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«Au moins 50% de l'activité économique dans le pays est informelle»
Nadji Khaoua. Economiste chercheur et consultant international
Publié dans El Watan le 16 - 03 - 2020

-D'après vous, qui êtes spécialiste des inégalités et développement, qu'est-ce que «l'inégalité» ? Est-ce la résultante de la fatalité de telle sorte que la combattre serait sans objet ? Ou bien, résulterait-elle de conditions socio-politiques différenciées selon l'échelle sociale ?
On peut résumer l'ensemble des aspects qui concourent à l'inégalité, en une approche englobante. Il s'agirait dans ce cas de la considération de l'inégalité résultant de différences multiples entre les diverses couches de la population, certaines sociologiquement enracinées, comme par exemple conditions de vie à la campagne et conditions de vie en milieu urbain, taux de scolarisation rurale et taux de scolarisation urbain, etc., et d'autres dus aux inefficiences des politiques appliquées dans les domaines économiques et sociaux, comme le taux de chômage par classes d'âge, le maillage infrastructurel des trois principaux territoires formant l'Algérie, etc. On peut continuer ainsi longtemps de sérier les différentes dimensions que prend l'inégalité, dont les causes premières ressortent à l'inadéquation des politiques publiques dans divers domaines sinon nous de la vie sociale.
Nous pouvons avancer sans beaucoup d'hésitation que l'inégalité en tant que caractérisation première de la société algérienne est le seul résultat tangible des différents régimes politiques qui nous gouvernent depuis au moins 1980 à ce jour. Un des objectifs considérés parmi les premiers dont est chargé l'Etat, représentant et symbole institutionnel suprême des intérêts généraux de l'ensemble de la population, est de remédier par ses politiques à l'existence durable de l'inégalité dans ses principales dimensions.
Diminuer sinon annihiler les plus socialement bloquantes de ces inégalités est une des missions de l'Etat à travers ses politiques et quels que soient les choix idéologiques partisans des régimes gouvernementaux successifs. C'est les résultats atteints par une telle politique qui conduisent aux raffermissements des liens sociaux et au renforcement de la cohésion sociale, ou les affaiblissent. Le citoyen se sent dans ce cas, ou ne se sent pas, membre à part entière de la communauté nationale et accepte, ou refuse, les contraintes externes qui puissent affecter, à une période ou une autre, l'évolution conjoncturelle ou même structurelle de cette dernière.
Depuis au moins 2005, et la survenue des premières tentatives d'émigration informelle collective par voie maritime à partir d'Annaba et de ses environs côtiers, ensuite élargies à l'ensemble des 1600 kilomètres du littoral, des signes clairs indiquent que la cohésion sociale s'effrite et les liens sociaux se désagrègent. De plus en plus de citoyens sont convaincus qu'ils ne le sont plus et que bâtir un avenir acceptable n'est pas possible pour elles et eux dans leur pays d'origine.
Cette profonde mutation se dévoile à tout un chacun chaque jour à travers les récits de presse sur le nombre en milliers chaque année, d'émigrants clandestins qui tentent et souvent retentent pour la énième fois, de risquer leurs vies en mer pour quitter leur pays, se dirigeant toujours vers la rive nord de la Méditerranée.
Les caractéristiques de ces migrants informels ne sont plus cantonnés dans une classe d'âge particulière ni limités à un seul sexe, ni à un niveau faible de formation, ni seulement et exclusivement à des personnes au chômage ou à la recherche d'emploi.
Quels sont les sociologues universitaires et ceux apparentés aux sciences sociales et humaines en général qui s'y sont intéressés, qui ont tenu à jour leurs statistiques pour dévoiler à l'opinion publique la gravité de cette situation et inciter les pouvoirs publics à revoir leurs politiques ? Ou bien n'y a-t-il plus, en majorité, que des «salariés» soumis à l'université, en lieu et place d'une élite compétente dont l'objectivité et l'éthique sont, avec le savoir, la caractéristique indélébile ?
Depuis la même époque avec l'introduction du système dit «LMD» dans les universités, où là encore celle d'Annaba a été choisie avec une dizaine d'autres comme «cobaye» pour l'acclimatation autoritariste de ce «système d'enseignement universitaire», pâle copie mensongère imposée politiquement, de l'original européen créé pour les besoins du marché unique de l'UE, avec ses 27 pays membres, pas une seule année ne passe sans que des cohortes entières de bacheliers choisissent de ne pas rester pour étudier dans nos universités.
En 2018, plus de 26 000 dossiers de visa d'études ont été déposés auprès de la principale représentation consulaire européenne à Annaba. Combien l'ont été à Alger, à Oran ? Quelles preuves du terrain plus objectives que celles-là sur la profondeur de l'inégalité ressentie par la population ? Pour paraphraser l'un des plus célèbres intellectuels prolifiques actuels, et au vu de ces situations tragiques répétées dans la plupart des segments de la vie sociale, on peut se demander finalement «qui dirige l'Algérie ?»
-Et la «fiscalité», comment la définiriez-vous ? Est-elle un simple système d'imposition des revenus ? Ou bien est-elle beaucoup plus que ne le suggère son approche techniciste ou technique ?
L'approche de l'inégalité par la fiscalité nous semble être une des plus judicieuses approches économiques pour immédiatement la saisir, car cette dernière, l'inégalité économique et fiscale, concerne directement le niveau de vie quotidien de la majorité de la population, en particulier celle vivant de revenus aux montants fixes sur le moyen et long termes, comme le sont les revenus salariaux. Dans les universités modernes, l'inégalité est parfois le projet de recherche de toute une vie pour les économistes et les chercheurs qui font honneur à leur fonction d'élite universitaire, soutenu en cela par leurs universités, comme par exemple Anthony B. Atkinson, dont très peu «d'économistes universitaires en Algérie» connaissent l'existence et encore moins les écrits.
Chez nous, quand on est invité à participer à une conférence académique internationale comme celle ayant eu lieu cette année à Helsinki, on se voit répondre par son université : «Non, pas de prise en charge possible». A croire que l'administration universitaire à Annaba a peur que la pratique de la recherche scientifique, particulièrement en économie, dévoile quelques monstruosités qu'elle voudrait cacher sous le tapis et à jamais !
La fiscalité, en tant qu'imposition sur le revenu, peut être cernée simplement dans un langage accessible à tous, comme «une contribution réglementée par la loi, selon le volume du revenu total de chacun, à financer les besoins les plus basiques de la société». Pratiquée ainsi, la fiscalité concrétise l'effectivité de la solidarité entre les citoyens, selon leurs niveaux de revenu.
En termes simples et directs, la fiscalité se matérialise concrètement, selon la manière dont elle s'applique, l'appartenance à la nation des citoyens, des plus riches aux plus démunis, qu'ils soient salariés, entrepreneurs ou propriétaires immobiliers, fonciers et autres, dotés d'un patrimoine dont les bénéfices d'usages (locations, etc.) forment leurs revenus rentiers.
Un des principes sur la base duquel est assise la citoyenneté dans les pays modernes est que l'imposition fiscale est proportionnelle au niveau du revenu, la plus basse possible sinon nulle lorsque le niveau de revenu est à la limite du niveau de subsistance, la plus élevée possible lorsque le niveau du revenu est le plus élevé. Ainsi, chacun contribue aux besoins de financements publics selon ses revenus, les citoyens pauvres comme ceux riches, les citoyens salariés comme ceux exerçant des métiers libéraux ou ceux dotés d'un patrimoine générant un revenu. Ne pas s'acquitter de ses obligations fiscales y est souvent considéré comme un crime.
La seule dissimulation d'une partie de son revenu aux services fiscaux entraîne aussi souvent la déchéance publique et l'emprisonnement avec confiscation des revenus dissimulés ou des biens que ces revenus ont permis d'acquérir à travers la fuite fiscale et le blanchiment des capitaux. L'actualité immédiate le montre dans plusieurs pays modernes.
-Qu'en est-il justement de l'Algérie ?
Remarquons tout d'abord que les données les plus officielles, publiées par diverses institutions et non pas par des chercheurs individuels isolés, dont on peut mettre en doute l'exactitude des estimations, indiquent qu'au moins 50% de l'activité économique dans le pays est informelle. Pour un PIB estimé ces dernières années à hauteur de plus de 190 milliards de dollars, cela veut dire qu'environ 95 milliards de dollars sont investis, circulent et génèrent un important revenu global pour leurs propriétaires, sans qu'ils ne soient ni identifiables, ni traçables, ni comptabilisables dans les ressources officielles et légales à partir desquelles les pouvoirs publics définissent leurs politiques économiques, ni à fortiori imposables.
Y a-t-il plus grand échec pour un régime politique pour un gouvernement quelconque ? Y a-t-il plus grande source de défiance pour ses citoyens salariés dont la majorité terminent leurs mensualités soit par les privations sur le nécessaire, soit par l'enfoncement dans la spirale de l'endettement ?
En second lieu, si on se concentrerait sur la fiscalité des revenus, l'observateur le moins averti remarquera d'emblée que seuls les revenus salariaux sont réellement imposés et règlent leurs charges fiscales à la source, sans échappatoires possibles, puisque ce sont leurs employeurs publics dans la plupart des cas qui sont chargés par la réglementation en cours depuis des années, de ponctionner à la source le montant brut des salaires pour en déflaquer les charges fiscales. Par contre, les revenus issus des activités commerciales et libérales sont eux laissés au bon vouloir et à la sincérité des déclarations de leurs titulaires.
L'actualité très récente en ce domaine montre que les pouvoirs publics n'envisagent pas de changer la donne et de faire en sorte que les obligations fiscales évoluent vers une moins grande inégalité entre les Algériens et que chacun, salarié ou libéral, y contribue au prorata de son revenu réel sans possibilité d'en soustraire une partie, sous peine de criminalisation.
Jusqu'à ce jour de mars 2020, le salarié du bas de l'échelle, souvent à la limite de la subsistance, celui touchant un salaire imposé à la source et calculé à partir d'un SMIG de 18 000 DA, contribue proportionnellement beaucoup plus que le médecin libéral, dont le revenu sincère et exact n'est pas totalement déclaré par le concerné, ou que le notaire, ou que l'architecte libéral…
Que dire alors de l'ensemble du secteur économique privé, dont au moins la moitié des activités se déroule, comme on l'a souligné plus haut, dans la sphère obscure de l'informel ?
Enfin, les obligations fiscales dans un Etat moderne représentant de l'ensemble des couches sociales et visant le renforcement de la notion de «citoyen» égal en droits et en devoirs à tous les autres formant la communauté nationale incluent la valeur actualisée du patrimoine détenu sous ses diverses formes immobilières, foncières, etc.
Il suffit d'observer, à ce sujet, que tout un chacun remarque aisément que le patrimoine n'est non seulement pas imposé en Algérie, mais qu'en plus, les différentes carences des équipes gouvernementales successives depuis 1980 ont permis d'une part la privatisation injustifiée au profit de clientèles diverses d'une partie du patrimoine public y compris, comme l'ont noté en son temps les médias internationaux, celui existant à l'étranger, et d'autre part, la perpétuation des fuites de capitaux et de leur blanchiment à travers des acquisitions immobilières privées à l'étranger, en particulier en France, sans soumettre leurs propriétaires algériens à des enquêtes impartiales.


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