Ils seraient 280 000 habitants de cette wilaya à être relogés en 20 ans, l'équivalent d'un peu plus de la moitié de la population actuelle. Pas moins de 260 familles ont été relogées cette semaine à Besbès et à El Tarf. On attend, non sans impatience, la distribution de 1 600 logements comme un peu partout dans les différentes localités de la wilaya. Cela n'en finit pas. Il y a une sorte de cercle vicieux qui s'est installé entre les pouvoirs publics et les populations : réalisations et livraison avec protestations et émeutes suivies de distributions et remises en cause puis, de nouveaux programmes avec le même cortège de protestations et ainsi de suite. Un cercle vicieux sur lequel est venue se greffer une prébende prélevée par un accord tacite entre les autorités centrales et locales, les entreprises de réalisation et les chargés de la distribution. Et elle est insatiable. En effet, selon les chiffres officiels de la direction du logement, ce serait quelque 280 000 habitants de cette wilaya qui ont été relogés en 20 ans, l'équivalent d'un peu plus de la moitié, soit 56 %, de la population actuelle estimée à près de 500 000 habitants, selon le recensement de 2008, mais 70 % de celle de 2009, un peu plus de 400 000 âmes. Cela paraît vraisemblable et ça l'est. El Tarf n'était pas un désert avant 1999. On a recensé 350 000 personnes en 1998, avant le lancement des programmes de logement toutes formules confondues. Ils totalisent à ce jour 67 582 unités, dont 80 % ont été livrées et distribuées. Ce n'est quand même pas toute la population de l'époque qui a été relogée en 20 ans ? Il n'y a pas de fourberie. Pas d'erreur de calcul. Aucun doute sur les programmes et le nombre des logements réalisés. On peut les recompter un par un au besoin. Il n'y a pas eu de mouvement massif vers la wilaya, qui est un territoire resté peu attractif sur le plan économique. Dans les années 1990, il y a eu un flux, surtout estival, qui offrait relativement plus de sécurité, mais il n'est pas de l'ampleur qu'on voudrait lui donner. Alors que s'est-il passé ? Les logements distribués sont-ils réellement occupés ? Impossible, cela doublerait carrément la population actuelle. Se serait-on trompé dans les recensements ? Impossible si on les compare à la liste électorale d'El Tarf qui compte 220 000 électeurs. Ou alors cette dernière est considérablement gonflée ! Pas de réponse. Nul n'a été en mesure d'apporter une réponse sans faire allusion à la prédation, à la corruption, au favoritisme, à l'électoralisme et au clientélisme qui émanent des responsables locaux et centraux, des agents de l'administration et des membres des commissions d'attribution, des organismes de gestion du patrimoine immobilier comme l'OPGI ou l'ENPI bien que cette dernière soit faiblement représentée dans le quota d'El Tarf. Des centaines de logements qui ont été détournés par les services de l'Etat et leurs partenaires, auxquels il faut ajouter les pratiques informelles dans les transactions immobilières. Les manifestants qui coupent les routes après chaque affichage de liste ne s'y sont pas trompés. Sur les 67 582 unités d'El Tarf, il y a, à ce jour, 30 050 unités. C'est avec 27 770 de la formule «habitat rural», soit la moitié de l'ensemble des formules. Ce qui donne le relogement de 120 000 personnes soit 25 % de la population actuelle. C'est incompréhensible lorsque les statistiques montrent qu'en 20 ans la population urbaine d'El Tarf est passée de 35% à plus de 50 % aujourd'hui. C'est-à-dire qu'elle a baissé de 15 % et qu'il y a aujourd'hui autant d'habitants dans les villes qu'à la campagne dans la wilaya d'El Tarf. Il faut croire que le clientélisme a fait de l'habitat rural» des résidences secondaires.
