour coordonner le dossier. Nous sommes justement en train de coordonner ce dossier. Il nous restera une ultime réunion que nous ferons vraisemblablement à Alger ou dans une autre capitale pour pouvoir finaliser le dossier qui sera déposé à l'Unesco. Nous espérons que notre couscous sera déclaré patrimoine de l'humanité.


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